Irak : En réponse à l’attaque de Camp Taji, des frappes américaines visent cinq sites d’une milice chiite

Tué en janvier dernier par une frappe américaine alors qu’il se trouvait à Bagdad, le général Qassem Soleimani, le chef des opérations extérieures des Gardiens de la révolution iraniens, aurait eu 63 ans ce 11 mars. Or, ce même jour, Camp Taji, une base irakienne abritant des militaires de la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis, a été visé par au moins 30 roquettes Katioucha de 107 mm, dont 18 sont tombées à l’intérieur de cette emprise.

Cette attaque, qui a surpris par son ampleur, a fait trois tués parmi les membres de la coalition, dont deux militaires américains et la caporale britannique Brodie Gillon, une réserviste de 26 ans, ainsi que 14 blessés de différentes nationalités. Cinq sont dans un état grave.

Dans la foulée, des positions tenues par la coalition de milices chiites irakiennes « Hachd al-Chaabi » près de la localité syrienne de Boukamal ont été visées par des frappes aériennes. L’Observatoire syrien des droits de l’Homme [OSDH] a avancé le bilan de 26 tués. On aurait pu penser que ces raids avaient été menés par la coalition anti-jihadiste… Mais cette dernière a démenti en avoir été à l’origine, ce qui renforce l’hypothèse d’une action israélienne.

Cependant, le Pentagone a fait savoir qu’il réagirait à cette 22e attaque contre des intérêts américains en Irak depuis l’automne dernier. « Les États-Unis ne toléreront pas les attaques contre nos hommes, nos intérêts ou nos alliés », a en effet déclaré son chef, Mark Esper. « Toutes les options sont sur la table alors que nous coopérons avec nos partenaires pour punir les coupables et maintenir une dissuasion, comme nous l’avons fait ces derniers mois », a-t-il ajouté, avant d’attribuant l’attaque contre Camp Taji à des « groupes armés chiites pro-iraniens. »

Cela étant, en décembre, après une attaque contre une base irakienne abritant des militaires américains près de Kirkouk, les États-Unis avaient visé la milice chiite irakienne Kata’ib Hezbollah [KH ou Kataëb Hezbollah]. Ce qui donna ensuite lieu à de violents incidents aux abords de leur ambassade à Bagdad.

Reste que M. Esper a également indiqué que le président Trump lui avait donné carte blanche pour « faire ce qu’il a à faire » en représailles de l’attaque de Camp Taji. « Nous nous focalisons sur ce groupe qui a commis ceci en Irak », a-t-il précisé, laissant entendre qu’il n’était pas question de viser le territoire iranien.

Pour les États-Unis, s’en prendre de nouveau à un groupe relevant du Hachd al-Chaabi allait être délicat. Surtout après la frappe contre le général Soleimani et Abou Mehdi al-Mouhandis, le numéro deux de cette alliance de milices chiites. En janvier, le Parlement irakien, dominé par les partis chiites, avait voté une résolution pour exiger le départ des troupes américaines d’Irak.

Finalement, le 12 mars, la riposte américaine s’est traduite par des frappes contre cinq sites utilisés par le Kata’ib Hezbollah en Irak. Le Pentagone a expliqué que les positions visées étaient des dépôts d’armes et de munitions. Et de qualifier ces raids de « contre-attaque défensive, proportionnelle et en réponse directe à la menace » posée par les milices chiites pro-Téhéran  » qui continuent à attaquer les bases accueillant les forces de la coalition. »

« Ces groupes terroristes doivent cesser leurs attaques contre les forces américaines et de la coalition, sinon ils devront en subir les conséquences, au moment et à l’endroit de notre choix », a poursuivi le Pentagone.

Le Royaume-Uni, qui n’a, a priori, pas participé à ces frappes, a jugé, via son ministre des Affaires étrangères, Dominic Raab, que la « réponse à la lâche attaque contre les forces de la coalition en Irak a été rapide, décisive et proportionnées. » Et d’ajouter : « Les forces britanniques sont engagées en Irak avec les partenaires de la coalition pour aider la lutte antiterroriste du pays et quiconque cherche à s’en prendre à elle peut s’attendre à une réponse forte. »

De son côté, l’Iran s’en est une nouvelle fois pris aux États-Unis qui, selon le porte-parole de sa diplomatie, Abbas Mousavi, « ne peuvent pas blâmer les autres pour les conséquences de leur présence illégale en Irak et la réaction de la nation à l’assassinat et au meurtre de commandants et de combattants irakiens. » Pour rappel, si les troupes américaines ont été déployées en Irak à partir de 2014, à la demande des autorités irakiennes, pour combattre l’État islamique [EI ou Daesh] dans le cadre d’une coalition internationale.

Enfin, l’armée irakienne, qui vient de mener une opération contre une cellule dormante de Daesh avec l’appui des forces américaines [lesquelles y ont perdu deux militaires, le 8 mars] a qualifié les frappes contre Kata’ib Hezbollah de « perfides », affirmant qu’elles avaient tué trois de ses soldats ainsi que deux policiers. En outre, le président irakien, Barham Salih, a estimé que ces frappes ont « violé la souveraineté nationale. »

Enfin, le ministère irakien des Affaires étrangères, qui a dénoncé une « agression américaine », a convoqué les ambassadeurs des États-Unis et du Royaume-Uni.

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