Libye : L’Union européenne va lancer une nouvelle opération navale pour faire respecter l’embargo sur les armes

Lancée en 2015 par l’Union européenne [UE], l’opération navale EUNAVFOR MED « Sophia » avait pour mission première de démanteler le modèle économique des passeurs de migrants opérant depuis la Libye.

Puis ne pouvant opérer dans les eaux territoriales libyennes pour des raisons politiques et diplomatiques, cette mission mit l’accent sur la formation des gardes-côtes relevant du Gouvernement d’union nationale [GNA] établi à Tripoli, la collecte d’informations sur sur le trafic d’exportations de pétrole libyen ainsi que sur la mise en oeuvre de l’embargo sur les armes décrété par les Nations unies à l’égard de la Libye.

Sur ce dernier point, les navires européens de l’opération Sophia étaient autorisés à intercepter et inspecter en haute mer tout bateau suspecté de transporter des armes et des équipements militaires, sans avoir à demander l’autorisation du pays pour lequel il battait pavillon. Et cela, en vertu de la résolution 2292 [placée sous chapitre VII, c’est à dire qui autorise le recours à la force si nécessaire, nldlr], adoptée en juin 2016 par le Conseil de sécurité des Nations unies.

Cet aspect fut d’ailleurs à l’origine de dissensions entre les pays membres. Ainsi, l’Italie, qui dirigeait cette opération, plaidait pour un nouveau système de « répartition automatique » des migrants recueillis en Méditerranée, estimant qu’elle n’avait pas à être la seule à les prendre en charge. L’existence de la mission Sophia fut dès lors menacée… Mais, finalement, elle fut prolongée à la condition de ne plus mettre de navires à sa disposition. Et, depuis un an, elle s’est poursuivie avec des moyens aériens et satellitaires.

Cependant, la semaine passée, le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 2510, laquelle rappelle la nécessité de faire respecter l’embargo sur les armes relatif à la Libye. Embargo allègrement violé au bénéfice des deux camps rivaux [GNA et gouvernement de Tobrouk] qui de disputent le pouvoir.

On aurait dès lors pu penser que l’opération Sophia allait retrouver ses navires pour s’acquitter de cette tâche. Mais telle n’est pas la décision prise ce 17 février par les 27 ministres des Affaires étrangères de l’UE.

En effet, lors d’une réunion à Bruxelles, ils sont convenus de lancer une nouvelle mission navale à l’est des côtes libyennes [donc en Méditerranée orientale] pour faire respecter cet embargo sur les armes. Ce qui est logique… puisque les cargos chargés de matériels militaires destinés aux belligérants y transitent. Notamment ceux affrétés par la Turquie et les Émirats arabes unis.

Seulement, « si cette mission devait provoquer un afflux de bateaux de migrants, elle sera arrêtée », a prévenu Luigi di Maio, le chef de la diplomatie itanienne. « Il s’agit d’une mission pour lutter contre le trafic d’armes. L’opération Sophia n’existe plus », a-t-il insisté.

Limiter le mandat de cette nouvelle mission européenne au contrôle de l’embargo était l’une des exigences exprimées par l’Autriche [qui n’a pas de marine, ndlr]. En effet, pour le ministre autrichien des Affaires étrangères, Alexander Schallenberg, il était hors de question de lancer une opération « humanitaire » pouvait servir de « billet d’entrée en Europe pour des milliers de migrants clandestins. »

« Le consensus est pour une opération militaire, pas pour une mission humanitaire et les navires croiseront dans une autre zone que celle de Sophia », a affirmé M. Schallenberg. Et « si un effet d’appel d’air est constaté, si les passeurs de migrants l’utilisent, alors les navires seront retirés », a-t-il ajouté.

Pour autant, le droit de la mer devra quand même s’appliquer. « En cas de sauvetage en mer, les naufragés seront pris en charge par le pays du pavillon du navire ou sinon, il faudra utiliser la rotation des ports pour les débarquements », a indiqué M. di Maio.

Photo : Arraisonnement du cargo El Mukhtar par l’équipe de visite de l’aviso « Commandant Blaison », en juin 2017 (c) Marine nationale

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]