Libye : Le Conseil de sécurité réclame un cessez-le-feu et le retrait des « mercenaires »

À l’issue de la conférence de Berlin, le 19 janvier dernier, les pays impliqués de près ou de loin dans le conflit libyen ont appelé « toutes les parties concernées à redoubler d’efforts pour une suspension durable des hostilités, la désescalade et un cessez-le-feu permanent », tout en prenant l’engagement de « refréner toute activité exacerbant le conflit, y compris le financement de capacités armées et le recrutement de mercenaires. »

Seulement, l’encre de la déclaration finale n’était pas encore sèche que, malgré ses engagements, la Turquie envoyait des mercenaires syriens à Tripoli pour soutenir le Gouvernement d’union nationale [GNA] contre l’Armée nationale libyenne du maréchal Khalifa Haftar, laquelle relève du gouvernement rival de Tobrouk. Et la Mission des Nations unies en Libye [MANUL] dénonçait dans le même temps des « violations flagrantes et persistantes de l’embargo sur les armes malgré les engagements des pays concernés » au bénéfice des deux camps.

Cependant, s’agissant de l’instauration d’un cessez-le-feu, des représentants du GNA et du maréchal Haftar ont entamé des discussions à Genève en vue d’en déterminer les conditions et les modalités.

Mais le Conseil de sécurité des Nations s’est également saisi de la question, avec l’objectif de confirmer les engagements pris lors de la conférence de Berlin, notamment au sujet du cessez-le-feu, du respect de l’embargo sur les armes et des ingérences étrangères. Pendant près d’un mois, un projet de résolution, préparé par le Royaume-Uni, a ainsi fait l’objet d’âpres débats.

Ainsi, accusée d’avoir envoyer des employés de la société militaire privée Wagner, proche du Kremlin, aux côtés de l’ANL, la Russie ne voulait pas que le texte fît référence aux « mercenaires » engagés dans le conflit libyen, préférant le terme de « combattants terroristes étrangers ». En sa qualité de membre permanent du Conseil de sécurité, elle pouvait dès lors mettre son veto à tout projet de résolution n’entrant pas dans ses vue.

Finalement, quand la résolution 2510 sur la Libye a été mise aux voix, le 12 février, la Russie a préféré s’abstenir. Le texte, qui approuve les conclusions de la conférence de Berlin et réclame la mise en place d’un « cessez-le-feu durable sous la surveillance de l’ONU » ainsi que la « fin des interventions étrangères dans le conflit. » Et le terme « mercenaires » y figure.

En effet, le paragraphe n°10 de cette résolution « rappelle les engagements pris à Berlin en faveur du respect de l’embargo sur les armes et exige de tous les États Membres notamment qu’ils se conforment pleinement à l’embargo sur les armes […] et en particulier de cesser d’apporter toute forme d’appui aux mercenaires armés et d’opérer leur retrait total. » Enfin, il exige également « de tous les États Membres qu’ils s’abstiennent d’intervenir dans le conflit ou de prendre des mesures de nature à l’exacerber. »

Ayant d’abord tenu à rappeler que la Russie avait appelé, avec la Turquie, à la mise en place d’un cessez-le-feu en Libye avant la conférence de Berlin, le représentant russe auprès des Nations unies, Vassili Nebenzia, a expliqué son vote en affirmant que cette résolution, adoptée de « manière précipitée » ne pouvait pas « prescrire quelque chose [le cessez-le-feu] qui n’existe pas ». Et d’ajouter que le Conseil de sécurité « aurait dû attendre » que les discussions entre les parties libyennes « produisent des résultats », soulignant que « elles-seules peuvent décider de leur propre avenir. »

La représentante britannique auprès de l’ONU, Karen Pierce, n’a pas manqué de répondre à son homologue russe, contestant toute précipitation pour faire adopter la résolution 2510. Le texte « exprime les accords conclus à Berlin, y compris par le président de la Fédération de Russie, afin que les Nations Unies puissent prendre des mesures pour maintenir l’embargo sur les armes, aider les parties et surveiller le cessez-le-feu », a-t-elle fait valoir.

Par ailleurs, le Conseil de sécurité a demandé au secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, de lui « soumettre un rapport intérimaire sur les conditions nécessaires ainsi que des propositions de surveillance effective du cessez-le-feu sous les auspices de l’ONU ».

Et de préciser que les propositions qu’il fera devront « comprendre des mécanismes de rapport et de règlement des différends en vue » deui lui faire des » recommandations détaillées » dès que possible, c’est à dire quand un cessez-le-feu sera convenu par les parties libyennes.

Cela étant, la résolution n’évoque que d’éventuelles sanctions en cas de manquement aux mesures prises à l’égard de la Libye. En effet, le Conseil de sécurité y souligne l’importance de veiller à l’application des « mesures existantes » et à signaler toute violation au Comité des sanctions de l’ONU, avant de rappeler que, « à ces égard, les personnes et entités se livrant ou prêtant leur concours à des actes qui menacent la paix, la stabilité ou la sécurité en Libye peuvent faire l’objet de sanctions ciblées. »

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