La Pologne va prendre la tête de la force de réaction très rapide de l’Otan

Le 1er septembre 1939, en prenant le prétexte [faux] de l’attaque d’un poste de radio à Gleiwitz par l’armée polonaise, l’Allemagne nazie envahissait la Pologne. Puis, deux semaines plus tard, l’Union soviétique [URSS] passa à l’offensive sans faire de déclaration de guerre à Varsovie.

Les combats cessèrent le 6 octobre, avec l’annexion et la partition du territoire polonais par l’Allemagne et l’URSS, conformément au pacte germano-soviétique signé en août 1939 par les ministres des Affaires étrangères allemand, Joachim von Ribbentrop, et soviétique, Viatcheslav Molotov.

Jusqu’au 22 juin 1941, 440.000 Polonais [intellectuels, commerçants, prêtres, etc…], résidant dans la partie occupée par l’Armée Rouge, furent déportés essentiellement vers le Kazakhstan en tant que « laquais du capitalisme ». Ou massacrés, comme ce fut le cas des officiers polonais dans la forêt de Katyń. Puis, le pacte Ribbentrop/Molotov vola en éclats avec le début de l’opération Barbarossa, c’est à dire l’invasion de l’URSS par l’Allemagne.

Pour autant, le 24 décembre, le président russe, Vladimir Poutine, a accusé la Pologne d’avoir été responsable de ce qu’elle avait subi durant le Seconde Guerre Mondiale. « Ils [les Polonais] ont pratiquement conclu une entente avec Hitler. C’est clair dans les documents d’archives », a-t-il en effet lancé devant un parterre d’officiers russes, avant de faire part de son dégoût suscité par des propos antisémites qu’aurait tenu l’ambassadeur polonais en Allemagne en 1938.

En réaction, le 27 décembre, le ministère polonais des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur de Russie pour lui exprimer « sa ferme objection aux insinuations historiques faites par les plus hautes autorités russes ces derniers jours. » Puis il a souligné que la Pologne « avait été le premier pays […] à s’engager dans la résistance armée en septembre 1939 contre l’armée allemande qui était appuyée par l’Union soviétique. »

La Russie « cherche à minimiser la coresponsabilité de l’Union soviétique dans la destruction de la paix en Europe. L’URSS a été dans les années 1939-1941 une alliée de l’Allemagne d’Adolf Hitler », a encore fait valoir la diplomatie polonaise.

C’est donc dans ce contexte marqué par cette polémique [ainsi que la publication d’un rapport polonais décrivant un renforcement militaire russe dans l’ouest de la Russie] que la Pologne va prendre, à compter du 1er janvier 2020, la relève de l’Allemagne pour diriger la « Force opérationnelle interarmées à très haut niveau de préparation » [Very High Readiness Joint Task Force, VJTF] de l’Otan, dont le principe a été décidé en 2014, après l’annexion de la Crimée par la Russie.

Pour rappel, la VJTF fait partie de la Force de réaction de l’Otan [NRF]. Mobilisant une brigade terrestre multinationale, des forces spéciales ainsi que des moyens aériens et navals, son rôle est d’intervenir à très court préavis [2 à 3 jours] en cas de besoin afin de préparer le déploiement d’un groupe initial de forces de deuxième échelon [IFFG], composé de deux brigades multinationales.

La 21e Brigade d’Infanterie polonaise consistuera le noyau dur de cette VJTF en 2020. « Elle bénéficiera de l’appui de diverses unités polonaises, issues de la 12e division mécanisée, de la 3e escadre d’aviation de transport et de la police militaire, ainsi que d’experts logistiques et de spécialistes de la lutte contre les armes chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires [CBRN] », précise l’Otan, via un communiqué.

La Bulgarie, la République tchèque, la Hongrie, l’Italie, la Lituanie, la Lettonie, le Portugal, la Roumanie, l’Espagne, la Slovaquie, la Turquie et le Royaume-Uni participeront également à à la VJTF en 2020. De même que les États-Unis, qui, selon l’Otan, se tiennent prêts à la soutenur « par leur puissance aérienne et par d’autres moyens d’appui tactique. » À noter que, l’an prochain, les forces américaines conduiront l’exercice Defender Europe, qui impliquera jusqu’à 40.000 militaires originaires de 18 pays [dont la France].

« Je remercie la Pologne d’assumer la direction des forces à haut niveau de préparation de l’OTAN cette année », acommenté Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan. « La force opérationnelle interarmées à très haut niveau de préparation, notre force ‘fer de lance’, apporte une contribution importante à notre défense collective et démontre résolument les capacités de la Pologne. Cette force est en mesure de se déplacer immédiatement pour défendre chacun des Alliés contre toute menace. À une époque marquée par des défis de sécurité sans précédent, elle est plus importante que jamais », a-t-il ajouté.

En 2021, la succession à la tête de la VJTF risque d’être compliquée… étant donné que la Turquie est appelée à en fournir le gros des troupes. Or, les relations entre Ankara et l’Otan sont loin d’être au beau fixe, l’exécutif turc étant décidé à bloquer les plans défensifs concernant le flanc oriental de l’Alliance, tant que les Alliés ne reconnaîtront pas les milices kurdes syriennes [YPG] comme terroristes. Il vient s’ajouter à à cela le rapprochement avec la Russie, qui s’est traduit par l’achat de système russe de défense aérienne S-400 et les tensions en Méditerranée orientale, causées par la découverte d’importantes réserves de gaz naturel.

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