La marine turque a chassé un navire océanographique israélien des eaux chypriotes

Depuis qu’ils ont signé un accord sur leur frontière maritime, en décembre 2010, Israël et la République de Chypre ont renforcé leurs relations bilatérales afin d’exploiter au mieux les gisements de gaz naturel découverts dans leurs zones économiques exclusives [ZEE] respectives.

L’an passé, ces deux pays, rejoints par la Grèce et l’Italie, ont trouvé une entente sur le projet EastMed, qui vise à construire un gazoduc de 2.200 kilomètres qui passera par la Crète pour arriver en Italie.

Seulement, et alors que les blocs d’exploitation et de prospection chypriotes sont tous situés au sud de la République de Chypre, la Turquie revendique sa part du gâteau, au nom de la République Turque de Chypre Nord [RTCN]. Ce qui donne régulièrement lieu à des tensions.

Tensions qui sont montées encore de plusieurs crans avec la signature, par Ankara et le gouvernement d’union nationale libyen [GNA], d’un protocole d’accord sur la frontière maritime entre la Turquie et la Libye, en novembre dernier. Et cela, sans se préoccuper de la Grèce, de la République de Chypre et de l’Égypte.

« Avec cet accord, nous avons poussé au maximum le territoire sur lequel nous avons autorité. Nous pourrons ainsi mener des activités d’exploration conjointes », a fait valoir Recep Tayyip Erdogan, le président turc.

Cependant, auparavant, la Turquie avait déjà entrepris des opérations de prospection et de forage dans les eaux chypriotes, malgré les mises en garde [et les protestations] de l’Union européenne [dont la République de Chypre et la Grèce sont membres] et des États-Unis.

« Nous avons décidé de mettre en place un régime-cadre de sanctions si, d’aventure, la Turquie poursuivait ces opérations. Nous allons prévoir une présence militaire dans cette zone », avait d’ailleurs affirmé Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, lors d’une audition au Sénat, en octobre dernier.

Quoi qu’il en soit, et alors qu’Ankara venait de signer l’accord sur les frontières maritimes avec Tripoli, la marine turque a intercepté le navire océanographique israélien Bat Galim, alors qu’il menait une campagne de recherche dans les eaux territoriales chypriotes, en coordination avec Nicosie.

Ainsi, selon la chaîne de télévision Channel 13, qui s’est appuyée sur des confidences de responsables israéliens, le Bat Galim a d’abord été contacté par radio par la marine turque, qui lui ensuite intimer l’ordre de partir. Le navire n’a eu que le choix d’obtempérer.

Toujours d’après la même source, un responsable de l’ambassade d’Israël à Ankara aurait été convoqué, il y a quelques jours, pour se faire dire que le projet de gazoduc EastMed devait obtenir l’approbation de la Turquie pour se concrétiser.

Par ailleurs, le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu, avait déjà prévenu. « Personne ne peut mener ce genre d’activités [d’exploitauon du gaz naturel, ndlr] dans la zone de notre plateau continental sans notre autorisation. [Si c’est le cas], nous les en empêcherons, bien entendu », a-t-il dit, la semaine passée.

« Les Turcs essaient de se positionner comme ceux qui tirent les ficelles [dans la région], et c’est quelque chose de très inquiétant », a commenté un officiel auprès de Channel 13.

Ce n’est pas la première fois qu’un navire de recherche est chassé des eaux chypriotes par la marine turque : cela en effet le cas, ces dernières années, de plusieurs bâtiments de prospection, affrétés par ENI et Total.

Quoi qu’il en soit, hasard du calendrier, la France, l’Italie et la République de Chypre ont organisé l’exercice naval conjoint CYP / FRA / IT 2019, de type « PASSEX », dans les eaux chypriotes, le 12 décembre. La frégate légère furtive Surcouf a ainsi rejoint la frétage italienne Martinengo [dotée d’un hélicoptère NH-90] ainsi que le patrouilleur « Commodore Andreas Ionnades » et des commandos marine chypriotes.

« L’exercice envoie aussi un message de synergie, de détermination et de solidarité avec l’objectif de librement exercer les droits souverains de chaque pays et de maintenir un climat de stabilité et de sécurité dans la région de Méditérannée orientale », a fait valoir le ministère chypriote de la Défense.

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