La Russie a restitué à l’Ukraine les trois navires arraisonnés par sa garde-côtière en novembre 2018

Contrôlant les deux rives du détroit de Kertch, et donc l’accès à la mer d’Azov, Moscou était soupçonnée par Kiev de vouloir étrangler son économie en limitant drastiquement le trafic maritime vers le port de Marioupol, voire de lancer une offensive sur ce bout de littoral ukrainien afin d’assurer une continuité territoriale entre la Crimée et le Donbass, région du sud-est de l’Ukraine tombée en partie aux mains de séparatistes pro-russes.

Dans ce contexte, et alors que le président Petro Porochenko s’apprêtait à remettre son mandat en jeu, trois navires de la marine ukrainienne furent arraisonnés par la garde-côtière russe [qui relève du FSB, le renseignement intérieur russe, ndlr] aux abords du pont de Kertch, construit à cheval sur le détroit du même nom, au motif qu’ils n’auraient pas respecté les procédures mises en place par la Russie. Ce qui donna lieu à de nouvelles tensions entre les deux pays.

Ainsi, l’Ukraine exigea la libération de ses 24 marins et la restitution de ses trois navires saisis par les gardes-côtes russes. Et elle saisit à cette fin, le Tribunal maritime international qui, veillant à l’application de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982, lui donna raison.

« La Fédération de Russie doit procéder immédiatement à la libération des 24 militaires ukrainiens détenus et les autoriser à rentrer en Ukraine », avait en effet jugé Jin-Hyun Paik, le président sud-coréen de ce tribunal, en mai dernier.

Ce jugement intervint alors que l’Ukraine avait changé de président, Petro Porocheko ayant été battu, lors de l’élection d’avril 2019, par Volodymyr Zelensky. Par rapport à son prédécesseur, ce dernier adopta une attitude plus conciliante à l’égard de Moscou. Au point d’arriver à un accord portant sur un échange de prisonniers, en septembre.

Ainsi, des combattants pro-russes du Donbass, dont Volodymyr Tsemakh, un témoin clé de l’affaire du vol MH-17, furent échangés contre les 24 marins ukrainiens et le cinéaste Oleg Sensov. Peu avant, le président russe, Vladimir Poutine avait estimé qu’un tel échange serait « un grand pas vers la normalisation des relations avec Kiev ».

Cela étant, Moscou avait encore à restituer les trois navires militaires ukrainiens [à savoir les Berdyansk, Yani Kapu et Nikopol] saisis en novembre 2018, alors qu’il était question de réunir un sommet au format « Normandie » [impliquant la France, l’Allemagne, la Russie et l’Ukraine] pour tenter de trouver une issue au conflit du Donbass. Ce qui vient d’être fait.

En effet, le ministère russe des Affaires étrangères a annoncé, ce 18 novembre, avoir remis les trois navires en questions aux autorités urkrainiennes, tout en assurant que la Russie continuerait « à réprimer fermement toute provocation à ses frontières. » Cette annonce n’a suscité aucun commentaire de la part de la marine ukrainienne.

À noter que cette restitution a été faite après le retrait des forces ukrainiennes et des combattants séparatistes pro-russes de trois secteurs de la ligne de front traversant le Donbass… Et qu’elle intervient alors que le président Poutine a confirmé, ce jour, sa participation au sommet au format « Normandie » qui sera organisé à Paris, le 9 décembre prochain.

Ce sommet se « se tiendra alors que des avancées majeures sont intervenues depuis l’été dans les négociations, qui ont notamment permis le désengagement des troupes dans plusieurs zones de tension, et permettra d’ouvrir une nouvelle séquence de mise en oeuvre des accords de Minsk », a indiqué l’Élysée, le 15 novembre.

Justement, ces mêmes accords de Minsk, censés établir un cessez-le-feu entre les deux camps, n’ont jamais été respectés.

« L’Otan dit très clairement que la Russie a une responsabilité particulière dans la mise en oeuvre des accords [de paix] de Minsk et qu’elle doit retirer toutes ses troupes, tous ses officiers de l’est de l’Ukraine et arrêter de déstabiliser » ce territoire, avait encore affirmé Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Alliance atlantique, lors d’une visite à Kiev, le 30 octobre dernier. « Nous saluons tous les efforts visant à réduire les tensions, à retirer les troupes et à assurer une solution pacifique au conflit dans l’est de l’Ukraine », avait-il ajouté.

Reste que la perspective de voir l’Ukraine rejoindre l’Otan [le président Zelensky a dit être prêt à accélérer les préparatifs à cette fin, ndlr] ne facilitera pas les discussions avec Moscou. « Parfois, on a l’impression que c’est à la Russie de décider si l’Ukraine doit ou non être membre de l’Otan », mais « la Russie n’a pas un mot à dire! Ils n’ont aucune base légale ou réelle pour influencer une telle décision », fit valoir M. Stoltenberg, lors de sa visite à Kiev.

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