Au Sahel, l’exploitation de l’or est un nouvel enjeu pour les groupes jihadistes
En 2010, les adeptes de la prospection de loisir eurent la mauvaise surprise de constater une rupture de stock mondiale de détecteurs de métaux commercialisés par plusieurs marques, en particulier ceux à induction pulsée, généralement utilisés pour chercher de l’or.
La raison de cet engouement pour de tels matériels était à chercher au Soudan, où des veines de quartz aurifères venaient d’être découvertes, attirant ainsi des milliers d’orpailleurs « artisanaux ».
« Alors qu’en 2009, l’or contribuait à 1% des exportations du pays [le Soudan, ndlr], il en fournit plus de la moitié aujoud’hui, dépassant en valeur la contribution du pétrole dont les gisements sont massivement situés dans le sud du pays qui a fait sécession et dont les cours se sont contractés en 2008-2009 puis entre 2014 et 2016. Doublant le Mali, le Soudain serait devenu en 2014 le troisième exportateur d’Afrique et peut-être le deuxième aujourd’hui devant le Ghana », lit-on dans le numéro 22 de la revue Hérodote, dédié à la géopolitique du Sahel.
Or, il s’avère que le filon découvert au Soudan traverse le Sahara. Ainsi, des gisements ont été trouvés au Tchad [dans le Tibesti et la région de Batha], au Niger [Djado, Tchibarakaten], au Mali [région de Kidal, qui échappe en partie à Bamako] et en Mauritanie [Tasiast].
Et cela explique en grande partie l’intervention de l’armée tchadienne dans les environs de la localité de de Kouri Bougri [extrême-nord du pays]. À l’époque, il s’agissait de contrer le rebelles du Conseil de commandement militaire pour le salut de la République [CCMSR] et de mettre au pas les « milliers d’orpailleurs » illégaux présents dans la région. Ce qui valut au président tchadien, Idriss Deby Itno, d’être accusé de vouloir faire main basse sur la production aurifère.
Par ailleurs, ces découvertes sont venues s’ajouter aux sites aurifères déjà exploités à Tillabéri [Niger], dans le sud du Mali [Koulikoro, Sikasso et Kayers] et au Burkina Faso, où des employés d’une société minière canadienne [la SEMAFO] ont été attaqués alors qu’ils se allaient vers la mine de Boungou.
Quoi qu’il en soit, avance une étude que vient de publier l’International Crisis Group [ICG], « la production artisanale [d’or] représenterait désormais près de 50% des volumes produits industriellement. Elle atteindrait chaque année 20 à 50 tonnes au Mali, 10 à 30 tonnes au Burkina Faso et 10 à 15 tonnes au Niger, soit une valeur monétaire globale située entre 1,9 et 4,5 milliards de dollars par an. » En outre, y lit-on « plus de deux millions d’acteurs seraient directement impliqués dans l’orpaillage artisanal : un million au Burkina Faso, 700.000 au Mali, et 300.000 au Niger. »
Évidemment, une telle manne ne peut que suscités de nouveaux enjeux sécuritaires. « Les plus récentes découvertes aurifères au Sahel [comme à Kidal] couplées à l’implantation nouvelle de groupes armés dans des zones où l’or était déjà exploité [nord du Burkina Faso, zone de Torodi au Niger] expose plus que jamais ces ressources à la prédation de groupes armés rebelles et jihadistes », souligne l’ICG.
Pour les groupes jihadistes, ces sites miniers exploités artisanalement constituent une source de financement et une opportunité pour recruter. En outre, certains grands orpailleurs sont aussi des acteurs majeur du narco-trafic. Et l’exploitation de l’or leur permet aisément de « blanchir » leur argent sale.
Enfin, dans la région de Kidal, les sites d’orpaillage sont contrôlés par les rebelles touareg de la CMA [Coordination des mouvements de l’Azawad], dont certains sont à la fois liés aux jihadistes et aux trafiquants [en effet, le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad est constitué de Touaregs de la tribu des Ifoghas et de transfuges du groupe jihadiste Ansar Dine, ndlr].
S’agissant plus particulièrement de la mouvance jihadiste, l’ICG souligne que « l’or peut constituer pour eux un nouvel atout, à des fins de financement mais également de recrutement » dans la mesure où les « rançons des prises d’otage », qui était jusqu’alors une source importante de revenus, « se raréfient. » Et, prévient-il, ce « risque est d’autant plus élevé que les orpailleurs considèrent parfois la présence des jihadistes comme une aubaine, et non comme une menace. »
« Dans le Soum burkinabè, des unités jihadistes sont rémunérées par les orpailleurs pour effectuer des missions de sécurité sur les sites. Dans les zones de Tinzawaten, Intabzaz ou Talahandak, au nord de la région de Kidal au Mali, le groupe jihadiste Ansar Dine [du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans – GSIM] n’exerce pas une présence armée destinée à la sécurisation du site, mais prélève la zakat [impôt religieux] auprès des orpailleurs et du reste de la population », avance l’étude de l’ICG.
Ces orpailleurs « artisanaux » peuvent même s’allier aux jihadistes par « pragmatisme », comme par exemple pour prendre le contrôle de sites de production, à l’image de ce qui s’est vu dans la province du Soum, où les groupes d’autodéfense « Koglweogo » ont été chassés des mines qu’ils exploitaient à Kereboulé, voire pour contester des décisions gouvernementales [des mines fermées ayant ainsi été rouvertes].
Outre le financement et le recrutement, les mines d’or sahélienne sont aussi susceptibles d’être des lieux d’entraînement et de formation pour les jihadistes ainsi qu’une filière pour se procurer le matériel nécessaire à la fabrication d’engins explosifs improvisés.
« Plusieurs membres de la katiba Khalid Ben Walid, branche sud d’Ansar Dine, auraient reconnu avoir reçu une formation aux explosifs sur une des nombreuses mines d’or artisanales du nord de la Côte d’Ivoire, près de la frontière malienne », avance l’étude.
Une fois ce constat établi, que faire? Pour l’ICG, il faudrait que les États concernés « réinvestissent » les zones aurifères, soit directement [comme le Tchad, qui vient d’ailleurs de signer un accord de paix avec le Comité d’autodéfense de Miski, au Tibesti], soit via des intervenants privés, ce qui n’est pas forcément simple, comme l’a illustré l’attaque de Boungou.
« Avant de redéployer les services publics dans les zones aurifères, les Etats sahéliens doivent sécuriser les mines d’or artisanales. Ceci est difficilement envisageable, à court terme du moins, dans les zones sous contrôle des groupes armés rebelles et/ou jihadistes, comme Kidal ou le Soum. Ailleurs, l’Etat est encore en mesure de sécuriser les mines soit en y dépêchant ses propres forces, soit en privilégiant une coopération sécuritaire avec des acteurs privés locaux, qui sont déjà présents mais devraient être mieux encadrés », avance l’ICG.
Mais les États sahéliens devraient également être aidés par les pays importateurs d’or en provenance d’Afrique, comme les Émirats arabes unis, la Chine et la Suisse. L’ICG appelle en effet ces derniers à « renforcer le cadre légal de leurs importations d’or » afin de réduire les risques de blanchiment d’argent et de financement des groupes armés.
Et l’homme le plus riche de l’Histoire est …. Mansa Moussa, roi de l’empire du Mali, au 12ème siècle
Sa fortune cumulée en tonnage d’or dépasserait aujourd’hui la valeur de 500 milliards €, ce qui le place au 1er rang mondial devant la famille Rothschild.
cf https://www.historia.fr/les-dix-personnages-les-plus-riches-de-lhistoire
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et le plus grand responsable de ce merdier de l’or malien détourné par les djihadistes et trafiquants est … la Banque Mondiale, qui avec son PAS (Programme d’Ajustement Structurel) a imposé depuis une décennie une législation minière favorable aux investisseurs privés au Mali, au détriment de l’état malien en échange de l’effacement de la dette structurelle de l’état malien. Aujourd’hui la vente d’or au Mali c’est 75% des revenus de son commerce extérieur, mais seulement 8% du PNB réinjecté dans l’économie malienne.
La conséquence a été le développement de l’orpaillage artisanal hors contrôle, les villages maliens ne voyant aucun retour de cette manne. Cela leur permet d’acheter eux-mêmes leur développement : pompe de puits à eau, tronçons de route bitumée, tracteurs agricoles, équipements divers…et aussi ‘protection armée’ payée en or fin.
Les djihadistes se sont engouffrés dans cet orpaillage artisanal malien, comme ils se sont engouffrés dans le raffinage artisanal du pétrole en Irak après le deal ‘pétrole contre nourriture’ imposé par l’ONU à l’état irakien.
@vrai-chasseur
irak : c’est surtout le régime (armée, baath…)qui a mis en place les réseaux // en utilisant pour « l’exportation » des filières de contrebande et trafics « ancestraux ». A cette époque, on ne parle pas encore de djihadites irakiens.
Même constat de la part de la FIDH.
https://www.fidh.org/IMG/pdf/Ml477f.pdf
Lire à partir de la page 30.
C’est curieux ! Déjà le capitaine DANRIT faisait de l’exploitation de l’or la principale source de revenu des Djihadistes .
En complément à mon premier envoi : Le revenu des Djihadistes dans  » L’Invasion Noire  » provient des  » mines d’or d’Athouga  » C’est le deuxième chapitre alors que le premier relate le massacre d’une colonne Italienne elle aussi à la recherche de mines d’or .
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k106260h/f30.image
Ceci écrit on pourrait y envoyer des légionnaires en poste en Guyane …
Il existe un état digne de ce nom en afrique qui ne soit pas obligé de livrer des portions cruciales de son territoire au premier péquin armé qui débarque ?
@ Le Breton
Non, il y a du bordel partout.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/11/13/dans-le-nord-du-cameroun-les-attaques-quasi-quotidiennes-de-boko-haram_6019039_3212.html
Mais pas besoin d’aller en Afrique :
https://mobile.agoravox.fr/actualites/societe/article/quand-va-t-on-se-decider-enfin-a-217975
On le voit avec le niveau des pertes et des blessés pour les policiers et les gendarmes:
http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2019/11/07/25-policiers-et-gendarmes-sont-decedes-dans-l-exercice-de-le-20622.html
En 1984 la région d’IRRIBA au Tchad était déjà connue pour ses filons aurifères …
@ Manta
Il y a toujours de l’or.
Mais question partage, les appétits se sont aiguisés :
https://orientxxi.info/magazine/libye-tchad-la-france-lache-les-toubous-et-etend-la-guerre,2941
https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/tchad/tchad-des-violences-communautaires-inquietantes-dans-la-province-du-ouaddai_3266999.html
http://www.makaila.fr/article-tchad-vers-une-epuration-ethnique-dans-le-dar-tama-37742503.html
D’ailleurs au Darfour voisin, il y a aussi des richesses :
https://youtu.be/lCheb1bk6tE
https://youtu.be/GB9A55hNtl4
Mais on peut pas ne pas caresser le Tchad autrement que dans le sens du poil, encore plus en ce moment :
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/11/13/le-tchad-appele-a-la-rescousse-de-l-armee-francaise-au-sahel_6019031_3212.html
Toutes ces belles ressources qui s’envolent au nez et à la barbe des états sahéliens pauvres qui peinent chroniquement à joindre les deux bouts… c’est bien connu que les pilleurs ne sont pas les payeurs.
Alors qui pille l’or du Mali finalement ? CQFD les narco-djihadistes et leurs sympathisants évidemment.
Le cours de l’or est à la hausse en plus ces temps ci (crainte d’une nouvelle crise mondiale ? D’une implosion de la deutschbank ? D’un défaut de l’Italie ? Mystère !). Le kilos est présentement à 43 200 €; ça nous met les 30 tonnes à 1,3 milliards d’euros et 1,4 milliards de dollars au cours actuel; ça signifie que le pillage potentiel de ces 30 tonnes de marchandise annuelle au Burkina équivaut à un pillage de plus de 10% du PIB du pays. On pourrait en faire des choses pour les populations locales avec ce gros tas de pognon !
Malheureusement les états africains n’arriveront jamais à sortir de la tête de l’eau si ils continuent à se révéler incapable de prélever des impôts d’une façon fonctionnelle, c’est ça la seule vraie différence entre un état riche et un état pauvre. Dans les cas les plus emblématiques observés en Afrique, on peut même trouver des états très pauvres dans des pays très riches. Et bien ma bonne dame, mais aussi si vous êtes pas capable de collecter correctement la TVA, c’est normal que vous viviez dans un état clodo derrière tout ça. Vous savez ma bonne dame qu’en France la TVA c’est 66% du budget de l’état et que notre état il est riche parce qu’il sait très bien prélever la TVA bien avant d’aller faire du pillage en Afrique ?
Comme quoi les pilleurs ne sont pas forcément ceux qu’on croit !
@Desty,
TVA = 45% des recettes fiscales, pas 66% (estimé en janvier 2019).
Source:https://www.vie-publique.fr/fiches/21883-quels-sont-les-differents-impots-percus-par-letat
Vous surévaluez de 20 points. C’est beaucoup.
je suppose que cette très nette surévaluation est nécessaire à votre démonstration.
Pour ma part, je ne pense pas qu’il soit indispensable de surévaluer de 20 points la part des recettes fiscales provenant de la TVA dans le seul but de démontrer que les Africains sont responsable de leur pauvreté.
Je pense que vous pouvez tout simplement prétendre que les Africains sont responsables de leur pauvreté, tout en précisant que la TVA, c’est 45% du budget de l’Etat en France, et pas 66%.
Mais vous auriez tout aussi bien pu dire que les Africains sont responsable de leur pauvreté, tout en précisant que Madeleine aime se faire jouir avec les poireaux frais qu’elle se fout dans la chatte.
Ou n’importe quoi d’autre, en définitive. Par exemple: Rémi aime bien jouer avec son train électrique.
Ou encore: après le goûter, Josiane et Louisette ont monté la bibliothèque Ikea qu’elle ont achetée hier.
Nan parce que quand on commet une erreur de 20 points équivalente au tiers de ce dont on parle, la précision du chiffre n’a plus aucune importance dans la démonstration. On n’est plus à ça près. Donc, on peut déconner.
Surtout pour dire à la fin que les pilleurs ne sont pas ceux qu’on croit, ce qui est un peu mystérieux: ceux qu’on croit, qui sont-ils? Et ceux qu’on croit pas, c’est qui d’autre? Vous pourriez pas nous faire deux listes avec une colonne A et B.
Dans la A vous mettez les pilleurs qu’on croit qu’ils pillent l’Afrique. Et dans la B, ceux qu’on croit pas qu’ils pillent l’Afrique. Comme ça on comprend.
Au fait, question con comme ça: si la TVA c’est seulement 45% des recettes de l’Etat et pas 66% comme vous pensiez, est-ce que, par hasard, on vivrait pas dans un Etat clodo nous aussi? Nan parce que 20 points de delta, c’est beaucoup quand même. C’est un tiers des recettes en moins par rapport à ce que vous imaginiez
On va se mettre en situation: vous pensez avoir 100 euros en poche, mais en fait non, vous n’en avez que 70. On se paye pas tout à fait la même chose avec 100 euros et 70, non?
Puisque vous êtes en train d’expliquer à la « bonne dame » que les Africains sont des clodos faudrait peut être intégrer dans votre calcul que vous n’avez pas 100 euros en poche comme vous le pensez, mais seulement 70. Sinon, la « bonne dame » elle risque de vous répondre « mais didon tu te vantes, là . T’es pas aussi riche que tu le dis, milord ».
C’est pour ça qu’il faut être précis: quand on dit que les autres sont des clodos, faut bien compter l’argent qu’on a soi-même en poche.
L’erreur de diagnostique est affligeante.
Autant on est incapable de mettre le mot islam sur les vrais maux de la société française, autant on parle d’islam et de djihadisme pour le bourbier sahélien alors que ce n’est qu’une fragile étiquette.
De tous temps le Sahel a été une ligne de friction entre différentes ethnies en lutte pour la survie dans un environnement hostile. Cette lutte s’est intensifiée et a changé de forme avec la fin de l’ère coloniale et le parcage dans les mêmes frontières de peuples rivaux à la démographie galopante.
Là dessus le djihadisme n’est qu’un voile pudique mis sur les trafics et l’auto défense des peuls et touaregs au send large. Le fond de l’affaire dans ces gisements d’or, c’est pas le djihadisme, mais simplement la capacité des états à s’imposer dans leurs frontières.
L’avantage des sites d’orpaillages c’est qu’ils sont fixes. Donc les controler exige de rester sur zone.
les djihadistes vont acheter des rafales.
Lien du Canada :
https://youtu.be/PAjxyKUsYxs
Et celui du journal « le monde » :
https://youtu.be/A-goXNm0ZSU