Lockheed-Martin écrase ses prix pour damer le pion au français Naval Group en Grèce

En décembre 2018, le magazine spécialisé grec « Ptisi & Diastima » avait indiqué que Lockheed-Martin venait de proposer de vendre à Athènes quatre frégates de type MMSC [multi-mission surface combatants], c’est à dire un navire dérivé de la classe Freedom développée dans le cadre du programme « Littoral Combat Ship » [LCS] de l’US Navy. Et de préciser, cerise sur le gâteau, que le groupe américain était prêt à accepter que ces bâtiments fussent construits en Grèce. Et une demande d’informations fut adressée au groupe américain.

Dans le même temps, Athènes ne cacha pas son intérêt pour l’achat éventuel de navires auprès de la France. En 2008, il était question d’une vente de frégates multimissions [FREMM]… Puis ce projet fut emporté par la crise qui secoua l’économie grecque. Dix ans plus tard, cette piste fut relancée à l’occasion d’un quiproquo, Fotis Kouvelis, alors ministre-adjoint grec de la Défense, ayant affirmé que la France avait donné son accord pour l’acquisition, en leasing, de deux FREMM. Ce qui n’était pas le cas.

En revanche, Paris proposa de vendre à la marine grecque deux Frégates de défense et d’intervention [FDI]. Moins imposants que les FREMM avec leurs 4.000 tonnes en déplacement, ces navires n’en seraient pas moins très efficaces, à en juger par les capacités promises par Naval Group.

Les discussions sur un éventuel achat de FDI furent alors engagées. Et le changement de gouvernement en Grèce, à la faveur des élections législatives de juillet dernier, ne les remit nullement en cause. Bien au contraire puisque, le 10 octobre, à l’occasion d’une visite à Paris, le ministre grec de la Défense, Nikos Panagiotopoulos, signé une lettre d’intention portant sur l’acquisition de deux frégates dans le cadre d’une « contrat de partenariat gouvernemental ».

« Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour que les deux parties s’accordent sur les caractéristiques techniques du navire, conformément aux exigences de notre marine », avait cependant déclaré le ministre grec.

Pour autant, Lockheed-Martin, qui a engrangé les contrats en Grèce au cours de ces derniers mois [modernisation des F-16, hélicoptères MH-60], n’a visiblement pas l’intention de laisser le champ libre à Naval Group en Grèce. Quitte à torpiller les projets de coopération navale entre Paris et Athènes.

Ainsi, avance le site Doureios Ippos [le cheval de Troie], le gouvernement grec a « reçu une réponse officielle à sa lettre de demande d’informations sur les prix et la disponibilité » des frégates MMSC de la part de Lockheed-Martin. Et ce dernier est prêt à faire de gros efforts.

En effet, le groupe américain proposerait de vendre quatre frégates MMSC à Athènes pour moins de 2 milliards d’euros, systèmes d’armes compris. Ces navires, comme indiqué auparavant, seraient construits en Grèce. Enfin, des facilités de paiement pourraient être accordées via le dispositif FMS [Foreign Military Sales].

Ces MMSC seraient assez semblables à ceux commandés par l’Arabie Saoudite en 2015. Or, selon l’avis remis à l’époque au Congrès par la Defense Security Cooperation Agency [DSCA], chargé des exportations d’armes américaines, il était question d’un contrat d’environ 11 milliards de dollars. Une somme comprenant la livraison de quatre navires, les systèmes d’armes, un soutien logistique et la formation des équipages saoudiens.

En outre, la première frégates MMSC serait livrée à la marine grecque deux ans avant la FDI française. Évidemment, pour Athènes, avoir quatre navires pour le prix de deux peut être tentant. Sauf que les navires proposés par Lockheed-Martin ne correpondent pas exactement aux besoins exprimés par Athènes. Ce qui entraînera inévitablement une hausse des coûts.

Pour rappel, une frégate de type MMSC affiche 3.600 tonnes de déplacement pour 118 mètres de long pour 17,5 mètres de large. Conçue pour assurer des missions allant de la défense aérienne à la guerre électronique en passant par la lutte anti-sous-marine et anti-surface, elle est notamment dotée de systèmes de lancement vertical Mk41, de missiles RIM-162 [Evolved Sea Sparrow Missiles, ESSM] et AGM-84 Harpoon ainsi que de tubes lance-torpilles.

Quoi qu’il en soit, conclut Doureios Ippos, il est « clair que la concurrence ainsi créée permet à la partie grecque de renforcer sa position dans les négociations. Et ce, malgré le fait qu’il n’y ait même pas eu de compétition internationale! ». Mais, au final, le choix que fera Athènes sera politique… sachant qua la France est exposée à hauteur de 40 à 50 milliards d’euros à la dette grecque.

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