L’Inde va déployer un avion de patrouille maritime à La Réunion pour des « missions de surveillance »

Dans le domaine maritime, la France et l’Inde entretiennent une relation privilégiée, qui passe par la tenue, régulière, de l’exercice aéronaval conjoint Varuna et la construction de sous-marins Scorpène pour les besoins de l’Indian Navy. Et il n’est pas impossible que le Rafale M soit choisi par New Delhi dans le cadre de son programme MRCBF [Multi Role Carrier Borne Fighters], lancé pour équiper son futur porte-avions en configuration CATOBAR [catapultes et brins d’arrêt, ndlr].

En outre, en 2018, les deux pays ont signé un accord de coopération logistique donnant un accès aux bases navales françaises de La Réunion, des Émirats arabes unis et de Djibouti aux forces navales indiennes.

Pour le gouvernement indien, un tel accord lui permet de répondre à la stratégie dite du « collier de perle » qui, mise en place par la Chine [par ailleurs proche alliée du Pakistan], vise à endiguer, voire en encercler, l’Inde. D’où, d’ailleurs, la volonté de New Delhi d’installer une base aux Seychelles.

En mars dernier, la coopération franco-indienne a franchi un nouveau cap avec la signature d’un nouvel accord visant cette fois à développer un système de surveillance maritime via l’imagerie spatiale avec l’Indian Space Research Organisation [ISRO].

Mais il est question d’aller encore plus loin. Lors de son récent déplacement à La Réunion, le président Macron a évoqué les enjeux concernant l’océan Indien, où la France est fortement présente.

« La région est l’épicentre du commerce maritime mondial et elle le sera de plus en plus. […] Elle est en train de devenir le carrefour de demain sur le plan des routes maritimes. Elle est d’ores et déjà devenue le carrefour sur le plan des câbles sous-marins et de la connectivité. Et elle le sera de plus en plus compte tenu des réserves énergétiques et halieutiques qui sont les siennes et du trésor de biodiversité qu’elle recèle », a d’abord constaté M. Macron

Aussi, a-t-il continué, « nous avons un agenda à bâtir dans cette région qui est absolument inédit et je crois qu’il faut le bâtir de manière collaborative, coopérative, dans une stratégie, si je puis dire, d’amitié, d’ouverture avec l’ensemble des pays de la région, de coopération véritable. »

Et parmi les pays avec lesquels Paris compte bâtir cet agenda, l’Inde figure au premier rang…

« Nous avons acté avec le Premier ministre [indien] Modi une vision océanique commune et renforcé notre coopération opérationnelle pour la sécurité et la stabilité dans la région », a indiqué le président Macron.

« Nous partageons ensemble l’analyse d’une sécurité maritime conjointe dans le sud de l’Océan Indien et nous travaillons à la mise en place de missions de surveillance commune », a poursuivi le président français. Et, a-t-il annoncé, « le déploiement d’un avion de patrouille maritime de l’Indian Navy » est « planifié à La Réunion » pour le premier semestre 2020. La durée de cette mission n’a pas été précisée.

Pour rappel, la marine indienne dispose d’avions de patrouille maritime P-8I Poseidon, lesquels ont remplacé les Tu-142M d’origine soviétique au cours de ces dernières années.

Conçu par Boeing à partir du B-737, le P-8 Poseidon affiche un rayon d’action de plus de 2.200 km. Il est notamment équipé d’un
radar multi-cibles de surface AN/APY-10 fourni par par Raytheon, d’un radar ouverture synthétique AN/APS-128 et d’un système de détection passif AN/ALR-73. Il peut emporter des torpilles Mk-50, des charges de profondeur Mk-57 et Mk-101, des mines Mk-55 et Mk-56 et des missiles AGM-84 Harpoon. Les appareils indiens sont dotés d’un radar Telephonics APS-143 OceanEye et d’un détecteur d’anomalie magnétique.

Quoi qu’il en soit, pour Emmanuel Macron, ce déploiement d’un P-8I Poseidon de l’Indian Navy à La Réunion est un « mouvement inédit, un changement profond » car « il y a quelques années, on n’imaginait pas d’engager avec nos amis indiens une présence maritime ici, de la même manière que les opérations que nous avons faites récemment. »

« La France est la deuxième puissance maritime du monde. Là aussi, nous l’avons trop souvent oublié. C’est une réalité géopolitique. Nous avons décidé de la réinvestir et sur le plan politique et militaire, d’en tirer toutes les conséquences avec nos partenaires, et justement, en bâtissant ces agendas de confiance avec tous les partenaires de la région », en encore fait valoir le chef de l’Élysée.

Actuellement, la Marine nationale dispose à La Réunion de deux frégates de surveillance [le Nivôse et le Floréal], de l’Astrolabe, un patrouilleur et navire logistique polaire, d’un patrouilleur [Le Malin] et d’un Bâtiment de soutien et d’assistance outre-Mer [Le Champlain].

L’océan Indien occupe un place prépondérante pour la France est puisque ses approvisionnements stratégiques y transitent en grande partie et qu’il représente 20% de sa zone économique exclusive [ZEE].

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