Syrie : Une opération des forces spéciales américaines a visé Abou Bakr al-Baghdadi, le chef de Daesh

Donné pour mort, gravement blessé ou encore réfugié en Libye… Beaucoup de choses ont été dites au sujet d’Abou Bakr al-Baghdadi, le chef de l’État islamique [EI ou Daesh] depuis qu’il avait proclamé un « califat » recouvrant une zone chevauchant les frontières irakiennes et syriennes.

En août, un rapport des Nations unies avait même indiqué que le chef jihadiste se trouvait très probablement dans l’ouest de l’Irak, où l’état-major de Daesh s’attachait à renforcer « les conditions propices à son éventuelle résurgence. » En tout cas, al-Baghdadi, qui ne fit qu’une apparition publique [à Mossoul, en juillet 2014, ndlr], restait insaisissable.

Mais, a priori, ce n’était pas en Irak qu’il fallait chercher le chef de Daesh… En effet, selon Newsweek, les forces spéciales américaines ont mené, dans la nuit du 26 au 27 octobre, une opération héliportée à Barisha, un village situé dans la province d’Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie. Et leur cible n’était autre qu’Abou Bakr al-Baghdadi [alias Ibrahim Awwad Ibrahim Ali al-Badri al-Samarraï].

Pour rappel, la totalité de la province d’Idleb échappe encore au contrôle de Damas. Elle est dominée par le groupe Hayat Tahrir al-Cham, l’ex-branche syrienne d’al-Qaïda, par ailleurs adversaire de l’EI. Cette semaine, le président Bachar el-Assad s’est rendu sur la ligne de front. Une première depuis le début du conflit syrien, en mars 2011.

Toujours selon la même source, qui cite des responsables militaires américains, l’opération avait été approuvée par le président Trump une semaine auparavant. La décision de la lancer a été prise après la collecte de renseignements permettant de confirmer l’objectif. Le village de Barisha était « sous surveillance depuis un certain temps », rapporte Newsweek, qui précise que la Delta Force, c’est à dire les forces spéciales issues de l’US Army, a été sollicitée pour mener à bien cette mission.

Il est encore trop tôt pour connaître tous les détails de cette opération des forces spéciales américaines. Cela étant, le président Trump a laissé entendre, via Twitter, qu’elle avait atteint son objectif, à savoir l’élimination du chef de l’EI. « Quelque chose d’énorme vient de se passer », a-t-il avancé.

A priori, et selon les sources de Newsweek, il y aurait eu un bref échange de tirs quand les commandos américains sont entrés dans le village de Barisha. Puis, al-Baghdadi se serait donné la mort en actionnant la ceinture d’explosifs qu’il portait. Deux de ses épouses en auraient fait autant.

Désormais, des tests biométiques et ADN sont en cours pour vérifier qu’il s’agit bien d’al-Baghdadi. La Maison Blanche a indiqué que le président Trump prendrait la parole ce 27 octobre, à 9h00 [14h00 en France, ndlr].

D’après un responsable du Pentagone cité par Newsweek, le bâtiment dans lequel se trouvait le chef de l’EI, désormais présumé mort, a été détruit par une frappe aérienne afin d’empêcher qu’il puisse devenir un « sanctuaire » pour les jihadistes.

Une source « sur place », citée par le journaliste Wassim Nasr, qui suit de très près les groupes jihadistes, a précisé que la maison visée par les forces spéciales américaines appartenait à « Abou al-Bara’a al-Halabi un commandant de Houras Eddine », un organisation liée à al-Qaïda.

En outre, bien qu’alliée au sein de l’Otan, la Turquie « n’a pas été informée avant l’opération », a-t-il indiqué. On ignore s’il en a été fait de même avec la Russie, dont les forces aériennes contrôlent en partie l’espace aérien syrien.

En tout cas, quelques heures avant l’opération des forces spéciales américaines, Moscou avait eu des mots très durs à l’endroit des États-Unis, qui ont annoncé leur intention de protéger les puits de pétrole situés dans la province syrienne de Deir ez-Zor.

« Absolument aucun des gisements d’hydrocarbures […] situés sur le territoire de la République arabe syrienne n’appartient aux terroristes de l’État islamique et encore moins aux ‘défenseurs américains des terroristes de l’État islamique’, mais exclusivement à la République arabe syrienne », avait en effet affirmé le ministère russe de la Défense, via un communiqué.

Reste maintenant à voir, si la mort d’al-Baghdadi est confirmée, ce que va devenir Daesh sachant que, a priori, la direction de l’organisation devrait revenir à un certain Abdullah Qardash. Il y a huit ans, l’élimination d’Oussama Ben Laden au Pakistan, lors d’une opération spéciale américaine, a sans doute amoindri al-Qaïda dans un premier temps. Mais l’organisation qu’il a fondée a été résiliente. Et les groupes qui s’en réclament continuent d’être particulièrement actifs, notamment en Afghanistan, au Sahel, en Somalie et au Yémen.

« L’État islamique n’est plus un simple groupe terroriste comme il l’était. Il prétend être un califat et à partir de là, ils doivent donc rapidement nommer un successeur qui devra être connu. Pendant des années, Abou Bakr al-Baghdadi n’avait pas de visage, on ne savait pas qui il était », a expliqué Romain Caillet, spécialiste de la mouvance jihadiste, à RTL. « Si son successeur se présente comme le nouveau calife, il devra donner des informations sur sa personne pour que les différentes branches de l’État islamique lui prêtent allégeance », a-t-il ajouté.

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