Le système informatique de la dissuasion américaine ne repose (enfin) plus sur d’antiques disquettes de 8 pouces

Grâce à l’arrivée des micro-processeurs, il fut possible, dans les années 1970, de mettre au point les premiers ordinateurs personnels. Le français Micral ouvrit le bal, en 1972… Mais la France passa à côté de ce qui allait devenir une révolution industrielle et économique. En revanche, il en alla autrement aux États-Unis, où hackers et autres passionnés d’électronique s’emparèrent de l’Altaïr 8080 pour développer des machines toujours plus performantes ainsi que des logiciels pour en exploiter leurs capacités. De là naquirent des entreprises comme Apple, Microsoft ou encore Atari.

Dans le même temps, c’est à dire en 1976, l’US Strategic Command [STRATCOM] se dota d’imposants ordinateurs IBM Series / 1 pour son système stratégique automatisé de commandement et de contrôle [SACCS], chargé de gérer les missiles balistiques Minutemen III ainsi que les bombardiers stratégiques et les avions ravitailleurs de l’US Air Force.

Et tant que ce système informatique fonctionnait, il fut estimé qu’il n’était pas la peine de le moderniser… Or, en 2016, le Government Accountability Office [GAO, l’équivalent américain de la Cour des comptes française] s’étonna de voir que des disquettes souples de 8 pouces, n’ayant qu’une capacité de 80 kilo-octets, étaient toujours utilisées pour faire fonctionner le SACCS. Et il recommanda mettre à jour les moyens de stockage des données ainsi que les terminaux informatiques des forces stratégiques américaines.

Et cela d’autant plus que la maintenance d’un système datant des années 1970, assurée par le 595e escadron de communications stratégiques de l’US Air Force, devenait alors de plus en plus compliquée. En effet, les composants électroniques de systèmes aussi anciens sont désormais difficiles à trouver. De même que les techniciens ayant les compétences nécessaires et ne rechignant pas à jouer du fer à souder…

Quoi qu’il en soit, d’après Defense News, qui cite le lieutenant-colonel Jason Rossi, le commandant du 595e escadron de communications stratégiques, les disquettes de 8 pouces ont désormais cédé la place à une « solution de stockage numérique hautement sécurisée ». Sans plus de précision… Mais a priori, il s’agirait de cartes mémoire. En tout cas, un tel choix avait été annoncé il y a trois ans par un porte-parole du Pentagone.

Cela étant, on ignore si l’ensemble du système informatique sur lequel repose le SACCS a également été modernisé. Mais d’après les propos du lieutenant-colonel Rossi, on peut en douter. D’autant plus qu’utiliser un système très ancien permet d’éviter les intrusions et les piratages.

C’est d’ailleurs le calcul que fait l’auteur de la saga « Games of Thrones », George R.R. Martin, qui utilise WordStar 4.0 de Micropro, un logiciel de traitement de texte sorti dans les années 1980 ainsi qu’un ordinateur datant de la même époque afin d’éviter les regards indiscrets sur son travail.

« J’aime ce programme. Il fait ce que je lui demande de faire, et surtout ne fait pas autre chose! Je ne veux pas d’aide : je déteste ces programmes modernes qui remplacent automatiquement les minuscules par des majuscules. Si je veux faire une majuscule, j’appuie moi-même sur la touche majuscule », avait expliqué George R.R. Martin, en 2014. Et cela vaut donc aussi pour l’US Air Force.

« Je plaisante en disant que c’est le plus vieux système informatique de l’US Air Force. Mais son âge est une garantie de sécurité. Vous ne pouvez pas pirater quelque chose qui n’a pas d’adresse IP. C’est un système tout a fait unique. Il est vieux mais très fiable », a fait valoir le lieutenant-colonel Rossi

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