En 2020, environ 20.000 soldats américains débarqueront en Europe pour l’exercice Defender

L’information peut sembler anecdotique… Mais après rétabli le service militaire, repris en main son industrie de l’armement, augmenté ses dépenses militaires, renoué avec son concept de défense totale, organisé à nouveau des manoeuvres de grande ampleur et remilitarisé l’île de Gotland afin de faire face au contexte sécuritaire qui prévaut dans la région de la Baltique, la Suède a annoncé la réouverture de la base navale souterraine de Muskö.

Or, située au sud de Stockholm, cette dernière fut construite dans les années 1960 afin de protéger les navires militaires suédois d’une éventuelle attaque soviétique. Puis, la Guerre Froide étant terminée, elle perdit de son importance, jusqu’à sa fermeture officielle en 2005, même si elle abritait toujours quelques activités militaires.

Désormais, la base accueillera l’état-major de la marine suédoise. « Cette décision est basée sur le calcul selon lequel les Russes pourraient utiliser des armes puissantes qui exigent un niveau de protection que seul Muskö peut offrir », a expliqué Niklas Granholm, un expert de l’Agence suédoise de recherche sur la défense, cité par le quotidien The Guardian.

D’autres commandements militaires devraient également être transférés vers des lieux fortifiés afin de les rendre moins vulnérables aux attaques. « Les forces armées doivent adapter leurs opérations afin de faire face aux défis posés par la dégradation de l’environnement extérieur », a commenté Rebecca Landberg, la porte-parole de la marine suédoise.

Mais il n’y a pas qu’en Suède où les vestiges de la Guerre Froide retrouvent une nouvelle vigueur… En effet, entre 1969 et 1993, l’Otan organisait chaque année l’exercice « Reforger », qui consistait à déployer rapidement un important volume de troupes en Allemagne de l’Ouest afin de contrer une attaque du Pacte de Varsovie. Et sa particularité était que des forces américaines étaient déployées en Europe depuis les États-Unis.

Et c’est exactement ce principe qui guidera les manoeuvres « Defender« , qui se dérouleront sur le Vieux Continent en mai 2020. Ainsi, il s’agira pour le Pentagone d’acheminer en Europe jusqu’à 20.000 militaires avec leurs équipements [soir 3 brigades blindés, une d’artillerie et une autre de logistique]. Et cela en lien avec cinq exercices régulièrement organisés par l’Otan, tels que Saber Strke ou Swift Response.

Au total, ces manoeuvres impliqueront jusqu’à 40.000 militaires originaires de 18 pays [dont la France]. Les soldats américains débarqueront dans huit pays, dont l’Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Pologne et… la Géorgie, qui n’est pas membre de l’Otan [mais qui a des relations très compliquées avec la Russie…].

Ils utiliseront également des équipements préalabalement stockés dans des dépôts [Army prepositioned stocks, APS] implantés en Belgique et en Allemagne, qui [re]deviendra une plaque tournante logistique.

Pour autant, l’US Army estime qu’il n’est pas pertinent de comparer Defender Europe 2020 aux exercices Reforger, dans la mesure où ces manoeuvres ne viseront pas à défendre un pays particulier [l’Allemagne] contre un adversaire connu [le Pacte de Varsovie]. Mais, en réalité, on peut bien se douter qu’ils constituent un moyen de dissuader la Russie et de répondre aux manoeuvres de grande ampleur que cette dernière organise régulièrement. L’an passé, Vostok 2018 a été l’exercice militaire aussi important que celui mené par l’URSS et ses satellites en 1981 [Zapad 1981], avec la participation de 300.000 soldats, 36.000 blindés et plus d’un millier d’aéronefs.

« L’objectif est d’accroître la préparation au sein de l’Otan et de dissuader d’éventuels adversaires », a expliqué l’US Army, pour qui la capacité à « projeter sa force à tout moment » est essentielle.

Ces manoeuvres Defender 2020 seront aussi l’occasion de mesurer les progrès accomplis dans le domaine de la mobilité militaire au sein de l’espace européen, sachant que les troupes américaines auront à parcourir 4.000 km par voie terrestre. De précédents exercices ont montré qu’il y avait d’énormes progrès à faire dans ce domaine… Au point de limiter sérieusement la capacité de l’Otan à intervenir dans une région donnée, comme le passage de Suwalki, entre les pays baltes et la Pologne. L’Union européenne avait présenté un plan, l’an passé, pour tenter d’y remédier.

Par ailleurs, l’an prochain, l’US Army mènera également une exercice du même type dans la région Indo-Pacifique [et appelé Defender Pacific 2020]. Là, l’objectif sera d’y déployer un quartier général de division et plusieurs brigades lors d’une période de 30 à 45 jours. Ces unités devront « relever le défi de venir dans la Pacifique et de rejoindre les forces déjà sur place », avait expliqué le général Robert Brown, le commandant de l’US Army Pacific, à Defense News, en mars dernier. Et là, il s’agira de se préparer à contrer les forces chinoises en mer de Chine méridionale.

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