Londres estime que l’Iran est responsable des attaques contre les sites pétroliers saoudiens

Une semaine après les attaques ayant affecté la production pétrolière saoudienne, le président iranien, Hassan Rohani a vivement critiqué la présence de « forces étrangères » dans la région du golfe arabo-persique [GAP] et annoncé qu’il présenterait un « plan de coopération » pour y assurer la sécurité.

« Votre présence a toujours apporté douleur et malheur dans la région », a lancé M. Rohani à l’adresse des pays qui ont envoyé des forces dans la région du Golfe, dont les États-Unis. « Plus vous vous tiendrez éloignés de notre région, plus celle-ci connaîtra la sécurité », a-t-il insisté.

« De notre point de vue, la sécurité du golfe Persique vient de l’intérieur. La sécurité du golfe Persique est endogène, la sécurité du détroit d’Ormuz est endogène. Les forces étrangères sont source de problème et d’insécurité pour notre peuple et pour la région », a encore insisté M. Rohani, réagissant ainsi à l’annonce faite deux jours plus tôt par le Pentagone au sujet de l’envoi de renforts militaires « limités » dans la région, à la demande de l’Arabie Saoudite et des Émirats arabes unis.

Aussi, le président iranien a proposé un « plan de coopération régionale », appelé « Espoir », dont l’objet sera d’assurer la sécurité du Golfe, du détroit d’Ormuz et de la mer d’Oman avec « l’aide des pays de la région. » Les détails seront dévoilés lors de l’Assemblée générale des Nations unies.

Pour rappel, les attaques ayant visé l’usine de traitement d’Abqaiq et le champ pétrolier de Khurais, situés dans l’est de l’Arabie Saoudite, ont été revendiquées par les rebelles Houthis qui, actifs au Yémen, sont soutenus, au moins politiquement, par l’Iran. Or, tout laisse à penser que ces derniers n’avaient pas les capacités pour réaliser de telles frappes, lequelles ont impliqué des drones et des missiles de croisière [probablement des Quds-1, dont la portée est insuffisante pour atteindre les sites visés depuis le Yémen, ndlr].

Selon les États-Unis, les attaques contre les sites pétroliers iraniens auraient été menées depuis l’Iran. Et Mike Pompeo, le chef de la diplomatie américaine, y a vu un « acte de guerre », qui justifie les dernières sanctions prises par Washington à l’égard de Téhéran et l’envoi de troupes supplémentaires au Moyen-Orient.

L’Arabie Saoudite a parlé d’attaques « parrainées » par l’Iran, sans pour autant aller plus loin afin d’éviter quelques complications dans cette affaire.

« Les Houthis ont annoncé que c’était eux qui avaient lancé cette agression, c’est relativement peu crédible », a ainsi affirmé Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, dont l’action de ces dernières semaines a consisté à sauver l’accord sur le nucléaire iranien et à faire en sorte que Iraniens et Américains puissent dialoguer.

Le chef de la diplomatie britannique, Dominic Raab, n’a pas dit autre chose, ce 23 septembre. « D’après les informations que j’ai vues, je trouve cela très peu vraisemblable et peu crédible de suggérer que ces attaques venaient des rebelles houthis », a-t-il déclaré à l’antenne de la BBC. « Avant de désigner des responsables, je veux que cela soit absolument limpide, parce que cela signifie que les actions que nous pourrons prendre seront solides et aussi largement soutenues que possible », a-t-il continué.

Mais pour l’actuel locataire du 10 Downing Street, Boris Johnson, les choses sont « limpides ». En effet, a-t-il confié à des journalistes alors qu’il se rendait à New York, « le Royaume-Uni attribue à l’Iran avec un degré très élevé de probabilité la responsabilité des attaques contre Aramco. » Et d’ajouter : « Nous pensons effectivement qu’il est très probable que l’Iran soit effectivement responsable. »

« Nous allons travailler avec nos amis américains et nos amis européens pour élaborer une réaction qui essaie de faire retomber les tensions dans la région du Golfe », a ensuite assuré le Premier ministre britannique. « Il est évident que si on nous demande, que ce soient les Saoudiens ou les Américains, de jouer un rôle alors nous réfléchirons à la manière dont nous pouvons être utile », a-t-il conclu.

Avant la nomination de M. Johnson au poste de Premier ministre, même s’il avait accusé Téhéran d’être derrière le sabotage de plusieurs navires au large des Émirats arabes unis, le Royaume-Uni se coordonnait avec la France et l’Allemagne pour tenter de sauver l’accord sur le nucléaire iranien. Et il était même question, après la saisie par l’Iran du Stena Impero, un pétrolier battant pavillon britannique, d’une opération navale « européenne » aux abords du détroit d’Ormuz afin d’y assurer la sécurité de la navigation maritime.

Or, après le remaniement gouvernemental de cet été, Londres a finalement décidé de rejoindre l’opération Sentinel, lancée par les États-Unis pour garantir la liberté de navigation dans les détroits d’Ormuz et de Bab el-Mandeb.

Quoi qu’il en soit, le président français, Emmanuel Macron, n’a pas emboîté le pas de M. Johnson. « Il faut être très prudent dans l’attribution; il y a pour le moment des faisceaux d’indices mais ce bombardement est un fait militaire de nature nouvelle qui change l’écosystème dans lequel était la région et qui crée une nouvelle donne », a-t-il dit, dans un entretien donné au quotidien Le Monde. Et d’assurer ne « pas vouloir faire de politique-fiction sur cette escalade et sur le rôle de l’Iran entré sur le chemin d’une montée en tension qui est une erreur stratégique majeure, aussi
bien pour lui-même que pour toute la région. »

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]