Le renseignement américain aurait eu une « taupe » au Kremlin

Les lecteurs de Tom Clancy se souviennent sans doute du « Cardinal du Kremlin » et de Mikhail Semyonovitch Filitov. Héros de l’Union soviétique – et donc insoupçonnable – ce personnage de fiction avait livré des secrets militaires de premier plan à la CIA parce qu’il considérait le communisme néfaste pour la Russie. Mais une indiscrétion permit au KGB de le démasquer.

Eh bien ce roman de Tom Clancy présente quelques similitudes troublantes avec l’affaire révélée ce 10 septembre par CNN et le New York Times. Ainsi, la CIA aurait réussi à recruter un responsable russe gravitant dans l’entourage du président Vladimir Poutine, avant de l’exfiltrer de Russie. Et cette source « secrète » lui aurait fourni des informations hautement sensibles pendant plus de dix ans, dont des photographies de documents posés sur le bureau du chef du Kremlin.

D’ailleurs, les renseignements collectés par cette « taupe » auraient permis aux services de renseignement américaine d’arriver à la conclusion que M. Poutine avait orchestré les ingérences russes dans la course à la Maison Blanche, en 2016.

Pour rappel, la Russie est accusée d’avoir interféré dans la campagne présidentielle américaine afin de faire élire Donald Trump à la Maison Blanche, aux dépens d’Hillary Clinton. Et cela, via la diffusion d’infox, le recours à des « trolls », des manipulations en vue d’exacerber les tensions raciales et des actions de piratage informatique, notamment contre le Parti démocrate.

Cela étant, la CIA a dû se résoudre à exfiltrer cet informateur de Russie, et se priver ainsi d’une source exceptionnelle de renseignement. La décision a été en partie prise par crainte que M. Trump ne commette quelques imprudences.

« Une personne directement impliquée dans les discussions a déclaré que l’exfiltration avait été motivée en partie par le fait que le président Trump et son administration avaient à plusieurs reprises mal géré des informations confidentielles et risquaient de révéler l’identité » de cette source, avance CNN. Le détonateur fut une réunion organisée en mai 2017 dans le bureau ovale. Réunion au cours de laquelle le président américain avait discuté avec le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, de renseignements « hautement confidentiels » sur l’État islamique, fournis par Israël.

À noter que la directrice des affaires publiques de la CIA, Brittany Bramell, a démenti les affirmations de CNN, évoquant une « prétendue opération d’exfiltration ». Même chose du côté de la Maison Blanche.

Seulement, le Kremlin a confirmé cette affaire, tout en relativisant l’importance de l’informateur de la CIA. Auparavant, le quotidien russe Kommersant avait révélé, citant des sources « non identifiées », que ce dernier avait été porté disparu au Monténégro avec sa famille et que la Russie le crut mort « avant d’apprendre » que, finalement, il était en vie.

De son côté, Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, a indiqué que l’homme en question avait bien « travaillé a sein de l’administration présidentielle » mais qu’il en avait été « limogé » en « 2016 ou en 2017. »

« Son poste ne faisait pas partie de ceux au plus haut niveau […] et ne prévoyait aucun contact avec le président » Poutine, a fait valoir M. Peskov, qualifiant les informations des médias américains de « roman à sensation ».

Évidemment, il est toujours compliqué, dans ce genre d’affaires, de démêler le vrai du faux. Si les informations de CNN et du New York Times sont justes, alors le Kremlin a tout intérêt à laisser entendre que les renseignements communiqués par la « taupe » de la CIA sont sujets à caution.

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