Le président Trump rompt les négociations de paix avec le mouvement taleb afghan

Entamées au début de cette année, les négocations de paix entre les États-Unis et le mouvement taleb afghan étaient sur point d’aboutir. Dans les grandes lignes, il était question de reduire significativement, sous 135 jours, la présence militaire américaine en Afghanistan, en échange de la garantie que les taliban ne laisseraient pas ce pays redevenir une zone refuge pour les groupes terroristes, dont évidemment al-Qaïda.

Cet accord devait ensuite être suivi par des négocations intra-afghanes, c’est à dire entre le gouvernement et les insurgés. Cela étant, à Kaboul, on s’était dit « préoccupé » sur l’orientation prise par les discussions entre diplomates américain et émissaires taleb.

« Nous sommes préoccupés et nous demandons donc des éclaircissements sur ce document afin d’en analyser précisément les risques et conséquences, et déjouer tout danger qu’il pourrait entraîner », a ainsi affirmé Sediq Sediqqi, le porte-parole du président afghan, Ashraf Ghani.

Même chose aux États-Unis, où d’anciens responsables mirent en garde contre un désengagement militaire trop hâtif. « Un retrait majeur des forces américaines devrait suivre et non pas précéder un vrai accord de paix », estimèrent-ils, dans une tribune publiée le 4 septembre.

Dans le même temps, alors qu’un accord était à portée, les taliban afghans lancèrent plusieurs opérations d’envergure pour tenter de s’emaprer de plusieurs capitales provinciales [Farah, Kunduz et Pul-e Khumri ]. Et, le 5 septembre, ils revendiquèrent un attentat à la voiture piégée qui, commis à Kaboul, fit 12 tués, dont le capooral roumain Ciprian-Ștefan Polschi et le sergent américain Elis Barreto Ortiz. Sans doute était-ce l’attaque de trop.

Dans la soirée du 7 septembre, le président américain, Donald Trump, qui venait d’annoncer qu’il devant recevoir des responsables taliban et des officiels afghans à Camp David [Maryland], très probablement pour signer l’accord de paix avant la date anniversaire des attentats du 11-Septembre, a fait une inattendue volte-face, en annonçant, via Twitter, sa décision de rompre les négociations.

« Qui sont ces gens qui tuent autant de monde pour soi-disant faire monter les enchères? Ils ont échoué, ils n’ont fait qu’aggraver leur position! » a lancé M. Trump en parlant des taliban. « S’ils ne peuvent pas convenir d’un cessez-le-feu pendant ces négociations de paix très importantes, et sont même prêts à tuer 12 personnes innocentes, alors ils n’ont probablement pas autorité pour négocier un accord d’importance de toute façon », a-t-il ensuite faire valoir. Et de demander : « Combien de décennies supplémentaires sont-ils prêts à se battre? »

Quant à la réception à Camp David, M. Trump a indiqué que les émissaires talibans « étaient en route pour les États-Unis ce soir. » Mais, a-t-il ajouté, « j’ai immédiatement annulé la réunion. »

Ce coup de théâtre est d’autant plus surprenant qu’il était prêté au chef de la Maison Blanche l’intention d’accélérer le désengagement militaire américain d’Afghanistan. Et les négociations de paix avec le mouvement taleb afghan étaient l’une des étapes pour y parvenir. « Nous ne menons pas de guerre là-bas, nous ne sommes que des policiers », avait encore récemment affirmé M. Trump.

Ces derniers mois, et alors que les discussions étaient en cours, les taliban ont accentué leurs opérations sur le terrain. « Les efforts de paix se sont intensifiés ces dernières semaines, tout comme le conflit sur le terrain », avait d’ailleurs relevé Tadamichi Yamamamoto, le chef de la Mission d’aide des Nations unies en Afghanistan [Manua].

Qui plus est, au cours des quinze derniers jours, quatre soldats américains ont été tués dans des attaques en Afghanistan. En quoi l’attentat du 5 septembre aurait fait changer M. Trump d’avis? Peut-être a-t-il eu des doutes sur la volonté des taliban à tenir leurs engagements… Sachant que, selon plusieurs rapports [tant des Nations unies que du Pentagone], al-Qaïda ne fait que se renforcer dans les territoires passés sous le contrôle du mouvement taleb, auquel l’organisation jihadiste a fait allégeance.

Quoi qu’il en soit, la volte-face du président Trump devrai ravir… la Chine. Le 7 septembre, à l’issue d’une réunion avec ses homologues pakistanais et afghan, à Islamabad, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, s’est en effet inquiété d’un départ précipité des « troupes étrangères » d’Afghanistan.

« Nous avons partagé le point de vue selon lequel le retrait des troupes étrangères devrait se faire de manière méthodique et responsable afin d’assurer une transition en douceur », a dit M. Yi, lors d’une conférence de presse.

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