L’Eurofighter Typhoon n’est plus candidat à l’appel d’offres portant sur les futurs avions canadiens

En 2010, le gouvernement canadien annonça sa décision d’acquérir 65 avions de combat F-35A Lightning II afin de remplacer les 88 CF-18 Hornet de l’Aviation royale canadienne. Ce qui, malgré l’implication du Canada dans ce programme conduit par Lockheed-Martin, suscita une vive polémique, notamment en raison du montant du contrat et des coûts relatifs cette acquisition jugés trop importants.

Alors qu’il était dans l’opposition, le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, avait d’ailleurs été catégorique. « Nous n’achèterons pas de chasseurs-bombardiers furtifs F-35. Nous lancerons immédiatement un appel d’offres ouvert et transparent pour remplacer les CF-18 », avait-il lancé, lors d’un meeting électoral.

Et, en 2016, l’exercice du pouvoir ne l’avait pas fait changer d’avis. « Les conservateurs […] se sont accrochés à un avion qui ne fonctionne pas et qui est loin de pouvoir fonctionner. C’est un problème dont nous avons hérité et que nous allons régler », avait-il affirmé, avant de souligner l’urgence qu’il y avait alors à remplacer les CF-18 de l’Aviation royale canadienne, cette dernière risquant de ne plus pouvoir honorer ses engagements à l’égard de l’Otan et du NORAD [Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord, ndlr].

Complication supplémentaire : la brouille avec Boeing, au sujet des subventions accordées au constructeur aéronautique canadien Bombardier obligea Ottawa à renoncer à acquérir 18 F/A-18 Super Hornet auprès de l’industriel américain. Ces appareils devaient permettre à l’Aviation royale canadienne d’éviter une rupture capacitaire, dans l’attente d’un appel d’offres visant à remplacer ses CF-18. Finalement, le gouvernement canadien se tourna vers l’Australie, qui lui céda des F-18 Hornet ayant suffisamment de potentiel pour patienter jusqu’au choix d’un nouvel avion de combat.

Par la suite, cinq constructeurs furent sollicités pour participer à cet appel d’offres : Lockheed-Martin [F-35], Boeing [F/A-18 Super Hornet], Saab [Gripen E/F], Dassault Aviation [Rafale] et, avec le soutien des autorités britanniques, le consortium Eurofighter [Typhoon].

Mais au fur et à mesure que l’on se dirige vers l’annonce d’un choix, le nombre de prétendants à ce contrat évalué à 10,3 milliards d’euros, ne cesse de diminuer. L’an passé, et alors que le Canada figurait parmi ses priorités, Dassault Aviation fit part de sa décision de se retirer de la compétition. Et l’industriel français vient d’être suivi par le consortium Eurofighter, qui, pour rappel, réunit BAE Systems, Airbus et Leonardo.

En effet, Airbus Defence & Space a expliqué, via un communiqué diffusé le 30 août, que les « exigences de sécurité du NORAD » imposent un « coût trop important aux plateformes dont les chaînes de production et d’entretien sont situées à l’extérieur » du Canada et des États-Unis » et que les « les importantes révisions récemment apportées aux exigences de retombées industrielles et technologiques [RIT] ne valorisaient pas suffisamment les engagements fermes compris dans l’offre de Typhoon Canada, alors qu’il s’agissait d’un point majeur. »

Aussi, poursuit-il, « avec la décision de ne pas soumissionner pour le Projet de capacité future en matière de chasseurs du Canada [PCFAC], le ministère du Royaume-Uni et Airbus Defence and Space ne poursuivront pas la campagne de promotion de Typhoon Canada. »

Lors d’une récente audition parlementaire, le Pdg de Dassault Aviation, Éric Trappier, avait expliqué que la décision de ne pas soumettre la candidature du Rafale à l’appel d’offres canadien s’expliquait en partie par le fait qu’Ottawa appartient au cercle « Five Eyes », c’est à dire à une alliance formée après la Seconde Guerre Mondiale par les États-Unis, le Royame-Uni, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

« Soyons clairs : il est impossible de vendre le Rafale aux pays membres du réseau Five Eyes, non pas parce qu’il n’est pas interopérable – il l’est tout autant que d’autres et en a fait la preuve -mais parce que ce réseau s’est fixé des règles qu’ils refusent de nous communiquer et qui visent à ce que ses membres travaillent ensemble », fit valoir M. Trappier. Et « s’ajoute au Canada la question du commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord, le NORAD », avait-il continué.

Étant donné que la Suède ne fait pas partie des « Five Eyes » et que le Gripen E/F se heurtera aux mêmes exigences par rapport au NORAD, il y donc tout lieu de penser que le choix du futur avion de combat canadien se fera entre le F-35A et le F/A-18 Super Hornet. Le nom du vainqueur de l’appel d’offres sera dévoilé au début de l’année 2022, les premières livraisons devant commencer trois ans plus tard.

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