Environ 8.600 soldats américains devraient rester en Afghanistan après un accord avec le mouvement taleb

En août 2017, le président Trump donna le détail de la nouvelle stratégie qu’il entendait appliquer en Afghanistan, où, à l’époque, 8.500 soldats américains étaient déployés. Ainsi, le chef de la Maison Blanche avait annoncé l’envoi de renforts militaires [4.000 soldats de plus, ndlr] et ouvert la porte à des discussions avec le mouvement taleb afghan en vue d’un réglement politique du conflit.

La décision de M. Trump pouvait sembler surprenante au regard des propos qu’il avait tenus avant son élection. « Mon instinct initial était de se retirer […] mais les décisions sont très différentes lorsque vous êtes dans le Bureau ovale », avait-il expliqué, il y a deux ans.

Sur le terrain, la situation est contrastée, entre 40 et 50% du terroitoire afghan étant toujours disputé entre les forces gouvernementales et les taliban, par ailleurs allié à des factions jihadistes. Par ailleurs, la branche afghano-pakistanaise de l’État islamique [EI-K] sembre prendre de plus en plus d’importance, même si, pour le moment, elle reste cantonnée dans l’est du pays, plus précisément dans les provinces de Nangarhar et de Kounar.

Dans le même temps, à Doha, des représentants du mouvement taleb afghan et des diplomates américains ont entamé des discussions. Ce qui n’a pas fait baisser le niveau des violences, comme l’a récemment souligné Tadamichi Yamamamoto, le chef de la Mission d’aide des Nations unies en Afghanistan [Manua]. « Les efforts de paix se sont intensifiés ces dernières semaines, tout comme le conflit sur le terrain », a-t-il dit.

Quoi qu’il en soit, le 9e cycle des discussions entre les émissaires des taliban et les diplomates américains a commencé la semaine passée. Et l’issue vers laquelle on s’achemine risque d’être surprenante.

Jusqu’à présent, les taliban ont toujours fait du retrait militaire américain un préalable à tout accord de paix. Or, à en croire M. Trump, ce ne serait plus exactement le cas.

« On va réduire nos effectifs à 8.600 [soldats] et ensuite on verra à partir de là », a en effet indiqué le président américain, lors d’un entretien donné à Fox News. En clair, il s’agirait de revenir à la situation qui prévalait en août 2017…

« Nous ne menons pas de guerre là-bas, nous ne sommes que des policiers », a enchaîné M. Trump. Pour autant, les États-Unis doivent y « garder une présence », a-t-il estimé.

« Nous allons réduire cette présence de manière très substantielle et nous allons toujours avoir une présence. Nous allons avoir un niveau de renseignement élevé », a-t-il assuré.

En échange de cette réduction des effectifs militaires américains, le mouvement taleb aurait pris l’engagement de faire en sorte que les territoires qu’ils contrôlent ne soient plus utilisés par al-Qaïda et d’autres groupes terroristes. Faute de quoi, a prévenu M. Trump, si jamais une nouvelle attaque contre les États-Unis venait à être planifiée depuis l’Afghanistan, les Américains reviendraient « avec une force » plus importante que « jamais auparavant ».

Cela étant, il y a de quoi être sceptique sur la viabilité d’un tel accord. Les rapports se succèdent et ils disent tous peu ou prou la même chose : al-Qaïda se renforce actuellement en Afghanistan.

L’organisation fondée par Oussama ben Laden « continue de voir l’Afghanistan comme un sanctuaire pour ses dirigeants, du fait de ses liens solides et de longue date avec les taliban », a souligné un récent rapport des Nations unies. Et elle « a gagné en puissance en agissant sous l’égide des Taliban dans tout l’Afghanistan » tout en cherchant « à renforcer sa présence dans la province de Badakhchan, plus spécialement dans le district de Chighnan, qui a une frontière commune avec le Tadjikistan », est-il affirmé dans le document.

Et même les taliban venaient à rompre leurs liens avec al-Qaïda, la situation ne serait pas satisfaisante pour autant étant donné que l’Afghanistan est le pays qui présente « plus grande concentration régionale de groupes terroristes dans le monde », comme l’a rappelé un rapport de l’Inspecteur général spécial pour la reconstruction de l’Afghanistan [SIGAR].

Aussi, prévient-il, « l’insécurité pourrait persister sous la forme d’une autre insurrection, de gangs criminels ou de réseaux impliqués dans d’autres activités néfastes  » et il y aura encore à combattre « plusieurs organisations extrémistes susceptibles de menacer la communauté internationale. »

D’où le commentaire du général Joseph Dunford, le chef d’état-major interarmées américain, qui quittera ses fonctions en septembre. « Je n’utilise pas le terme ‘retrait’ pour l’instant, nous allons nous assurer que l’Afghanistan n’est pas un sanctuaire et nous allons nous efforcer d’apporter la paix et la stabilité en Afghanistan », a-t-il dit.

Quand cet accord entre les talibans et les Américains aura été signé, un autre cycle de négociations de paix interafghanes s’ouvrira à Oslo, avec le gouvernement afghan d’un côté et le mouvement taleb de l’autre.

Qu’en sortira-t-il, à l’heure où le fils du commandant Massoud, Ahmad, s’est dit prêt à reprendre le combat de son père, en rassemblant « différents groupes de différents partis » afin d’éviter « un nouveau chaos dans le pays, un retour aux heures sombres »? Son projet vise rien de moins qu’à ressusciter l’Alliance du Nord, sur laquelle les forces américaines s’étaient appuyées il y a 18 ans, au début de leur intervention en Afghanistan.

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