Sauf un ultime rebondissement, le traité sur les forces nucléaires intermédiaires ne sera bientôt plus en vigueur

Parce qu’ils considèrent que la Russie a mis au point et déployé un missile interdit par le Traité sur les Forces nucléaires intermédiaires [FNI], les États-Unis ont fini par annoncer qu’ils se retireraient de cet accord à compter du 2 août prochain. Et cela va ébranler l’architecture européenne de sécurité, qui reposait en partie sur ce texte qui, signé en 1987 par les présidents Reagan et Gorbatchev, mit un terme à la crise des Euromissiles.

Pour rappel, le traité FNI interdit tout missile à capacité nucléaire ayant une portée comprise entre 500 et 5.500 km.

Le missile en question – le Novator « 9M729 » ou SS-C-8 – existe bel et bien. Il a d’ailleurs été officiellement présenté par les autorités russes en janvier dernier. Seulement, elles ont assuré, à cette occasion, que la portée de cet engin n’excédait pas les 480 km… alors que les États-Unis et l’Otan l’estime à 1.500 km.

Quoi qu’il en soit, et faute de pouvoir le vérifier, l’Otan a demandé à la Russie de retirer et de détruire ses missiles dont les performances ne seraient pas conformes au traité FNI. ֤

Évidemment, cette requête n’a pas abouti… Y donner suite aurait été perçu comme un aveu de la part des Russes. Et, le 3 juillet, le président russe, Vladimir Poutine, a ratifié la suspension de la participation de Moscou au traité FNI.

Dans ces conditions, l’issue du Conseil Otan-Russie, qui s’est tenu ce 5 juillet, était prévisible. Une nouvelle fois, il a été demandé à la Russie de détruire ses missiles controversés. Et, une nouvelle fois, elle a répondu « niet ».

« Nous n’avons pas vu une quelconque indication de la volonté de la Russie de se mettre en conformité avec le Traité sur les armes nucléaires de portée intermédiaire en détruisant ces missiles avant le 2 août […] et les conséquences sont gravissimes pour la maîtrise des armements », a en effet commenté Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan.

« S’il se révèle impossible de sauver le traité, alors la réaction de l’Otan sera coordonnée et défensive. Nous serons obligés de réagir », a prévenu l’ex-Premier ministre norvégien, selon qui les « défenses actuelles ne sont pas en mesure d’abattre un missile de croisière tiré depuis la Russie » parce qu’ils seraient « difficiles à déceler ».

Si les performances du missile 9M729 outrepassent ce qui est autorisé par le traité FNI, alors la Russie serait en mesure de frapper des villes européennes « en quelques minutes », selon M. Stoltenberg.

« Notre est de sauver le traité. Il reste 4 semaines avant le 2 août. En 1987, la Russie a détruit des missiles de croisière en quelques semaines. Il suffit d’en avoir la volonté politique », veut encore croire le secrétaire général de l’Otan.

Cela étant, la fin du Traité FNI arrange autant les Russes et les Américains. Les premiers pourront déployer des missiles susceptibles de menacer les capitales européennes tandis que le seconds auront les mains libres face à la Chine, qui, non signataire de ce texte, dispose d’un arsenal conséquent de missiles à portée intermédiaire.

Cependant, Moscou réfute toute responsabilité dans la fin annoncée du traité FNI.

« Les tentatives de rejeter la faute sur la Russie pour la disparition du traité INF sont injustifiées », a fait valoir la la représentation de la Russie auprès de l’Otan via un communiqué. « Nous avons attiré l’attention sur les risques réels d’aggravation de la situation militaire et politique en Europe », a-t-elle ajouté.

Et d’assurer que les États-Unis se retirent du traité, la Russie a « confirmé ne pas avoir l’intention de déployer des systèmes de missiles correspondants en Europe et dans d’autres régions, à moins que des missiles américains à portée intermédiaire et à courte portée ne soient déployés. » Et « nous demandé aux pays de l’Otan de faire la même déclaration », a précisé la représentation russe.

Parmi les options envisagées par l’Otan pour s’accommoder de la situation post-FNI qui s’annonce, il est question de renforcer la défense antimissile ainsi que la posture de dissuasion. En outre, outre-Atlantique, des programmes ont été lancés afin d’accroître la portée des systèmes d’artillerie conventionels, comme le PRSM [Precision Strike Missile], qui vise à développer un missile d’une portée de 500 km pouvant être tiré par des M142 HIMARS [High Mobility Artillery Rocket System].

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