Le Kremlin impose le secret sur l’incident qui a fait 14 tués – dont 7 capitaines de vaisseau – à bord d’un sous-marin

Plus de cinquante ans après les faits, on ignore quelle était la mission du sous-marin soviétique K-129 au moment de son naufrage, le 8 mars 1968. Et on ne sait pas non plus grand chose sur ce qui lui est arrivé… Ce qui donne lieu à plusieurs théories donnant plus ou moins dans le sensationnalisme. Assisterons-nous à la même chose au sujet du drame ayant eu lieu à bord d’un sous-marin nucléaire russe, le 1er juillet?

Pour le moment, on ne sait que très peu de choses sur l’incendie qui s’est déclaré à bord de ce sous-marin de « recherches », si ce n’est que 14 membres de son équipage y ont laissé la vie pour avoir été intoxiqués par les émanations dues au feu.

D’après le ministère russe de la Défense, ce sous-marin effectuait des « mesures bathymétriques » dans les eaux territoriales russes au moment du drame. Ce que l’on ne peut pas vérifier. Comme il est aussi impossible de confirmer si ce submersible a bel et bien rejoint la base navale de Severomorsk mais le port de Gadzhiyevo, situé à 20 km de distance.

Le communiqué publié par les autorités russes ayant évoqué un « sous-marin de recherche » [ce qui exclut de facto les SNA et autres SNLE], il est probable que le submersible en question soit utilisé pour des missions « spéciales ».

Quelques journaux russes ont évoqué la piste du sous-marin AS-12 « Losharik » [projet 10831], un navire qui, affichant 2.000 tonnes de déplacement pour une longueur de 78 mètres, a la particularité de pouvoir être mis en oeuvre depuis un « vaisseau-mère », en l’occurrence le BS-136 Orenbourg ou le BS-64 Podmoskovye, deux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] de la classe Delta III transformés à cet effet. L’un de ses deux bâtiments a été d’ailleurs repéré au large des côtes françaises en 2016.

À noter que l’AS-12 Losharik n’est pas le seul sous-marin nucléaire russe de « recherche » pouvant être mis en oeuvre par un « vaisseau-mère » : ceux de la classe « Paltus » [projet 1851] fonctionnent de la même manière.

D’autres sources, cités par d’autres titres de la presse russe, ont indiqué que l’incendie s’était déclaré à bord de l’un de ses « vaisseaux-mères », à savoir le BS-136 Orenbourg. Mais visiblement, rien ne peut être avancé avec certitude.

Cela étant, commentant cette tragédie, le président russe, Vladimir Poutine, a donné deux indications. « Ce n’est pas un vaisseau ordinaire, comme nous le savons il s’agit d’un vaisseau de recherche scientifique, avec un équipage très professionnel », a-t-il admis.

Puis, a continué le chef du Kremlin, 7 « capitaines de premier rang », [c’est à dire des capitaines de vaisseau] dont 2 « héros de la Russie », figurent parmi les 14 victimes. Ce qui est évidemment inhabituel pour un équipage classique de sous-marin. « C’est une grande perte pour la marine, et pour l’armée dans son ensemble », a dit M. Poutine.

D’après l’examen des avis d’obsèques, la presse russe a déterminé que les deux « héros de la Russie » morts dans l’incendie étaient les capitaines de vaisseau Denis Dolonsky et Nikolaï Filin. Le premier aurait été le commandant du sous-marin AS-12 Losharik tandis que le second était un « testeur d’équipements militaires en eaux profondes ». Un troisième officier a ensuite été identifié : il s’agit du capitaine de vaisseau Andreï Voskresensky. Puis, via le réseau social russe VK et Twitter, les photographies des 14 victimes ont été diffusées.

En outre, les autorités norvégiennes ont indiqué avoir été informées par leurs homologues russes d’une « explosion de gaz à bord d’un sous-marin. »

« Nous attendons des informations du côté russe pour savoir s’il y avait un réacteur [nucléaire] à bord du sous-marin », a affirmé Per Strand, directeur de l’Autorité norvégienne de radioprotection et de sûreté nucléaire. Et de préciser qu’aucune « augmentation du taux de radiation » n’avait été constatée. Le fait que la Norvège ait été informée donne une indication plus précise de la position où a eu lieu le drame…. D’où sans doute le démenti apporté par Moscou aux affirmations norvégiennes.

Quoi qu’il en soit, il sera compliqué d’en savoir plus. En effet, le Kremlin a annoncé, ce 3 juillet, que les informations relatives à cette tragédie seront classifiées.

« Cette information ne peut être rendue totalement publique. Elle se trouve dans la catégorie du secret d’État », a en effet indiqué Dmitri Peskov, le porte-parole le la présidence russe. « Pour autant, l’état-major des forces armées russes dispose d’une information complète » sur la tragédie, a-t-il ajouté.

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