Les Nations unies demandent à la Russie de se justifier au sujet des bombardement d’hôpitaux en Syrie

Échappant au contrôle du régime syrie, la province d’Idleb, tenue en grande partie par l’organisation jihadiste Hayat Tahrir al-Cham, est la cible de fréquents raids aériens depuis la fin du mois d’avril. Et, depuis, selon des chiffres livrés par les Nations unies, au moins 23 hôpitaux et une ambulance ont été touchés. Et environ 330.000 personnes ont quitté leurs foyers.

Depuis le début du conflit syrien, les centres médicaux ont régulièrement été visés lors des combats. Ainsi, 329 cas avaient recensés entre mars 2011 et novembre 2015 par l’ONG Physicians for Human Rights, qui, il y a trois ans, avait accusé le régime syrien de cibler délibérément les hôpitaux. Ce qui constitue un crime de guerre.

Lors des combats pour le contrôle de la ville d’Alep, en 2016, d’autres bombardements d’hôpitaux furent signalés. Et leur caractère délibéré ne pouvait qu’être difficilement mis en doute étant donné leur fréquence. Et la Russie, présente militairement en Syrie depuis septembre 2015, fut interpellée.

« J’appelle la Russie à prendre ses responsabilités. Les bombardements des hôpitaux sont des crimes de guerre, est-ce que la Russie acceptera de porter la responsabilité de tels actes insupportables? », avait en effet déclaré Jean-Marc Ayrault, alors ministre français des Affaires étrangères, en octobre 2016.

À l’époque, Moscou avait réfuté toute responsabilité pour les bombardements d’hôpitaux. « Nous rejetons formellement de telles déclarations que nous n’acceptons pas […] Les gens qui font de telles déclarations sont chaque fois incapables de les prouver », avait rétorqué Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin.

Trois ans plus tard, donc, des hôpitaux sont de nouveau pris pour cibles dans la province d’Idleb alors que leurs coordonnées ont été communiquées aux forces russes et syriennes en vue d’empêcher leur éventuel bombardement. D’où les explications demandées par le britannique Sir Mark Lowcock, le secrétaire général adjoint des Nations unies pour les Affaires humanitaires.

« Je ne suis pas sûr » que donner leurs coordonnées a protégé ces hôpitaux, a dit M. Lowcock devant le Conseil de sécurité de l’ONU, lors d’une réunion dédiée à la situation en Syrie. « La grande question est de savoir ce que les gens qui reçoivent les données de localisation des infrastructures médicales en font. J’ai écrit à la Russie pour savoir comment sont utilisées les informations transmises » a-t-il ensuite précisé.

Le général russe Alexey Bakin, le chef du « Centre russe pour la réconciliation des belligérants », n’a pas manqué de réagir aux propos du responsable de l’ONU. « Nous démentons catégoriquement toutes ces supputations qui affirment que les forces gouvernementales mèneraient des frappes aveugles sur Idleb. Nous regrettons que les ONG anti-syriennes répandent de fausses informations, trompant ainsi la communauté internationale et protégeant de fait les terroristes de Hayat Tahrir al-Cham », a-t-il fait valoir.

Seulement, l’objectivité du général russe a été remise en cause par François Delattre, le représentant de la France à l’ONU. « Le Centre russe pour la réconciliation n’est ni un acteur humanitaire ni une agence onusienne, c’est une émanation du ministère de la Défense russe qui est une partie active au conflit », a-t-il rappelé. Et le Royaume-Uni et l’Allemagne ont embrayé en parlant de « conflit d’intérêt ».

« Notre délégation n’a jamais remis en question les intervenants proposés », a rétorqué Vassily Nebenzia, l’ambassadeur russe auprès de l’ONU. « Si les délégations souhaitent se lancer dans ce jeu, nous sommes prêts à y jouer à l’avenir », a-t-il ajouté.

En attendant, a rappelé David Lillie, directeur de l’ONG Syrian American Medical Society, cité par l’AFP, « 1.200 travailleurs humanitaires ont péri en Syrie depuis le début du conflit ». Et de réclamer des enquêtes sur ces bombardements d’hôpitaux. Ce qui n’est pas gagné…

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