Malgré sa participation au programme « SCAF », l’Espagne s’intéresse toujours à l’avion F-35

À l’occasion du salon de l’aéronautique et de l’espace du Bourget, la ministre espagnole de la Défense, Margarita Robles, signera l’accord qui officialisera la participation de l’Espagne au programme « SCAF » [Système de combat aérien du futur], lancé en juillet 2017 par la France et l’Allemagne.

Cependant, la mise en service du SCAF, qui vise à mettre en réseau plusieurs aéronefs et systèmes autour d’un avion de combat [le NGF, pour New Generation Fighter] devrait se faire à l’horizon 2035/40. Or, l’Ejército del aire [force aérienne] et l’Armada Española [marine] ont un besoin impératif de remplacer leurs chasseurs-bombardiers les plus anciens.

Ainsi, les F/A-18A Hornet de l’ALA 46 [escadre], basée aux Canaries, prélevés sur des stocks américains dans les années 1980, arriveront au bout de leur potentiel en 2025. Et la même question se posera pour la soixantaine d’avions du même type acquis ultérieurement par l’Ejército del aire.

L’aviation militaire allemande a exactement le même problème avec ses vieux Panavia Tornado, dont le maintien en service est de plus en plus coûteux. Et c’est la raison pour laquelle l’un de ses anciens chefs d’état-major avait défendu l’idée d’acquérir des F-35A du constructeur américain Lockheed-Martin. Idée qui fut vivement contestée par Airbus Defence & Space… Pour le moment, même ce n’est pas encore officiel, la piste d’un achat d’Eurofighter Typhoon de la tranche 4 tient la corde. En sera-t-il de même pour l’Espagne? Rien n’est moins sûr.

En effet, Madrid doit aussi composer avec les besoins de l’Armada Española, qui met en oeuvre une douzaine d’avions AV-8 Harrier II depuis le porte-aéronefs Juan Carlos I. Et là, le SCAF ne pourra être la solution puisqu’il ne prévoit pas le développement d’une version STOVL [short take off vertical landing / décollage court et atterrissage vertical] du NGF.

Or, le seul avion actuellement sur le marché qui peut remplacer l’AV-8 Harrier II est le F-35B, c’est à dire la version STOVL de l’appareil de Lockheed-Martin. D’où, d’ailleurs, le fait que le constructeur américain a fait de l’Espagne l’une de ses « cibles » prioritaires.

« D’un point de vue technique, c’est une option [le F-35B] très intéressante pour nous. Le problème est le coût. Pour nous, la version [B] serait, à ma connaissance, à 100 millions de dollars et la version [A] à 80 millions de dollars. Nous parlons de prix élevés », a commenté un officier espagnol, dont les propos ont été recueillis par Defense News, lors du salon FEINDEF, organisé en mai dernier à Madrid.

Responsable de la division des plans à l’état-major de l’Ejército del aire, le général Juan Pablo Sanchez de Lara a laissé entendre que la porte n’est pas non plus fermé à Lockheed-Martin pour le remplacement de l’ensemble de la flotte des F/A-18. Du moins, ce ne sera pas forcément du « tout cuit » pour le consortium Eurofighter.

Qui plus est, l’Ejército del aire et l’Armada Española coopèrent actuellement sur la définition d’un programme « potentiellement commun ». Ce qui fait dire à Defense News que le « F-35 est sur la table. »

Si Madrid se laisse tenter par le F-35, quelles seront les implications pour le SCAF, notamment pour ce qui concerne la connectivité?

Côté français, cette question est l’un des défis qu’il faudra relever. « Le développement d’un protocole de connectivité convergent est évidemment un des enjeux du SCAF. Il est en effet aujourd’hui nécessaire de développer en Europe un système intéropérable, avec nos alliés, et ce dès le début du projet. Et de ne pas bâtir, comme certains pays ont pu le faire, un système fermé pour lequel toute interaction nécessiterait la mise en œuvre de passerelles complexes », a ainsi récemment expliqué le général Philippe Lavigne, le chef d’état-major de l’armée de l’Air [CEMAA], lors d’une audition parlementaire.

Et d’ajouter : « Ainsi ce système sera, tel le système d’exploitation mobile Android, un système ouvert dont le protocole pourra être partagé rapidement avec les Américains afin de communiquer et d’être interopérable immédiatement. »

En attendant, le F-35A a déjà son apparition en Espagne. Deux exemplaires de l’US Air Force viennent de participer au Tactical Leadership Programme [TLP], à Albacete. Un « évènement » qui a été abondamment commenté par la presse ibérique…

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