L’État islamique revendique une première attaque au Mozambique

Depuis la fin de l’année 2017, la province de Cabo Delgado, située dans le nord du Mozambique, vit au rythme d’attaques attribuées au groupe jihadiste Ahlu Sunnah wal Jamaa [les « adeptes de la tradition du prophète »], aussi surnommé « al-shabab » par la population locale.

Le mode opératoire de cette organisation n’est pas sans rappeler celui de la faction du groupe jihadiste Boko Haram, dirigée par Abubakar Shekau. En effet, ses combattants arrivent dans un village, pillent ce qu’ils peuvent, incendient les maisons, décapitent les hommes et kidnappent les femmes. Des milliers ont été contraintes à l’exode et, en février dernier, on comptait plus de 200 victimes.

« Ces attaques visent autant les personnes publiques [bâtiments publics, forces de sécurité] que les populations civiles [décapitations, kidnapping] et les expatriés [attaque du convoi de l’entreprise américaine Anadarko le 21 février sur la route entre Mocimboa et Palma] », résume une note du ministère français des Affaires étrangères.

Le président du Mozambique, Filipe Nyusi, a ordonné le déploiement de renforts militaires et policiers dans la province de Cabo Delgado. Mais sans résultat pour le moment. Même le passage du cyclone Kenneth, fin avril, n’a pas fait baisser le rythme des attaques, lesquelles perturbent les opérations humanitaires dans la région.

L’origine d’Ahlu Sunnah wal Jamaa remonterait aux années 2000, avec la création d’Ansaru Sunnu, une sous-organisation du Conseil islamique de Cabo Delgado. Prêchant une application stricte des préceptes de l’islam, cette structure a fait construire de nouvelles mosquées dans la région. Puis est apparue une « secte » encore plus radicale, qui a vraisemblablement fourni les cadres à ce groupe jihadiste.

Quoi qu’il en soit, l’État islamique [EI] semble s’intéresser de près à la situation du Mozambique, pays qui compte environ 18% de musulmans et 56% de chrétiens parmi sa population. En effet, via un communiqué reperé par SITE Intelligence Group, qui surveille les activités jihadistes sur Internet, l’organisation a affirmé que ses combattants ont récemment affronté l’armée mozambicaine dans la province de Cabo Delgado.

« Les soldats du Califat ont pu repousser une attaque de l’armée mozambicaine des croisés dans le village de Metubi, dans la région de Mocimboa », a affirmé l’EI. « Ils les ont affrontés avec une variété d’armes, tuant et blessant un certain nombre d’entre eux […]. Les moujahidines ont saisi des armes, des munitions et des roquettes comme butin », a-t-il ajouté.

Les autorités du Mozambique n’ont ni infirmé, ni comfirmé les allégations de l’EI. Cela étant, elles ne font pratiquement jamais de commentaires sur la situation dans le nord du pays.

Selon un expert sollicité par l’AFP, cette affirmation de l’EI reléverait d’une opération de propagande.

« L’Etat islamique n’est pas au Mozambique, c’est simplement de la propagande, mais ils ont peut-être des liens au Mozambique », a-t-il dit. En effet, dans son communiqué, l’organisation jihadiste a fait une erreur dans la localisation du village de Metubi, assurant que ce dernier se trouvait dans la région de Mocimboa, alors que, en réalité, il en est éloigné d’une centaine de kilomètres.

Cela étant, la défaite qu’il a subie à Baghouz, face aux Forces démocratiques syriennes [FDS], appuyées par la coalition dirigée par les États-Unis, ayant marqué la fin de son califat, l’EI a revendiqué les attentats de Pâques au Sri Lanka, affirmé avoir établi une « province » au Cachemire et assuré que sa filiale « Afrique centrale » a mené ses premières opérations en République démocratique du Congo.

C’est d’ailleurs la branche « EI – Afrique centrale » qui a revendiqué l’attaque de Metubi. En outre, et comme le rappelle le journaliste Wassim Nasr via Twitter, l’EI a déjà publié une photographie affirmant montrer des hommes armés prendre la pose devant son drapeau au Mozambique.

Reste que, étant donné le mystère qui l’entoure, on ignore si « Ahlu Sunnah wal Jamaa » a fait allégeance à l’EI ou si l’organisation d’Abu Bakr al-Bagdhadi dispose d’une cellule indépendante dans ce pays.

En attendant, l’instabilité dans le nord du Mozambique inquiète les groupes pétroliers implantés dans ce pays afin d’exploiter des gisements de gaz prometteurs [9e réserves au monde], à la condition d’y réaliser des investissements massifs [50 milliards de dollars].

En février, Washington a proposé aux autorités mozambicaines une assistance militaire. « Nous sommes disponibles pour aider le Mozambique a combattre ces groupes d’insurgés. […] Nous souhaitons accroître notre coopération bilatéral », a en effet assuré Bryan Hunt, le numéro deux de l’ambassade des États-Unis à Maputo.

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