L’armée de l’Air pourrait changer de nom

La militarisation des activités dans l’espace a commencé dès le début de la conquête spatiale, Sputnik, le premier satellite placé en orbite ayant été lancé par missile balistique intercontinental soviétique R-7 Semiork. Depuis, que ce soit pour le renseignement, l’observation, la géolocalisation ou bien encore les télécommunications, l’espace est devenu incontournable pour les opérations militaires.

Cela étant, depuis quelques années maintenant, le fait nouveau est que l’on assiste à une « arsenalisation » de l’espace. Et le récent test d’un missile anti-satellite effectué par l’Inde le démontre, comme la mise au point d’engins dit manoeuvrants, d’armes à effet dirigé, à impulsion électromagnétique ou à micro-ondes de forte puissance.

Désormais, l’espace est un potentiel champ de confrontation, malgré le Traité sur l’espace de 1967 qui, il est vrai, n’interdit que la mise sur orbite d’armes de destruction massive [mais pas leur transit].

Pour prendre en compte cette nouvelle donne, la France entend se doter d’une stratégie spatiale, laquelle devrait être bientôt dévoilée par le président Macron. Toutefois, selon de récents rapports et propos tenus par la ministre des Armées, Florence Parly, il serait question de développer de nouvelles capacités.

« Nous allons continuer à avoir une stratégie défensive [dans l’espace] mais nous ne nous interdisons pas d’avoir une stratégie plus offensive », a ainsi indiqué Mme Parly, en avril dernier. Plus tôt, les députés Olivier Becht et Stéphane Trompille avaient évoqué, dans un rapport dédié à cette question, la possibilité de doter la France de « moyens » visant à lui permettre d’exercer son « droit de légitime défense » dans l’espace.

Quoi qu’il en soit, cette arsenalisation de l’espace a conduit l’administration Trump à proposer la création d’une sixième branche des forces armées américaines dédiée aux opérations spatiales. Cette dernière serait placée sous l’autorité du secrétaire à l’US Air Force.

Par ailleurs, en Russie, il existe un haut commandement des Forces aérospatiales, lequel regroupe la Force aérienne, la Force spatiale et les Troupes de défense antiaérienne et protection antimissile. S’agissant de la Chine, la « Force du soutien stratégique de l’Armée populaire de libération », mise en place en 2015, est responsable des opérations spatiales mais auss des missions dans les domaine Cyber et la guerre électronique.

En France, l’organisation des activités spatiales militaires respose sur le « Commandement interarmées de l’espace » [CIE], lequel s’appuie sur quatre bureaux [politique spatiale et coopérations, préparation de l’avenir, emploi et coordination et maîtrise de l’environnement spatial] ainsi que sur 6 sections [observation, écoute, surveillance de l’espace, alerte, télécommunications et navigation-positionnement-datation] et un centre d’opérations espace.

La stratégie pour l’espace annoncée va-t-elle remettre en cause cette organisation? En tout cas, le chef d’état-major de l’armée de l’Air [CEMAA], le général Philippe Lavigne, s’emploie depuis quelques mois à souligner l’importance du rôle des aviateurs dans le domaine spatial.

« L’espace est pour l’aviateur la prolongation évidente du milieu aérien », avait ainsi fait valoir le CEMAA, en octobre dernier, après avoir rappelé aux parlementaires les responsabilités assumées par l’armée de l’Air en matière de surveillance de l’espace, via le centre opérationnel de surveillance militaire des objets spatiaux [COSMOS].

« Dans ce domaine spatial, l’armée de l’Air a fortement investi, et dispose aujourd’hui de nombreux atouts à valoriser, notamment en personnel. Notre personnel est motivé, passionné et volontaire. La totalité des officiers est formée à l’espace, dès l’École de l’air de Salon-de-Provence. Voici un chiffre à retenir : deux tiers des militaires des armées spécialistes de l’espace sont des aviateurs, alors que nous sommes presque devenus, en volume d’effectifs, presque la plus petite des armées », avait encore insisté le général Lavigne, avant de faire remarquer que, parmi les spationautes français, quatre sont (ou ont été) des officiers de l’Air.

Lors de son dernier passage devant la commission de la Défense, à l’Assemblée nationale, le 15 mai, le général Lavigne est revenu sur cette question. Et quand des députés lui ont demandé si l’armée de l’Air serait « prête à changer de nom pour devenir l’armée de l’Air et de l’espace » et qu’un tel changement de dénomination est « bien envisagé dans les réflexions stratégiques en cours sur la défense spatiale », il n’a pas démenti.

« Pour ce qui nous concerne, je ne peux pas vous dire si l’armée de l’air s’appellera demain ‘armée de l’Air et de l’espace’ car nous attendons les décisions du président de la République, mais soyez assurés que le ministère des Armées continue à travailler aux questions de défense spatiale », a répondu le CEMAA dans un premier temps. « Je n’en dirai pas plus, si ce n’est que j’en rêve! », a-t-il ajouté plus tard.

Photo : #1 armée de l’Air #2 Mini-Lanceur aéroporté, destiné à équiper un Rafale (c) Dassault Aviation

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]