Signataire de l’accord de paix, le groupe armé centrafricain 3R a (déjà) renoué avec la violence

Dans le cadre l’accord de paix pour la Centrafrique, signé le 6 février à Khartoum, sous l’égide de l’Union africaine [UA], plusieurs cadres de groupes armés ont obtenu des postes officiels au sein de l’exécutif centrafricain.

Ainsi, trois importants chefs rebelles ont été nommés « conseillers spéciaux militaires » auprès du Premier ministre, dont Ali Darassa, de l’Union pour la paix en Centrafrique [UPC], Mahamat Alkatim du Mouvement patriotique pour la Centrafrique [MPC], dont la dérive sectaire avait été dénoncée par le Haut-Commissariat aux réfugiés, et Bi Sidi Souleymane [alias Sidiki], du groupe 3R [Retour, réclamation, réconciliation], une organisation apparue en 2015 pour défendre la communauté peule.

Il a souvent été question de ces groupes armés, en raison des exactions dont ils se sont rendus coupables au cours de ces dernières années. Et visiblement, accord de paix ou pas, ce n’est pas terminé.

Ainsi, ces derniers jours, au moins 33 civils ont été tués dans plusieurs attaques attribuées au groupe 3R et apparemment coordonnées dans les environs de la ville de Paoua, dans le nord-ouest du pays, près de la frontière avec le Tchad.

La première attaque a visé des réunions organisés à Koundjili et à Lemouna. « Des criminels sont arrivés et ont ouvert le feu » sur les habitants, a raconté le général Pascal Champion, le chef de la composante « police » de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation de la République centrafricaine [MINUSCA].

Au total, 31 personnes y ont laissé la vie. « Le député suppléant de Paoua et le directeur de l’école du village de Lemouna et deux enseignants figureraient parmi les victimes. Certaines victimes ont été ligotées avant d’être tuées. Trois personnes auraient également été blessées au cours de ces attaques. Les éléments des 3R ont aussi incendié trois maisons et emporté des bœufs appartenant aux populations », a précisé la MINUSCA.

En outre, trois autres personnes ont été tuées vers Bohong, après le vol, quelques heures plus tôt, de 400 têtes de bétail.

Une autre attaque, non confirmée pour le moment par la MINUSCA, aurait fait 15 tués à Maikolo, un village occupé pendant trois jours par des combattants du groupe 3R.

« La MINUSCA condamne avec la dernière énergie ces tueries », a réagi Mankeur Ndiaye, le représentant du secrétaire général des Nations unies en Centrafrique, Mankeur Ndiaye. « Les auteurs de tels crimes seront recherchés, arrêtés et traduits devant la justice », a-t-il assuré.

Le chef des opérations de la MINUSCA, le colonel Sow, est allé plus loin que la simple condamnation de ces attaques, en évoquant un « acte terroriste. »

« Il n’y a pas de base des 3R dans les environs de la tuerie, cela signifie qu’ils sont venus de loin, et ils ont agi presque simultanément sur différents sites, donc on peut parler d’attaques coordonnées », a fait valoir l’officier.

« La MINUSCA est particulièrement indignée par le caractère cruel et délibéré de ces attaques qui, en plus d’être planifiées et coordonnées, témoignent de l’intention des auteurs à infliger des atrocités entrainant la mort d’une large partie de la population présente dans les villages de Koundjili, Ndjondjom et Bohong. Il s’agit-là d’éléments constitutifs de crimes graves impliquant à la fois la responsabilité de leurs auteurs et du commandement des 3Rs sous la direction de ‘Sidiki' », a expliqué la mission des Nations unies.

Aussi, cette dernière a exigé de ce « conseiller spécial militaire » du Premier ministre « l’arrestation et la remise des auteurs à la justice centrafricaine et le démantèlement de ses bases de Letele et Boucaya. »

Le gouvernement centrafricain s’est associé à cette exigence exprimée par la MINUSCA. Ainsi, a indiqué Ange Maxime Kazagui, le ministre de la Communication, Sidiki a « 72 heures » pour arrêter les auteurs de ces attaques. Faute de quoi, il sera « tenu pour responsable de ces actes. » Quoi qu’il en soit, et comme le disait Raymond Barre, « on ne déjeune pas avec le diable, même avec une très longue cuillère. »

Photo : archive

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