La Chine n’aurait actuellement pas la capacité de mener une opération amphibie massive contre Taïwan

Le 2 janvier, le président de la République de Chine [RPC], Xi Jinping, a de nouveau évoqué la perspective d’une opération militaire contre Taïwan, pays considéré par Pékin comme étant une « province rebelle ». Ainsi, a-t-il déclaré, « nous ne promettons pas de renoncer au recours à la force et nous nous réservons le droit de prendre toutes les mesures nécessaires à l’encontre des forces extérieures [dont les États-Unis, qui soutiennent Taipeh, ndlr] et des actions indépendantistes et séparatistes. »

On ne saurait être plus clair. Selon Taipeh, une action militaire chinoise pourrait prendre la forme d’une vaste opération amphibie, d’un blocus aérien et naval ou d’un de tirs de missiles. Et les forces armées taïwanaise prennent évidemment en compte tous ces scénarios dans leur préparation opérationnelle ainsi que dans leurs programmes d’armement.

Pour autant, une opération amphibie majeure chinoise paraît bien incertaine en l’état actuel des choses. Certes, la Chine a investi dans une flotte des navires de type LPD [Landing Platform Dock ou, en français, transport de chalands de débarquement].

Ainsi, la composante navale de l’Armée populaire de libération [APL] dispose actuellement de 6 bâtiments de la classe Yuzhao [Type 071], capables d’embarquer jusqu’à 800 soldats de l’infanterie de marine, jusqu’à 6 hélicoptères Z-18 et entre 15 à 20 véhicules de combat amphibie pouvant être acheminés à terre par 4 aéroglisseurs Type 726 [classe Yuyi]. Deux autres navires de Type 071 sont par ailleurs en cours de construction.

Pour le Pentagone, qui a remis au Congrès, au début de ce mois, son rapport annuel relatif au développement des capacités militaires chinoises [.pdf], l’APL n’aurait pas les moyens de se lancer dans une opération amphibie majeure contre Taïwan. Du moins pour le moment.

En effet, la mise en service des navires de Type 071 vise surtout à doter la composante navale de l’APL d’une capacité « expéditionnaire » outre-Mer et non dans les « eaux vertes » [c’est à dire territoriale ou proche, en opposition aux « eaux bleues », lontaines]. Ce qui est assez logique au regard du projet de « nouvelles routes de la soie » porté par Pékin.

Même si, selon l’adage, « qui peut le plus peut le moins », il n’en reste pas moins que l’APL ne disposerait pas suffisamment d’embarcations de type Landing Ship Tank [LST ou bâtiment de débarquement de chars] pour envisager une opération amphibie sur les plages taïwanaises. A priori, elle en compterait une petite dizaine [de type 072III]. Et, d’après le rapport du Pentagone, rien n’indique que Pékin ait des plans pour accroître significativement le nombre de bateaux de ce type dans un avenir immédiat, la priorité allant aux navires de type 071.

La même source estime ainsi que, avec la mise en service du véhicule de combat amphibie ZBD-05 ou de l’obusier automoteur PLZ-07B, l’APL « continue de faire des gains modestes » en matière d’opérations amphibies en « développant des capacités supplémentaires » devant lui permettre « de s’emparer et de contrôler de petites îles. » Actuellement, elle ne compterait que 12 unités destinées à mener des interventions de ce type.

Le rapport note également que, depuis l’arrivée de l’avion de transport Y-20, les forces armées chinoises ont accentué leurs efforts dans le domaine des opérations aéroportées, notamment afin d’être en mesure de prendre contrôle d’installations clés en coordination avec un assaut amphibie.

Cependant, avance le Pentagone, les exercices observés ont été menés au niveau du bataillon. Et les unités d’infanterie de marine chinoise récemment constituées « n’ont pas reçu l’ensemble complet des équipements requis et ne sont pas
pleinement opérationnelles ». Seulement deux d’entre-elles le seraient.

Quoi qu’il en soit, il serait de toute façon hasardeux pour Pékin de lancer une opération amphibie majeure contre Taïwan. Les conditions métérologiques dans le détroit de Formose ne seraient optimales qu’en avril ou en octobre et les préparatifs pour une intervention de grande envergure passeraient difficilement inaperçus. Et même si elle est précédée par des bombardements et/ou des tirs massifs de missiles, les forces taïwanaises auraient le temps de s’organiser (rappel des réservistes, camouflage des unités, etc…) et de préparer un « comité d’accueil » sur les 13 plages de l’île où les forces chinoises pourraient débarquer.

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