Le renseignement militaire néerlandais met en garde contre la menace russe aux frontières de l’Europe

Pour le Militaire Inlichtingen- en Veiligheidsdienst [MIVD], c’est à dire le renseignement militaire néerlandais, il ne fait aucun doute que la Russie a développé un missile dont les caractéristiques enfreignent le Traité sur les forces nucléaires intermédiaires [FNI], signé par Moscou et Washington en 1987.

Mais, dans le rapport qu’il vient de publier, le MIVD n’en est pas surpris car cela la mise au point de ce missile, tout comme, d’ailleurs, les actions de la Russie à la périphérie de l’Otan, comme dans le sud-est de l’Ukraine, s’inscrivent dans « une tendance qui dure depuis plus de dix ans. »

Aussi, estime le MIVD, « l’image qui en ressort est préoccupante », dans la mesure où la Russie incarne « une menace contre les intérêts alliés et européens » qui prend plusieurs formes, c’est à dire via des opérations hybrides, l’espionnage et les cyber-opérations. Et le tout accompagné par une « modernisation et une expansion de l’armement conventionnel » russe.

Le rapport avance que la conception russe en matière de sécurité repose sur une « approche à sommes nulles », c’est à dire que pour que la sécurité de la Russie s’améliore, il faut que celle de ses « adversaires » [ou du moins des pays qu’elle perçoit comme tels] se dégrade. Aussi, c’est pourquoi Moscou s’emploie « à affaiblir radicalement la structure de sécurité européenne », explique le MIVD. La remise en cause du traité FNI en est un exemple.

En outre, poursuit-il, le Kremlin estime qu’un certain nombre de pays d’Europe orientale, dont des membres de l’Otan, devraient appartenir à la sphère d’influence russe. Aussi, écrit MIVD, Moscou « déploie déjà des moyens », notamment dans le domaine des opérations hybrides, « pour atteindre cet objectif. »

Pour le moment, note le rapport, il ne serait pas dans l’intention du Kremlin d’avoir recours à des moyens strictement militaires pour atteindre ses buts. « Cependant, poursuit-il, il est inquiétant que, contrairement à il y a dix ans, de voir la Russie disposer de moyens militaires pour lancer et mener à bien une opération aux objectifs géographiques limités contre l’Otan. »

« Au cours des dix dernières années, la Russie a considérablement amélioré ses forces conventionnelles et nucléaires, tant en termes quantitatifs que qualitatifs » et « au niveau régional, elle dispose non seulement de plus de moyens », qui plus est « variés ».

« Par conséquent, il sera difficile pour l’Occident de trouver une réponse appropriée aux actions russes, principalement mais pas exclusivement, dans le domaine militaire », estime le MIVD. En effet, ajoute-t-il, il « existe un risque de sous-réponse [expansion rampante de la Russie] ou de sur-réponse [escalade]. »

Pour le renseignement militaire néerlandais, la Russie dispose de plusieurs atouts à mettre sur la table, dont une certaine supériorité militaire [l’équipement des ses forces armées est « parfois plus moderne que celui de l’Otan » et ses personnels sont mieux entraînés, dit-il], la capacité d’exercer des pressions politiques, un processus de décision rapide et la possibilité de concentrer des troupes sur le flanc oriental de l’Alliance à très court préavis.

S’ajoute à cela la capacité de A2/AD [anti et déni d’accès] que les forces russes peuvent déployer dans la région de la Baltique et dans celle de la mer Noire. En outre, le rapport néerlandais avance que le Kremlin « peut menacer d’utiliser des armes nucléaires tactiques et éventuellement même de les déployer à des fins démonstratives afin de forcer la partie adverse à se mettre à la table des négociations ou pour attaquer [l’alliance]. » Enfin, il s’inquiète aussi du « cyber arsenal russe », qui permettrait d’effectuer des opérations d’espionnage, de sabotage et de désinformation, avec un « cycle de planification court ».

Cela étant, le MIVD pense que la Russie fera preuve de prudence dans ses actions à l’égard de l’Europe… Du moins tant que les États-Unis assureront cette dernière qu’ils viendront à sa rescousse le cas échéant. En réalité, tout dépendra de la solidité du lien transatlantique.

« La Russie ne lancera une opération militaire contre l’Otan que si elle estime qu’un intérêt essentiel à sa sécurité est immédiatement menacé ou si ses dirigeants pensent qu’il est possible d’empêcher une réponse concertée de l’Otan. C’est là que la guerre hybride joue un rôle important », poursuit le MIVD.

Enfin, le renseignement militaire néerlandais a également relevé que, via des sociétés militaires privées, la Russie s’est impliquée en dehors de ses zones d’intérêt traditionnelles, comme en Afrique, en Amérique latine et en Asie-Pacifique. Et cela « vise principalement à soutenir les régimes, les partis et les tendances qui soutiennent directement ou indirectement l’agenda russe. »

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