Bientôt des ballons et des dirigeables pour l’Aviation légère de l’armée de Terre?

Le 26 juin 1794, les armées de la jeune République française remportèrent une victoire décisive contre les forces commandées par le prince Frédéric de Saxe-Cobourg à Fleurus. Et, lors de cette bataille, des moyens aériens furent mis en oeuvre pour la première fois, les Français ayant utilisé le ballon d’observation « L’Entreprenant », capable d’élever à 500 mètres d’altitude une nacelle occupée par deux hommes. Pour communiquer avec le sol, ces derniers utilisaient les pavillons du code de signalisation maritime ou faisaient glisser le long d’un câble un sac contenant des notes.

La compagnie d’Aérostiers, créée le avril 1794 [qui sera dissoute en 1802, ndlr], est depuis considérée comme étant l’ancêtre de l’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT], qui vit officiellement le jour le 22 novembre 1954. Et, 225 ans plus tard, ballons et dirigeables pourraient faire leur retour au sein des forces françaises.

Lors d’une audition à l’Assemblée nationale, en septembre 2018, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Jean-Pierre Bosser, fit une allusion à une telle éventualité en évoquant l’idée de doter l’ALAT de davantage d’avions légers, afin de réduire le coût de l’heure de vol pour certaines missions qui n’exigent pas forcément l’utilisation d’un hélicoptère.

« S’agissant de la stratégie des voilures fixes, la comparaison du coût de l’heure de vol du NH90 avec celui du Pilatus est sans ambiguïté. De fait, pour certaines missions, on pourrait très bien utiliser un Pilatus pour des missions actuellement conduites avec un NH90. Je suis donc parfaitement d’accord, au point que j’avais envisagé ce sujet en début de loi de programmation et je ne l’ai pas oublié », avait expliqué le général Bosser. Puis, il avait lâché ce détail : « Pas plus que les ballons, puisque nous évoquons la troisième dimension. Il existe donc des perspectives intéressantes sur lesquelles nous travaillons. »

À l’époque, on pensait que le CEMAT évoquait les possibilités offertes par les ballons en matière de transport. Ainsi, le Commandement logistique des forces [COMLOG] avait fait part de son intérêt pour le concept de navette aérienne de transport automatique de containers [NATAC] qui, développé par l’entreprise française Voliris, combine les capacités d’un drone avec celle d’un dirigeable. Mais visiblement, d’autres utilisations sont envisagées… Du moins, ce que suggèrent les propos du général Michel Grintchenko, le commandant de l’ALAT [COMALAT], dans les colonnes du magazine Air Fan.

« Ma vision est que, pour recueillir du renseignement, il faut un vecteur aérien porteur d’un ou de plusieurs capteurs. En fonction de la mission, de la menace, de la météo, du plafond nuageux, ce pourrait être un Rafale, un Atlantique 2, un hélicoptère, un drone lent ou rapide, voire un ballon ou un dirigeable, qui referont probablement surface, car ils offrent des coûts de possession très réduits. Je crois dur comme fer en la complémentarité des différents vecteurs », a expliqué le COMALAT.

« L’idée est d’avoir la même boule optronique sur notre futur drone Patroller, le H160, un avion lent, un ballon ou un dirigeable », a insisté le général Grintchenko. « Ce que nous voulons créer, c’est la capacité à mener une véritable manoeuvre de renseignement multicapteurs. Le Tigre standard 3 pourra directement coopérer avec les drones. Ce sera un bon en avant très appréciale », a-t-il ajouté.

S’agissant des drones tactiques Patroller, qui seront potentiellement armés, les propos du général Grintchenko sont ambigus : ces appareils ne seront pas mis en oeuvre par l’ALAT mais par le 61e Régiment d’Artillerie [RA] de Chaumont. Cependant, la formation aéronautique de ses télépilotes est assurée par l’École de l’ALAT.

Quoi qu’il en soit, l’idée de revenir aux dirigeables pour des missions de renseignement n’est pas nouvelle. Dans les années 1960, aux États-Unis, il y eut le projet Mogul qui a consista à envoyer des ballons-sonde en URSS pour détecter les essais nucléaires soviétiques.

D’autres projets furent lancés par la suite, comme le JLENS [Joint Land Attack Cruise Missile Defense Elevated Netted Sensor System], qui visait à doter l’US Army de 16 aérostats équipés de radars afin de détecter les menaces aériennes [avions, missiles, drones]. Mais la perte de deux engins a visiblement sonné le glas de ce projet, qui aura coûté 2,8 milliards de dollars.

En Europe, l’allemand Zeppelin Luftschifftechnik GmbH a mis au point le Zeppelin NT, dans les années 1990, essentiellement pour des applications civiles.

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