Une attaque jihadiste et des violences inter-ethniques font plus de 60 tués au Burkina Faso

Comme l’a encore souligné le général Frédéric Blachon, le commandant de la force française Barkhane, dans un entretien donné à l’AFP, les violences intercommunautaires constituent une menace majeure pour les pays du Sahel. Et comme les antagonismes entre certaines populations sont anciens, les groupes jihadistes n’hésitent pas à mettre de l’huile sur le feu, enclenchant ainsi un cycle de représailles susceptible de durer longtemps…

« Tout l’art consiste à ne pas tomber dans ce piège. C’est toute l’action que mène une force comme Barkhane en essayant de neutraliser les véritables terroristes et en appuyant tous ceux en charge du développement. Il faut traiter le problème à la racine, pas en soutenant une ethnie ou une communauté particulière », a expliqué le général Blachon.

Au Mali, par exemple, les jihadistes du Front de libération du Macina, lié au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, recrute essentiement parmi la communauté Peule. D’où les représailles commises contre cette dernière par des hommes armés issus des ethnies Dogon et Bambara. Le même phénomène a été constaté dans la région de Ménaka, où le clan « Touareg Doussak », pro-Bamako, est régulièrement attaqué par des groupes armés Peuls, avec le soutien présumé de l’État islamique dans le Grand Sahara [EIGS].

Et un scénario identique est en train de se jouer au Burkina Faso, où le groupe jihadiste Ansarul Islam recrute parmi la communauté peule.

Dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier, une attaque contre le village de Yirgou-Foulbè, situé à environ 200 kilomètres au nord de Ouagadougou, avait ainsi donné lieu des représailles de la communauté Mossis contre la population peule, accusée d’héberger des terroristes. Ces violences firent une quarantaine de tués.

Trois mois plus tard, il s’est passé la même chose. Cette fois, les jihadistes ont attaque le village de Hamkan, dans le nord du pays, non loin de la frontière malienne. Comme à Yirgou-Foulbè, les assaillants ont assassiné le chef religieux de cette localité ainsi que que son fils aîné et son neveu. Des échaffourées ont éclaté entre les communautés du secteur, en particulier à Arbinda, ce qui a entraîné des représaillers de part et d’autres.

« Il y a eu 62 décès. Nous avons 32 morts du fait des terroristes […] Nous en avons 30 qui sont décédées du fait des conflits communautaires, des représailles entre Kouroumba, Peuls, Mossis, etc… », a ainsi annoncé, le 3 avril, Siméon Sawadogo, le ministre burkinabè de l’Administration territoriale. Les jihadistes « ont pourchassé les gens et ont commis des tueries. Les terroristes ont également enlevé neuf personnes qu’ils détiennent », a-t-il précisé.

« Dans cette situation, il y a eu une migration interne qui s’est opérée » avec « des populations déplacés des villages environnants qui se sont retrouvés à Arbinda », a ensuite expliqué le ministre. « La situation sécuritaire est telle que personne n’est à l’abri […]. Un dispositif [de sécurité] supplémentaire a été envoyé à Arbinda », a-t-il annoncé, avant de souligner que « l’intention des terroristes » était « justement de mettre en conflit les différentes communautés qui vivent en symbiose » et d’en appeler « à ne pas tomber dans ce piège. »

Des membres du G5 Sahel, le Burkina Faso est celui dont la position est la plus fragile sur le front du combat anti-jihadiste. Ce pays est régulièrement la cible d’attaques, tant au nord que dans l’est. Pour les groupes armées terroristes [GAT], il a une certaine importance stratégique étant donné que s’y implanter permet d’avoir la main sur les couloirs de trafics et de se donner la possibilité de s’en prendre aux pays voisins, comme la Côte d’Ivoire et le Ghana. D’où l’attention particulière que lui porte la France, via une coopération militaire renforcée.

« On a observé une dégradation de la situation au Burkina Faso de nature à nous inquiéter, car elle nous donne l’indication d’une contagion vers le sud du mouvement jihadiste. Nous avons considérablement renforcé notre coopération avec le Burkina, qui aujourd’hui nous donne des signes de coopération très active. Nous sommes en train d’étudier la manière dont nous allons pouvoir les aider à s’engager aux frontières et sur leur territoire, dans les zones notamment entre le Niger et le Burkina Faso, où l’ennemi est en train d’essayer de s’implanter », avait expliqué, à l’AFP, en mars, le général François Lecointre, le chef d’état-major des armées [CEMA].

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