La « connectivité » sera un enjeu de souveraineté déterminant pour le Système de combat aérien du futur

Programme franco-allemand auquel vient se joindre l’Espagne, le Système de combat aérien du futur [SCAF] vise à développer un « système de systèmes » autour d’un nouvel avion de combat, habité ou non, polyvalent et appelé à succéder au Rafale et à l’Eurofighter Typhoon d’ici 2040. En un mot, un réseau entre différentes plateformes qui pourront être des satellites, des drones, pseudolites, capteurs aéroportés, etc.

Le dernier numéro d’Air Actualités distingue d’ailleurs l’avion de combat du SCAF puisqu’il y est désigné par le sigle NGF, pour New Generation Fighter. Ce sera « un avion doté de fortes capacités de survivabilité et de manoeuvrabilité, faisant appel à des technologies de rupture. [Il] embarquera des capacités d’intelligence artificielle », précise le magazine de l’armée de l’Air.

Viendront s’ajouter des « objets dronisés, plus ou moins autonomes, capables de réaliser des missions de renseignement ou de brouillage des défense ennemies », c’est à dire qu’il s’agira des appareils similaires [dans l’esprit] à ceux développés dans le cadre du concept américain « Loyal Wingman », et dont le programme « Low-Cost Attritable Strike Unmanned Aerial System Demonstration » en est la traduction.

Enfin, des drones de combat [UCAV], dotés d’une « très grande furtivité » seront utilisés pour des missions de renseignement et de frappes. « Leurs caractéristiques leur permettront de s’approcher au plus près des cibles les plus stratégiques et les plus défendues », note Air Actualités.

Mais pour que ce système puisse fonctionner, encore faut-il que ces éléments puissent échanger des informations entre-eux. D’où l’enjeu de la connectivité.

« L’efficacité du système des systèmes réside dans le nombre de vecteurs hétérogènes connectés entre-eux, dans la gestion des données et dans la mise à disposition pertinente de l’information », souligne l’armée de l’Air [à noter que cela concerne aussi l’aéronautique navale, ndlr]. Et c’est sans doute sur ce point précis qu’il faudra s’attendre à quelques difficultés.

En effet, « à l’image d’Internet, cela nécessite au préalable la mise en place d’une norme d’échange adoptée par le plus grand nombre, en particulier par les pays membres de l’Otan. La maîtrise de l’échange des données représente un enjeu de souveraineté, qui ne remet pas en cause l’interopérabilité », explique Air Actualités.

Seulement, en février 2018, Éric Trappier, le Pdg de Dassault Aviation [qui aura son mot à dire sur la connectivité, ndlr] avait soulevé cette question de l’interopérabilité au sein de l’Otan.  » C’est un sujet politique, opérationnel et industriel », avait-il dit, lors d’une audition à l’Assemblée nationale.

En effet, et sachant que la mise en service de l’avion F-35 remet en cause les normes établies de l’Otan en matière d’interopérabilité, « comment fait-on le Cloud tout en étant interopérables avec nos amis américains? », avait demandé M. Trappier.

« Le modèle américain du F-35 casse ces codes et vous dit : ‘il n’y a plus d’interopérabilité, il y a intégration avec le F-35’. C’est à dire que vous êtes Américains ou vous n’êtes pas. C’est proprement scandaleux que l’Otan accepte ça. Normalement, c’est l’interopérabilité et on est train de passer à l’uniformisation et à l’intégration dans les armées américaines », s’était ensuite emporté le Pdg de Dassault Aviation.

La question est importante car, in fine, le SCAF repose avant tout sur cette connectivité : c’est en effet elle qui permettra ce « combat collaboratif », qui donnera aux ailes françaises une supériorité opérationnelle par rapport à ses adversaires potentiels.

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