Paris attend toujours des précisions sur les intentions américaines pour maintenir une présence militaire en Syrie

Après avoir annoncé le retrait des troupes américaines de Syrie, en décembre, le président Trump a finalement consenti à maintenir, pour un « certain temps », un contingent de 200 militaires aux côtés des Forces démocratiques syriennes [FDS, alliance arabo-kurde]. Et, d’après le Washington Post, 200 soldats supplémentaires pourraient rester dans le secteur stratégique d’At-Tanf car situé sur l’axe Damas-Bagdad et près de la frontière jordanienne.

Pour les responsables américains, il n’est pas question que les États-Unis soient les seuls à maintenir une présence militaire dans le nord-est de la Syrie. D’où l’appel aux pays européens membres de la coalition anti-jihadiste pour les accompagner, l’idée étant que ces derniers fournissent jusqu’à 80% des effectifs de cette force qui compterait environ 1.000 soldats.

Évidemment, on peut imaginer que les pays volontaires ne se bousculent pas au portillon et que ceux qui ont déjà envoyé des troupes en Syrie seront les premiers concernés. C’est ainsi le cas de la France, du Royaume-Uni et du Danemark.

Pour rappel, la mission qu’aurait cette force « résiduelle » viserait à dissuader toute offensive turque contre les FDS, dont les milices kurdes syriennnes fournissent le gros des troupes et à empêcher l’éparpillement des combattants de l’État islamique [EI ou Daesh] ainsi que la recomposition de cellules jihadistes. Selon un rapport de l’inspection générale du Pentagone, il faudrait en effet 6 à 12 mois pour que, sans pression militaire, l’organisation terroriste reprenne le contrôle d’un territoire.

La France est donc concernée au premier chef. Et, à l’occasion de son déplacement à Washington, Florence Parly, la ministre des Armées, attendait des précisions sur les modalités de cette force « résiduelle » imaginée par les États-Unis. Et visiblement, elle n’a pas obtenu ce qu’elle était venu chercher.

En effet, lors d’une audition devant la commission des Affaires étrangères, le 20 mars, à l’Assemblée nationale, Jean-Yves Le Drian, le chef de la diplomatie française, a indiqué que l’entretien entre Mme Parly et son homologue américain, Patrick Shanahan, n’avait rien donné de concret.

« Mme Parly s’est rendue aux États-Unis […] pour commencer à discuter avec les Américains et essayer d’avoir des réponses à différentes questions : si d’aventure le dispositif militaire américain se maintient, quels seront les contours de sa présence, quelle sera la mission, quelles seront les capacités, quelle sera la présence au sol? », a d’abord résumé M. Le Drian. Or, a-t-il continué, « nous n’avons pas encore ces réponses-là » alors que « c’est en fonction des réponses qui seront apportées à ces questions que dépendra notre capacité politique à poursuivre le combat contre Daesh. »

« C’est sur les bases d’informations que nous n’avons pas encore […] que le président de la République déterminera le moment venu l’éventualité d’une contribution française. Nous en sommes là », a expliqué le chef du Quai d’Orsay.

A priori, l’entretien téléphonique qu’a eu le président Macron avec le chef de la Maison Blanche, la veille de l’audition de M. Le Drian, n’a rien donné non plus.

Quoi qu’il en soit, la fin du « califat physique » qu’avait proclamé Daesh en juillet 2014 est très proche, les derniers combats se concentrant désormais sur la poche de Baghouz. Ce 21 mars, un média kurde syrien a même annoncé la victoire des FDS, avant d’être finalement démenti peu après.

« La défaite territoriale de Daesh se confirme. […] Tout nous laisse à penser que la défaite définitive pourra être annoncée dans quelques jours », a affirmé M. Le Drian. Mais, a-t-il prévenu, « cela ne veut pas dire qu’on en a fini contre Daesh, qui continuera de menacer notre pays, en Irak, au Levant, avec un mode d’action nouveau, un mode d’action asymétrique à partir d’une situation de clandestinité en grande partie. »

Quant aux FDS, dont il a salué « le courage » et la « persévérance », le ministre français a une nouvelle fois assuré qu’il est « inenvisageable » pour la France de les « abandonner ». Reste donc à voir comment.

En tout cas, le dispositif de la force Chammal [nom de la participation française à la coalition, ndlr] évoluera, quoi qu’il arrive. D’après l’agence Reuters, qui a cité une source militaire le 17 mars dernier, le retrait d’Irak de la Task Force Wagram, c’est à dire le détachement d’artillerie doté de trois CAESAr [Camions équipés d’un système d’artillerie] est « acté ». Après avoir été énormément sollicités, les artilleurs n’ont que très peu tiré lors de la bataille de Baghouz [3/4 missions de tirs en moyenne].

« On va probablement garder une présence aérienne » ainsi qu’une empreinte au sol. Il n’y aura pas de changement de nature ou de volume considérable, car on est dans la continuité de la mission », a ajouté cette source militaire.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]