Le Pentagone aurait privé une « ferme à trolls » russe d’accès à Internet durant les élections américaines de mi-mandat

Inonder les réseaux sociaux d’infox et y créer de faux comptes favorables à Donald Trump, faire en sorte que « hashtags » #Trump2016 et #Hillary4Prison aient le maximum de visibilité, animer de fausses pages dans l’intention de détourner certaines minorités du Parti démocrate et de les inciter à voter pour la candidate écologiste Jill Stein, acquérir des espaces publicitaires à des fins politiques…

Tels sont les actions reprochées à 13 ressortissants russes, mis en examen le 16 février 2018 par Robert Mueller, le procureur spécial américain chargé d’enquêter sur une possible collusion entre l’équipe de campagne de M. Trump et la Russie. Et ce dernier a également mis en cause trois entreprises russes qui ont le point commun d’être partiellement la propriété d’Evguéni Prigojine, un proche du président Poutine, dont Concord Management and Consulting LLC, Concord Catering et l’Agence de Recherche sur Internet [IRA], qui n’est autre qu’une « ferme à trolls ».

Or, selon des informations du Wahington Post, cette dernière entité aurait la cible d’une cyberattaque lancée par le Cyber Command du Pentagone à l’occasion des élections de mi-mandat, organisées le 6 novembre 2018.

Cette cyberattaque a consisté à priver cette « ferme à trolls » de ses accès à Internet pendant que les citoyens américains se rendaient aux urnes. « C’est comme s’ils avaient débranché l’IRA. Ils l’ont éteinte », a confié un responsable au journal.

« Le fait que le processus électoral de 2018 se soit déroulé sans intervention réussie de la Russie n’était pas une coïncidence », a commenté le sénateur Mike Rounds dans les colonnes du quotidien, sans donner plus de détail. « Sans les efforts du Cybercom, il y aurait eu de très graves interférences », a-t-il insisté.

Avant les élections de mi-mandat, Dan Coats, le directeur du renseignement américain, avait fait état d’une « campagne numérique omniprésente » pour tenter « d’affaiblir et de diviser les États-Unis ».

Cela étant, explique le Washington Post, les autorités américaines ont pris un ensemble mesure pour contrer cette influence russe. Et l’opération contre la « ferme à trolls » financée par M. Prigojine en a fait partie. Le patron de la NSA [National Security Agency] et de l’US Cybercom, le général Paul Nakasone, s’est vu fixer comme priorité par James Mattis, alors chef du Pentagone, d’empêcher toute campagne malveillante lors des élections.

Pour mener cette opération, l’US Cybercom a pu s’appuyer sur une ordonnance qui, signée par le président Trump en août, lui donne plus de latitude pour mener des actions offensives en-dessous du seuil d’un conflit armé. En clair, étaient autorisées les cyber-attaques n’étant pas susceptibles de causer des pertes humaines ou d’infliger d’importants dommages.

Cela étant, ce type d’opération ne peut avoir qu’un impact limité étant donné que les opérations d’influence prêtées à la Russie se déroulent sur le temps long. Aussi, pour certains experts et analystes militaires cités par le Washington Post, l’objectif est plus de faire une démonstration de force qu’autre chose.

En revanche, l’opération ayant consisté à envoyer des messages aux trolls et aux pirates informatiques travaillant pour le renseignement militaire russe [GRU] paraît plus efficace… Évoquée pour la première fois par le New York Times en octobre dernier, cette action aurait semé le germe de la défiance au sein de l’IRA, cette dernière ayant a priori ouvert une enquête interne pour identifier une (ou plusieurs) taupe(s) dans ses rangs.

Quoi qu’il en soit, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réagi en affirmant qu’il « y avait en général un nombre énorme d’attaques depuis l’Europe et l’Amérique du Nord contre des organisations, des personnes physiques et civiles [russes]. »

« C’est la réalité dans laquelle nous vivons », a-t-il insisté, avant d’ajouter que ces menaces rendaient plus que jamais nécessaire la mise en place d’un « Internet souverain » en Russie.

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