M. Trump demande aux Européens de rapatrier leurs ressortissants jihadistes capturés en Syrie

Pour le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, la politique américaine en Syrie est un « mystère ». Et il ne s’est pas privé de le dire lors de la Conférence annuelle de Munich sur la sécurité, le 15 février.

« Il y a pour ma part un point que je ne comprends pas tout à fait dans la politique américaine dans cette région. […] Comment est-ce que l’on peut être très ferme à l’égard de l’Iran et en même temps abandonner le nord-est de la Syrie alors que l’on sait très bien que la fin de l’histoire risque de favoriser la présence iranienne dans la zone? […] Pour moi c’est un mystère », a en effet lancé M. Le Drian à l’adresse du sénateur américain Lindsay Graham.

Ce dernier avait précédemment appelé les alliés des États-Unis à envoyer des troupes dans le nord-est syrien, en promettant que, « en échange, les capacités américaines, uniques, resteraient dans le combat en Syrie. »

Quoi qu’il en soit, M. Trump n’a nullement l’intention de revenir sur sa décision de retirer les forces américaines de Syrie, alors que le « califat » proclamé par l’État islamique [EI ou Daesh] vit probablement ses dernière heures, à mesure de la progression des Forces démocratiques syriennes [FDS, alliance arabo-kurde], appuyées par la coalition dirigée par les États-Unis. Et il l’a d’ailleurs une nouvelle fois réaffirmée, ce 17 février, via Twitter.

Seulement, le départ des troupes américaines ne fera pas seulement le jeu de l’Iran, comme le suppose M. Le Drian, mais aussi probablement celui de la Turquie, qui a l’intention de lancer une offensive contre les milices kurdes syriennes [YPG], considérées comme terroristes à Ankara en raison de leurs liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan [PKK]. Ce qui pose la question de l’avenir des combattants étrangers de Daesh, capturés par les FDS lors des combats de ces derniers mois.

Évidemment, il n’est nullement question de voir ces combattants être relâchés, ce qui ferait perdre leur trace. En outre, a-t-on expliqué à Paris, selon Reuters, ils sont aussi susceptibles de « tomber entre les mains d’un régime qui pourraient les utiliser comme moyen de pression. »

Sur ce point, un responsable du département d’État a officiseusement indiqué à l’AFP que la « politique du gouvernement américain était d’encourager les pays à rapatrier et poursuivre en justice leurs ressortissants » capturés par les FDS et à les « prendre sous leur responsabilité » par le « biais de programmes de réinsertion ou d’autres mesures pour éviter qu’ils retombent dans le terrorisme. »

Et ce qui était suggéré est désormais une ligne officielle à en croire les propos de M. Trump. « Les États-Unis demandent au Royaume-Uni, à la France, à l’Allemagne ainsi qu’aux autres alliés européens de reprendre plus de 800 combattants de l’EI que nous avons capturés en Syrie et de les traduire en justice », a-t-il affirmé via Twitter.

Cela étant, le l2 février, le coordinateur du contreterrorisme au département d’État américain, Nathan Sales, avait fait valoir auprès de l’AFP, que « rapatrier les combattants terroristes étrangers dans leurs pays d’origine et les inculper était la meilleure manière d’éviter qu’ils regagnent le champ de bataille. »

Toutefois, il avait aussi prévenu que ce n’était « pas la responsabilité des FDS ou des États-Unis de trouver des solutions pour les centaines de combattants terroristes étrangers » capturés en Syrie, avant d’appeler les pays concernés à « ne pas attendre que d’autres résolvent le problème à leur place. »

En attendant, éloigner la menace d’une intevention turque contre les milices kurdes syriennes permettrait de gagner du temps, à défaut de régler le problème posé par le retour de ces jihadistes. Ainsi, dans une tribune publiée par Le Parisien, la ministre française des Armées, Florence Parly, a prévenu que les Kurdes ne devaient pas faire les frais du retrait américain de Syrie.

« La France […] n’est pas ingrate. Nos partenaires de terrain, les FDS, ont beaucoup donné. Nous leur devons énormément. L’annonce du retrait américain a rebattu les cartes et créé de nouvelles configurations dans la région ; nul ne sait encore quel arrangement en sortira. Notre devoir est de tout faire pour éviter que les FDS en soient les victimes. J’ai moi-même alerté, à l’Otan, mes homologues américain et turc », a en effet écrit Mme Parly.

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