La Gendarmerie nationale se lance dans la voie de « l’innovation de rupture »

En décembre 2017, le général Richard Lizurey, le directeur de la Gendarmerie nationale [DGGN] a présenté un plan stratégique « Recherche & Innovation 2022 » afin de profiter des avancées technologiques dont il est beaucoup question actuellement, comme l’intelligence artificielle, le numérique, le big data, la robotique, « l’homme augmenté » et les biotechnologies.

En matière de recherche, la Gendarmerie est plutôt bien lotie puisqu’elle compte 60 docteurs, plus de 300 ingénieurs, 53 masters recherches et 71 DEA scienfiques dans ses rangs. « Cette richesse, unique au sein du ministère de l’Intérieur, contribue à la définition et à la conduite des projets innovants », souligne ainsi GendInfo, son magazine interne. En outre, elle s’est dotée d’un « Conseil scientifique », qui s’est réuni le 31 janvier dernier pour présenter 12 projets de « rupture » en cours d’expérimentation dans le cadre du programme « Disrupt » [pour « démonstrateurs pour l’innovation scientifique de rupture »].

« L’objectif est de parvenir à forger, pour nos gendarmes, pour notre ministère, un véritable esprit d’innovation et de remettre en question systématiquement nos processus et nos modes de raisonnement », a expliqué le général Lizurey, dont les propos ont été rapportés par L’Essor de la Gendarmerie. « Il faut convaincre chacun et chacune de nos membres. Ceux qui sont sur le terrain bénéficient de ces innovations mais en sont aussi les acteurs », a-t-il ajouté.

Parmi les projets du programme Disrupt, pour la plupart détaillés par Acteurs Publics, certains pourraient intéresser les autres armées. Comme par exemple celui appelé « Exosquelette 19 », qui, comme son nom l’indique, consiste à mettre au point le prototype d’un exosquelette pour accroître les capacités physiques et diminuer la fatigue des gendarmes en opération. L’Agence d’innovation de la Défense [AID] vient d’ailleurs de lancer une demande d’informations aux industriels spécialisés afin d’en évaluer les bénéfices éventuels pour les combattants débarqués. D’après L’Essor de la Gendarmerie, le GIGN est le principal concerné.

Mais la plupart des projets visent évidemment à donner aux gendarmes de nouveaux outils pour mener leurs enquêtes judiciaires. Celui qui est sans doute le plus « révolutionnaire » consiste à développer un procédé d’exploitation des « empreintes olfactives ». En clair, il s’agit de pouvoir prélever une odeur sur une scène de crime pour ensuite l’analyser.

Dans le même domaine, deux projets portent sur les empreintes génétiques. Le premier vise à déterminer la présence ou non d’une espèce végétale ou celle d’un animal de compagnie sur une scène de crime. Pour faire simple, il s’agit de pouvoir affirmer que, par exemple, des poils d’animaux trouvés sur les lieux d’un homicide appartiennent au chat ou au chien de la victime. Ou pas. Quant au second, appelé « Gendbones », il doit permettre de faire des analyses ADN sur des ossements directement sur le lieu de la découverte d’un squelette et non plus dans un laboratoire.

S’agissant des technologies liées au numérique, il est question de mettre au point un outil qui, appelé Gendscraper, doit assister les gendarmes dans leurs recherches d’infractions en ligne. Un autre projet, appelé OWL, fait appel à l’intelligence artificielle et au big data afin de permettre de trouver les informations pertinentes quand elles font besoin.

Un autre outil de recherche, appelé Alice [pour Automatic labeling for image collections explorations], doit permettre l’exploration d’importants volumes d’images, ce qui peut être très utile, par exemple, dans les affaires de cyberpédophilie. « Douze millions d’images sont ainsi conservées aux centre national d’analyse pédopornographiques (Cnaip) de la Gendarmerie », précise en effet l’Essor.

Enfin, parmi ces projets, l’un montre que la gendarmerie anticipe les tendances à venir. Ainsi en est-il du SM-VI, pour « sécurité des mobilités et véhicules intelligents ». Dans un avenir relativement proche, les voitures seront de plus en plus autonomes. Ce qui va poser de nouveaux problèmes de sécurité, auxquels ce projet entend répondre.

Tous ces projets [ainsi que ceux qui n’ont pas été cités] aboutiront sans doute [et on le saura l’été prochain]. Mais il n’y aucune obligation. En effet, pour innover, il faut prendre le risque de se tromper… Et donc d’échouer. « Le droit à l’échec fait partie de la démarche Disrupt », a en effet souligné le lieutenant-colonel Plessiet, responsable de la « Préparation de l’avenir à la direction des opérations et de l’emploi » au sein de la DGGN.

Photo : Gendarmerie nationale

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