La France a des « interrogations » au sujet de l’instauration d’une zone tampon dans le nord de la Syrie

Quand, le 14 janvier, il menaça de « dévaster » l’économie turque dans le cas où Ankara lancerait une offensive contre les milices kurdes syriennes [YPG], soutenues dans le combat contre l’État islamique [EI ou Daesh] par la coalition dirigée par les États-Unis, le président Trump avait évoqué l’instauration d’une « zone de sécurité » de 30 km dans le nord de la Syrie, le long de la frontière avec la Turquie.

Plus tard, le chef de la Maison Blanche évoqua cette idée de « zone tampon » avec Recep Tayyip Erdogan, son homologue turc. Et ce dernier assura que son pays pourrait se charger de la mettre en place. « Nous pouvons créer cette zone seuls et prendre les mesures nécessaires », a encore répété, ce 24 janvier, Mevlüt Cavusoglu, le ministre turc des Affaires étrangères.

Mais pour les Kurdes syriens, une zone de sécurité contrôlée par la Turquie n’est pas acceptable étant donné que ce pays est partie prenante au conflit.

« Il peut y avoir une ligne de démarcation entre la Turquie et le nord syrien avec des forces de maintien de la paix de l’ONU. Tout autre choix est inacceptable », a récemment avancé Aldar Khalil, un responsable politique kurde.

La Russie a aussi rejeté l’idée d’une zone tampon, estimant qu’il revenait au régime syrien de reprendre le contrôle des territoires situés dans le nord du pays, par ailleurs riches en ressources pétrolières, après le départ annoncé des troupes américaines de Syrie.

Quoi qu’il en soit, cette idée d’instaurer une zone tampon à la frontière turque n’a pour le moment pas les faveurs de la diplomatie française. Son chef, Jean-Yves Le Drian, s’en est ouvert devant la commission des Affaires étrangères du Sénat, le 23 janvier.

« On est interrogatif sur cette démarche », a dit M. Le Drian. « Peut-être sera-t-elle éclaircie lors de la réunion de la coalition [le 6 février] à Washington », a-t-il ajouté.

« Il faut que nous discutions sur le périmètre, les garants, quelle sera la surveillance », a ensuite enchaîné le patron du Quai d’Orsay. « Que Turquie demande à assurer la sécurité de ses frontières [pour empêcher les incursions de groupes armés sur son territoire, ndlr], c’est normal. Ceci étant, nous considérons […] que les Kurdes doivent être respectés aujourd’hui et demain », a-t-il souligné.

Par ailleurs, M. Le Drian a également estimé que le retrait américain de Syrie allait priver la coalition d’un « levier » dans la quête d’une solution politique au conflit syrien. Toutefois, « elle en gardera un sur la reconstruction de la Syrie et au Conseil de sécurité de l’ONU où la France et les Etats-Unis continueront à avoir un droit de regard sur le processus politique lancé notamment par les Russes », a-t-il relevé. « La reconstruction ne peut pas se faire avec les financements russes ou syriens. S’il n’y pas l’Europe ou d’autres puissances au rendez-vous de la reconstruction, elle ne se fera pas! », a-t-il

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