M. Trump menace de « dévaster » l’économie turque en cas d’offensive contre les milices kurdes syriennes

L’annonce, faite le 19 novembre dernier par Donald Trump, le chef de la Maison Blanche, au sujet du retrait de Syrie des troupes américaines, a été vue comme un feu vert implicite donné à l’opération militaire que promet le président turc, Recep Tayyip Erdogan, aux milices kurdes syriennes depuis des semaines.

Depuis, et alors que ce retrait en question ne sera pas aussi imminent qu’annoncé, les responsables américains ont corrigé cette impression, en assurant qu’il n’est pas question de mettre à la merci des forces turques et de leurs alliés ces milices kurdes qui, au sein des Forces démocratiques syriennes [FDS] continuent de combattre l’État islamique [EI ou Daesh] sur la rive orientale de l’Euphrate, dans la province de Deir ez-Zor, avec le soutien de la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis.

Seulement, le retrait annoncé par M. Trump, même s’il se fait de manière « prudente », ira à son terme. Le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, l’a encore répété lors d’une conférence de presse au Caire avec son homologue égyptien, Sameh Choukry, le 11 janvier. Et il a même souligné qu’il n’y avait « aucune contradiction dans la stratégie des Etats-Unis », alors que les conditions énoncées pour rendre ce désengagement effectif [protection des Kurdes, défaite définitive de Daesh] sont loin d’être réunies.

Le même jour, le ministre turc de la Défense, Hulusi Akar, a fait une revue des troupes déployées à la frontière turco-syrienne. « Nous avons devant nous Manbij et l’Est de l’Euphrate. Nous avons réalisé les plans nécessaires à ce sujet. Nos préparations se poursuivent d’une manière intensive. Lorsque le temps sera venu, comme nous l’avons fait lors des précédentes opérations, nous enterrons les terroristes qui se trouvent dans cette région dans les fossés qu’ils ont creusés », a-t-il promis.

S’agissant des milices kurdes syriennes [YPG], considérées comme terroristes à Ankara en raison de leur proximité avec le Parti des travailleurs du Kurdistan [PKK], le président Trump a mis sur le tapis une solution qui a déjà fait ses preuves il y a quelques semaines car elle a apparemment joué un rôle dans la libération du pasteur américain Andrew Brunson, détenu en Turquie après le coup d’État manqué du 15 juillet 2016.

En effet, afin d’obtenir la remise en liberté de M. Brunson, Washington a décrété des sanctions économiques à l’égard d’Ankara, notammant en doublant les droits de douanes sur l’acier et l’aluminium en provenace de Turquie, ce qui a fait plonger le cours de la livre turque par rapport au dollar et mis en lumière les fragilités de l’économie turque.

Or, via Twitter, le chef de la Maison Blanche a menacé de « dévaster la Turquie économiquement si elle attaque les Kurdes » tout en demandant la création d’une « zone de sécurité » d’une trentaine de kilomètres, sans plus de précisions. Dans un autre message, M. Trump demande aussi aux Kurdes de « ne pas provoquer » Ankara.

« La Russie, l’Iran et la Syrie ont été les plus grands bénéficiaires de la politique américaine de long terme de destruction du groupe État islamique en Syrie – des ennemis naturels. Nous en bénéficions aussi mais il est temps maintenant de faire rentrer nos troupes à la maison. Stop aux GUERRES SANS FIN », a également affirmé le président américain.

Cela étant, la menace de M. Trump n’a pas ébranlé Ankara. Du moins pour le moment. Ainsi, le porte-parole de la présidence turque, Ibrahim Kalin, s’est empressé de répondre en affirmant que les « terroristes ne pouvaient pas vos partenaires et alliés » et que la Turquie attendait des États-Unis d’être à la hauteur de leur « partenariat stratégique ». Et d’ajouter : « Il n’y a aucune différence entre Daesh, le PKK, le PYD [parti kurde syrien] et les YPG. Nous continuerons à les combattre tous ».

Quoi qu’il en soit, le soutien de la coalition aux milices kurdes syriennes n’est que l’un des contentieux opposant les États-Unis à la Turquie, tous les deux membres de l’Otan. L’achat de systèmes russes de défense aérienne S-400 en est un autre, de même que la livraison des avions de combat F-35A attendus par les forces aériennes turques.

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