Ankara menace de lancer son offensive contre les milices kurdes syriennes sans attendre le retrait américain

Quand le chef de la Maison Blanche, Donald Trump, a annoncé le retrait de Syrie des 2.000 militaires américains, déployés pour l’essentiel auprès des Forces démocratiques syriennes [FDS], le président turc, Recep Tayyip Erdogan, s’est frotté le mains : plus rien ne pouvait l’empêcher de lancer une offensive contre les Unités de protection du peuple [YPG, milices kurdes], considérées comme « terroristes » à Ankara, en raison de leurs liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan [PKK].

Depuis, ce retrait, qui devait être imminent à en juger par les propos de M. Trump [« ils rentrent tous, ils rentrent maintenant », avait-il assuré au sujet des militaires américains présents à Syrie], va se faire de façon « prudente » et à un « rythme adapté ».

En outre, plusieurs conditions ont été avancées par des responsables de l’administration américaine : une défaite définitive de Daesh [État islamique ou EI] et l’assurance que les milices kurdes syriennes, membres des FDS, soient « protégées ». Le tout en gardant un oeil sur les activités iraniennes. Du moins, c’est ce que l’on comprend des déclarations faites par Mike Pompeo, le secrétaire d’État, et John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump.

Par ailleurs, craignant de faire les frais de l’annonce du président américain, les YPG ont demandé l’aide du régime syrien. Et ce dernier s’est empressé de leur répondre favorablement, même si, précédemment, le président el-Assad les avait qualifiés de « traîtres » en raison de leur proximité avec la coalition anti-jihadiste dirigée par les États-Unis. D’où l’envoi des forces gouvernementales syriennes dans les faubourgs de la localité de Manbij, où la police militaire russe patrouille désormais.

Pour rappel, ces développement se sont produits alors que de violents combats opposent toujours les FDS à Daesh dans la province de Deir ez-Zor…

Aussi, pour Ankara, qui a par ailleurs convenu de coordonner ses actions avec Moscou, l’offensive prévue dans le nord de la Syrie se trouve compromise… Et cela alors que les groupes rebelles syriens, soutenus par la Turquie, viennent de subir un revers face à Hayat Tahrir al-Cham [HTS], l’ex-branche d’al-Qaïda en Syrie, dans la province d’Idleb ainsi que dans celle d’Alep.

D’où l’impatience manifeste du gouvernement turc, dont le ministre des Affaires étrangères, Melvut Cavusoglu, a fait part, ce 10 janvier.

« Si [le retrait américain] est retardé avec des excuses ridicules qui ne reflètent pas la réalité du genre ‘les Turcs vont massacrer les Kurdes’, alors nous mettrons à exécution notre décision » de lancer une opération dans le nord de la Syrie », a ainsi affirmé le chef de la diplomatie turque.

Le propos de ce dernier fait référence aux déclarations faite par M. Pompeo, le 3 janvier. Il avait en effet déclaré que Washington tenait à s’assurer que « les Turcs ne massacrent pas les Kurdes » après le retrait des forces américaines de Syrie.

« La Turquie combattra les YPG, que les États-Unis se retirent ou pas », a insisté M. Cavusoglu. « Ils [les Américains] doivent comprendre une chose : l’opération que la Turquie se prépare à mener dans l’Est de l’Euphrate en Syrie, n’est pas liée au retrait des troupes américaines dans ce pays. Avant la décision de retrait annoncée par Trump, nous avions déjà prévenu que l’opération était proche. Notre président l’a annoncé sans connaître cette décision américaine », a-t-il explique.

Pour rappel, les forces américaines ne sont pas les seuls à avoir été déployées auprès des FDS, et donc des milices kurdes syriennes. Des membres des forces spéciales françaises et britanniques l’ont été également. Or, c’est une réalité souvent ignorée par Ankara…

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