Comment l’armée de l’Air imagine son futur « système » de combat?

Le 29 novembre, le chef d’état-major de l’armée de l’Air, le général Philippe Lavigne, a dévoilé son « Plan de vol », c’est à dire un nouveau plan stratégique, dont les grandes lignes ont déjà été évoquées par Zone Militaire au début de ce mois.

Pour résumer, et afin de profiter de la dynamique de « remontée en puissance » insufflée par la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-25, ce plan compte quatre grands objectifs, dont « maintenir une armée de l’Air puissante », « garantir la supériorité aérienne », « conserver un temps d’avance » et « cultiver les forces morales » tout en « libérant les énergies. » Il s’agit de répondre aux défis et aux menaces actuellement posés, comme la contestation croissante des espaces aériens et spatiaux, laquelle met en péril la liberté de manoeuvre et d’action.

Aussi, « pour vaincre et protéger ensemble par les airs », le général Lavigne veut une armée de l’Air « puissante, audacieuse, agile et connectée ». L’accent sera donc mis sur les ressources humaines (toujours sous tension, les compétences des aviateurs étant à la fois rares et très prisées), l’innovation et l’ouverture vers le monde civil.

Quoi qu’il en soit, pour relever les défis qui lui sont (im)posés, l’armée de l’Air mise sur le Système de combat aérien futur [SCAF], qui fait l’objet d’une coopération franco-allemande, avec Dassault Aviation en pôle position.

« C’est par ce système de systèmes que nous pensons contrer la menace, pour saisir toutes les opportunités offertes, surtout pour les milieux dont l’accès nous est dénié », expliquait le CEMAA lors de ses dernières auditions parlementaires. Et de préciser : « Le projet de système de combat aérien futur sera déterminant et devra asseoir notre supériorité opérationnelle et aérienne sur le long terme. Il se construira non pas au fil de l’eau mais ‘au fil de l’air’, c’est-à-dire progressivement, au gré des évolutions des capacités qui le constitueront. »

En outre, selon le général Lavigne, le SCAF sera « construit autour d’une plateforme d’avion de combat, habité ou non, polyvalent, autour duquel nous placerons un certain nombre d’effecteurs, des drones, de combat ou non, et un armement. » Et la « connectivité sera le ‘game changer' », avait-il assuré.

« Il faudra être plus rapide que l’adversaire. La capacité à gérer l’ensemble des données, à se voir présenter des solutions par l’intelligence artificielle et ainsi à pouvoir agir sera déterminante. La connectivité, la collaboration entre tous les acteurs, qu’il s’agisse de drones, de satellites ou de chasseurs, permettront de conserver notre supériorité opérationnelle », fit encore valoir le CEMAA.

Dans la vidéo de présentation de ce nouveau « Plan de vol » qu’il vient de présenter, une séquence illustre les propos du général Lavigne au sujet du SCAF, en montrant le profil que pourrait avoir le futur avion de combat de l’armée de l’Air.

Cela étant, cela ne présage en rien de l’allure qu’aura le démonstrateur de cet appareil. Et il faut bien comprendre [avant de commenter, ndlr] qu’il ne s’agit que d’une illustration. Toutefois, elle peut donner des éléments sur ce que cherche l’armée de l’Air pour le SCAF.

Ainsi, l’image en question montre un avion bi-réacteur [mais sans entrées d’air visibles], doté d’un empennage double en diagonale [comme les F-22, F-35 et Su-57] et d’ailes delta, ce qui lui fait un point commun avec le projet Tempest, que les Britanniques ont dévoilé à l’occasion du salon de Farnborough, en juillet.

Généralement, les concepts d’avions de combat de 6e génération dévoilés jusqu’à présent font l’impasse sur l’empennage double. Tel est le cas de Northrop Grumman, de Boeing, et même de Dassault Aviation, qui a donné un aperçu de ses travaux dans un film promotionnel diffusé en mai.

Autre élément intéressant : un pseudolite – c’est à dire un drone stratosphérique – figure parmi les systèmes qui devraient être reliés à l’avion de combat du SCAF. La LPM en cours de prévoit pas l’acquisition de tels appareils. Mais ce n’est pas la première fois qu’il en est question dans une publication officielle du ministère des Armées : le plan « Mercator » de la Marine nationale en fait aussi mention. Et il y a une offre dans ce domaine, avev le HAPS [High Altitude Platform System] Zephyr, développé par Airbus.

Ce type d’appareil « a pour vocation première de fournir une persistance locale à un coût abordable destinée à un vaste éventail d’applications, telles que la surveillance et les services maritimes, le contrôle des frontières, les communications, la détection et la surveillance des incendies de forêt ou la navigation. »

Enfin, il y a ce que l’on voit et ce que l’on ne voit pas. Et l’on constate qu’aucun drone de combat [UCAV] n’apparaît dans la séquence relative au SCAF, alors qu’un tel projet fait l’objet d’une coopération franco-britannique. Ou alors il devra être tellement furtif qu’on ne peut pas le voir… Mais comme la plateforme d’avion de combat pourra être « habitée ou non », sans doute que mettre au point un tel appareil ne serait pas pertinent… Mais, encore une fois, il faut se garder de toute conclusion hâtive. Les images ne valent pas toujours les discours.

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