Tensions avec la Russie : Pour l’Allemagne, l’Ukraine doit se « montrer raisonnable »

Après la capture de trois de ses navires par la garde-côtière russe, le 25 novembre, l’Ukraine craint que la Russie aille encore plus loin en prenant le contrôle de son littoral donnant sur la mer d’Azov, dont l’accès passe par le détroit de Kertch, situé entre la Crimée et la péninsule de Taman [Russie].

D’où la demande adressée par Petro Porochenko, le président ukrainien, à l’Otan d’envoyer des navires en mer d’Azov. Et sa requête s’adressait plus particulièrement à l’Allemagne, laquelle, selon lui, devrait aussi « se demander » ce que « fera ensuite [Vladimir] Poutine si nous ne le stoppons pas ».

Déjà pas favorable à imposer d’autres sanctions à la Russie (mais en condamnant, toutefois, les actions de cette dernière), l’Allemagne a opposé une fin de non-recevoir à la requête de M. Porochenko.

Ainsi, la chancelière allemande, Angela Merkel, a estimé, ce 29 novembre, que l’Ukraine se devrait de « rester avisée car nous ne pourrons résoudre les choses qu’en restant raisonnables, en discutant les uns avec les autres ».

« Il ne peut y avoir de solution militaire à ces confrontations », a encore insisté Mme Merkel, qui s’exprimait à l’occasion forum économique germano-ukrainien.

Dans le même temps, Mme Merkel a promis qu’elle aborderait avec le chef du Kremlin la question de l’accès à la mer d’Azov, lequel a été rendu plus compliqué depuis l’inauguration du pont de « Crimée », qui traverse le détroit de Kertch.  »

« Car tout cela est à mettre totalement sur le compte du président russe. Depuis que ce pont a été inauguré en mai, les conditions de navigation ont empiré », a affirmé Mme Merkel, qui a aussi assuré qu’elle ferait tout pour le littoral ukrainien en mer d’Azov, et notamment le port de Marioupol, restent accessibles par voie maritime.

Dans cette affaire, l’Allemagne est, en quelque sorte, entre le marteau et l’enclume, principalement pour des considérations énergétiques. En juillet, le président américain, Donald Trump, lui en avait fait le reproche.

« L’Allemagne est complètement contrôlée par la Russie […] elle est prisonnière de la Russie. Elle paie des milliards de dollars à la Russie pour ses approvisionnements en énergie et nous devons payer pour la protéger contre la Russie. Comment expliquer cela? Ce n’est pas juste », avait en effet lancé le chef de la Maison Blanche, lors du dernier sommet de l’Otan.

La raison de son courroux portait un nom : Nord Stream 2, c’est à dire celui du projet de gazoduc qui doit relier directement la Russie à l’Allemagne sans passer par l’Ukraine.  »

« Les États-Unis ont toujours été opposés à ce projet, pointant une contradiction fondamentale de la politique allemande. […] D’un côté le pays est un partenaire engagé de l’Otan en faveur du régime de sanctions [contre la Russie]. Dans le même temps, l’Allemagne n’arrive pas à reconnaître la dimension politique de Nord Stream 2 et semble assez indifférente à fournir à la Russie un levier politique supplémentaire », avait expliqué, à l’époque, Marco Giuli, du centre de réflexion European Policy Centre (EPC).

C’est sans doute aussi à l’aune de ce type de considérations (et non pas seulement sous le seul prisme environnemental) qu’il faut appréhender le sujet de la « transition énergétique », qui fait beaucoup de bruit en ce moment. En 2017, la moitié des importations de gaz naturel des pays de l’Union européenne a été fournie par la Russie. Et il n’y a pas de solution de substitution : la production norvégienne est au « taquet » et l’Algérie ne peut pas suivre la demande, faute d’avoir pu moderniser ses infrastructures.

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