Pour M. Macron, « nous devons mieux partager le fardeau au sein de l’Otan »

À peine arrivé en France pour assister à la commémoration du centenaire de l’armistice du 11-Novembre 1918, le président américain, Donald Trump, s’en est pris à son homologue français, Emmanuel Macron, pour les propos tenus cette semaine par ce dernier au sujet d’une « armée européenne ».

« Le président Macron vient de suggérer que l’Europe construise sa propre armée pour se protéger contre les États-Unis, la Chine et la Russie. Très insultant mais peut-être que l’Europe devrait d’abord payer sa part à l’Otan que les Etats-Unis subventionnent largement! », a en effet lancé le chef de la Maison Blanche, via Twitter.

« On ne protègera pas les Européens si on ne décide pas d’avoir une vraie armée européenne. Face à la Russie qui est à nos frontières et qui a montré qu’elle pouvait être menaçante […] on doit avoir une Europe qui se défend davantage seule, sans dépendre seulement des États-Unis et de manière plus souveraine », avait affirmé M. Macron, le 6 novembre, sur les ondes d’Europe1.

Et d’ajouter : Il s’agit de « nous protéger à l’égard de la Chine, de la Russie et même des États-Unis d’Amérique ». Sur ce point, il avait surtout évoqué la décision américaine de se retirer du traité sur les Forces nucléaires intermédiaires [FNI] qui, en 1987, mit fin à la crise des Euromissiles.

Pour rappel, seuls les États-Unis et la Russie sont les signataires de ce traité, alors que d’autres puissances, comme la Chine, développent des armes à portée intermédiaire. En outre, Washington accuse Moscou d’avoir mis au point un missile contrevenant à ce texte.

Cela étant, le président Macron avait déjà tenu des propos assez similaires en août dernier, lors de la conférence annuelle des ambassadeurs. « L’Europe ne plus remettre sa sécurité aux seuls États-Unis » et « c’est à nous, aujourd’hui, de prendre nos responsabilités et de garantir la sécurité, et donc la souveraineté européenne », avait-il affirmé, après avoir qualifié « d’unilatérale et d’agressive » la politique commerciale des États-Unis. À l’époque, M. Trump n’avait pas réagi…

Quoi qu’il en soit, et avant une rencontre entre MM. Macron et Trump, ce 10 novembre, l’Élysée a réagi au commentaire du président américain.

« L’enchaînement des sujets dans l’interview » a pu « créer de la confusion mais ce sont bien deux sujets différents, le traité INF (FNI en français, ndlr] et ce sujet d’une force de défense des Européens où il y a des travaux en cours », a ainsi affirmé la présidence française. M. Macron « n’a jamais dit qu’il fallait créer une armée européenne contre les États-Unis. Mais dans la mesure où le retrait du traité INF concerne la sécurité de l’Europe, il faut que l’Europe puisse être associée au dialogue sur ce sujet », a-t-elle poursuivi.

Jusqu’au 6 novembre dernier, M. Macron n’avait jamais parlé « d’armée européenne ». En revanche, il a lancé « l’Initiative européenne d’intervention » qui, en-dehors du cadre de l’Union européenne, vise à favoriser l’émergence d’une culture stratégique commune entre dix pays participants. Ces derniers ont d’ailleurs établi, cette semaine, une feuille de route à cette fin.

Lors de sa dernière audition à l’Assemblée nationale, le chef d’état-major des armées [CEMA], le général François Lecointre, a reconnu que cette « Initiative européenne d’intervention a provoqué des réactions d’incompréhension, notamment chez nos alliés américains, qui nous encouragent à prendre notre part du fardeau de la sécurité et de la défense de l’Europe, mais sont aussi inquiets à l’idée que l’Europe pourrait se détacher des États-Unis dans un contexte appelé à se durcir dans les années qui viennent. »

Et d’ajouter : « L’Europe doit être capable d’agir en toute autonomie, en complément de ce que font déjà les États-Unis pour la sécurité de notre monde occidental. L’Initiative européenne d’intervention n’a pas pour objet de se substituer à l’Otan. L’IEI, c’est d’abord l’idée de partager une culture commune, ce qui, croyez-moi, est très difficile. »

Et M. Macron n’a pas dit autre chose en accueillant M. Trump à l’Élysée.

« Je vais aussi partager avec le président Trump les propositions faites sur les capacités stratégiques européennes et une Europe qui puisse prendre davantage la part du fardeau commun au sein de l’Otan », a dit le président français. Ce à quoi son homologue américain a répondu : « J’apprécie ce que vous dites sur un partage du fardeau, vous connaissez mon point de vue. Nous voulons une Europe forte. »

« Nous célébrons ici l’amitié entre nos peuples, nos armées et la formidable solidarité qu’il y a eu entre nous qui sommes parmi les deux plus vieux alliés du monde », a par ailleurs affirmé M. Macron. « Nous allons parler de beaucoup de sujets d’intérêts communs: l’Iran, la Syrie, les sujets commerciaux, l’ordre international, y compris les sujets climatiques. Les sujets liés à l’Afrique », a-t-il précisé.

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