La France va livrer 1.400 fusils d’assaut aux forces armées centrafricaines

Depuis qu’elle a obtenu, auprès des Nations unies, une dérogation pour livrer des armes à la Centrafrique, la Russie ne cesse d’accroître son influence dans ce pays, toujours en proie à des poussées de violences dues à des groupes armés, comme l’ont encore montré les heurts qui ont eu lieu à Bambari, le 31 octobre.

Cette livraison d’armes aux forces armées centrafricaines [FACa] a été accompagnée par l’envoi à Bangui de 170 instructeurs militaires « civils » russes qui, selon un rapport d’un groupe d’experts des Nations unies, font plus que de la « formation », comme l’assure pourtant Moscou. Ainsi, ces paramilitaires assureraient également des « missions d’escorte et de protection » et fourniraient un « appui opérationnel » aux soldats centrafricains.

Aussi, les visées de Moscou en Centrafrique ne manquent pas de susciter quelques interrogations, notamment après l’assassinat de trois journalistes qui enquêtaient sur des mercenaires employés par la société militaire privée russe Wagner à Sibut.

Apparemment, les ressources minière centrafricaines intéressent particulièrement la Russie qui, par ailleurs, a lancé sa propre médiation avec les groupes armés, en parallèle celle menée sous l’égide de l’Union africaine. Dans la même temps, l’action de la France dans ce pays est de plus en plus souvent dénigrée, y compris par certains médias russes.

D’où les commentaires faits par Jean-Yves Le Drian, le ministre français des Affaires étrangères, à l’occasion d’une visite à Bangui, le 2 novembre.

« La Centrafrique n’est pas un terrain de jeu. Ce n’est pas un terrain de compétition. Le seul sujet qui doit préoccuper ceux qui veulent s’occuper de Centrafrique, c’est […] la sécurité de ce pays et son développement, et non pas utiliser potentiellement les difficultés de ce peuple et de ce pays pour s’implanter dans un continent où il y aurait des ambitions voilées », a lancé M. Le Drian, alors qu’il était interrogé par France 24. Au passage, cela peut valoir aussi bien pour la Russie que pour la Chine

« La France est un partenaire historique [de la Centrafrique]. Elle est présente. Elle a été présente aux moments difficiles. Il n’y avait pas grand monde, fin 2013, à aider les Centrafricains dans les ruptures difficiles que ce pays traversait, avec les violences que nous connaissions, dont on voit encore les conséquences. Nous étions là. Certains de nos soldats ont payé de leur vie cette participation à la défense de l’intégrité centrafricaine. Et nous sommes toujours là », a ajouté le chef de la diplomatie française.

Effectivement, et malgré la fin de l’opération Sangaris, la France est toujours présente en Centrafrique, notamment au travers de la mission européenne EUTM RCA, qui vise à former les soldats centrafricains, ou encore de la Mission des Nations unies en Centrafrique [MINUSCA]. Et elle entend faire davantage étant donné que, comme l’a dit M. Le Drian, elle « souhaite continuer son partenariat historique avec la République centrafricaine

Ainsi, le ministre français a annoncé que Paris allait accorder à Bangui une aide de 24 millions d’euros afin de payer les arrières de salaires et de et retraites, contribuer au développement des territoires frontaliers avec le Cameroun, affectés par d’importants mouvements de population, et installer des ponts pour désenclaver certaines régions.

Mais il est aussi question de livrer 1.400 fusils d’assaut aux FACa. « Nous le faisons dans le cadre strict, respectueux et transparent des Nations unies, dans une transparence totale, à la fois sur l’origine, sur l’acheminement, et sur la livraison », a expliqué M. Le Drian, qui n’a pas précisé le type des armes en question. Il serait « absurde de former des militaires et de ne pas leur donner, à la suite, les moyens d’assurer leurs fonctions », a-t-il ajouté.

Enfin, s’agissant de la médiation russe, le chef du Quai d’Orsay n’a pas pris de gants à l’égard de Moscou. « À ma connaissance, il n’y a pas eu d’initiative russe pour obtenir la paix en Centrafrique et pour avoir une nouvelle feuille de route. Je ne connais qu’une seule initiative : celle des Africains eux-mêmes. Je ne connais qu’un seul interlocuteur, c’est l’Union africaine. […] Alors, si la Russie a pensé utile de faire autre chose, il faut qu’elle le dise publiquement et qu’elle le dise à l’Union africaine et aux Nations unies. Elle ne l’a pas fait à ma connaissance. Donc, ça n’existe pas », a-t-il affirmé à France24.

Pourtant, le dernier rapport du secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, sur la situation en Centrafrique, évoque cette médiation russe, laquelle a donné lieu à au moins deux réunions à Khartoum [Soudan] : la première avec le seul Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique, la seconde avec les trois principaux groupe de l’ex-coalition rebelle de la Séléka et une faction « anti-balaka ».

« Bien que l’initiative de Khartoum ait suscité des préoccupations au départ parce qu’il s’agissait d’un processus de dialogue parallèle et non coordonné, ses résultats, notamment la reconnaissance par tous de l’Initiative africaine comme initiative de paix primordiale, pourraient renforcer l’appui au processus de paix national. Néanmoins, les groupes armés peuvent avoir durci leurs positions », lit-on dans le rapport de M. Guterres.

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