L’armée de Terre se donne trois priorités en matière d’innovation

Lors de ses multiples interventions, la ministre des Armées, Florence Parly, a toujours un mot (voire plusieurs) sur l’innovation, laquelle doit donner à la Défense « toutes les cartes » pour faire face aux conflits futurs et permettre la transformation, en profondeur, de son ministère. D’où la création de l’Agence de l’innovation de Défense [AID], qui doit donner le « la » en la matière.

L’armée de Terre entend aussi faire entendre sa musique dans ce domaine, avec la mise en place du « Battle Lab Terre », chargé de l’innovation technico-opérationnelle en privilégiant la « boucle courte ».

Cette structure dout être au coeur d’un « pôle innnovation de l’armée de Terre » [PIAT], lequel réunira à Satory la STAT [Section technique de l’armée de Terre], la SIMMT [structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres], les bureaux de recherche d’industriels ou encore les membres du pôle scientifique et technologique dédié à l’innovation de Paris-Saclay.

Il est aussi question de fédérer les initiatives prises au niveau régimentaire par des « soldats innovateurs ». Pour cela, chaque unité aura désormais son « référent innovation », l’objectif étant « d’aider à transformer les [bonnes] idées en projets concrets, en les relayant vers le pôle innovation de l’armée de Terre et d’insuffler, en quelque sorte, l’esprit « Makers ».

Ce Battle Lab Terre, qui verra officiellement le jour en 2019, aura à mener un premier projet « éclaireur d’expérimentation de robots de grande taille ». « Un exercice sera organisé afin d’étudier comment ces robots pourraient être utilisés par l’armée de Terre dans un scénario tactique. Cela permettra de mieux connaître ces équipements et les projets qui existent en matière de robotique terrestre, afin d’avancer dans nos réflexions et dans la définition du besoin », a récemment expliqué le colonel « Patrick », chargé de mission « Innovation ».

Le choix de ce thème ne doit évidemment rien au hasard. En effet, la robotique est l’une des trois priorités en matière d’innovation que le général Jean-Pierre Bosser, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT] a livrées aux députés de la commission de la Défense, lors de sa dernière audition relative au projet de loi de finances 2019.

« Ma priorité essentielle en termes d’innovation concerne la robotisation et la capacité à imaginer ou à construire des engins qui allègent les soldats en opération et fassent office de robots dotés d’une forme d’intelligence. Aujourd’hui par exemple, des mules robotisées sont capables de transporter du matériel et des munitions, voire d’évacuer des blessés, et peuvent se déplacer de façon autonome sur le terrain. Des solutions existent, méritent d’être finalisées et, pourquoi pas, d’être acquises dans le cadre de la LPM [Loi de programmation militaire 2019-25, ndlr] », expliqué le général Bosser.

La seconde priorité du CEMAT a trait à l’énergie. Un dossier important alors que le prix du baril de pétrole pourrait s’envoler dans les semaines à venir. « Nos systèmes sont fortement consommateurs d’énergie, au quotidien comme dans le fonctionnement des états-majors. Or, nous intervenons souvent dans des pays où nous pouvons tirer un grand avantage de l’énergie solaire. Je souhaite donc que cet axe de réflexion soit approfondi », a-t-il confié.

« L’énergie solaire serait emmagasinée le jour et restituée la nuit pour les bivouacs et les états-majors. Demain, nous pourrions même imaginer que certains de nos véhicules combinent l’énergie classique et une énergie solaire », a poursuivi le CEMAT.

Plusieurs projets visant à produire de l’électricité à partir de l’énergie solaire ont d’ores et déjà été lancés… Comme sur la base aérienne d’Istres, où a été inauguré, en juin 2009, le « premier dispositif de production d’électricité solaire sur la toiture d’un bâtiment ». En outre, celle d’Orléans a été désignée, en 2007, comme « base pilote pour mettre en œuvre des actions liées au développement durable. » Enfin, en 2012, le Centre d’expertise du soutien du combattant et des forces (CESCoF) avait imaginé une tente munie de panneaux photolvotaïques souples, pouvant alimenter deux rampes néon, huit éclairages individuels à led et 16 prises de courants pour recharger les batteries de téléphones et d’ordinateurs portables.

Cela étant, le ministère des Armées ensisage surtout de louer des terrains pour un « usage photovoltaïque ». D’après Jean-Paul Bodin, le Secrétaire général pour l’administration [SGA], 300 hectares (sur 2.000) ont été « identifiés » pour faire l’objet d’un appel d’offres « rapide » à cette fin.

Quant aux véhicules combinant « énergie classique et énergie solaire », on en est encore au stade de la science fiction. Encore que… L’entreprise néerlandaise Lightyear a ainsi assuré être en mesure de proposer une voiture 100% solaire d’ici 2019. Même chose pour la start-up allemande Sono Motors, avec la Sion, une voiture électrique pouvant recharger ses batterie grâce à des panneaux photolvotaïques. Mais pour l’instant, pour le strict domaine militaire, le principe du VAB Elekter d’Arquus semble le plus approprié. Pour rappel, il s’agit d’un véhicule blindé qui combine une « machine électrique » avec un moteur thermique.

Toujours dans le domaine de l’énergie, le général Bosser a aussi estimé que « l’innovation énergétique peut contribuer à alléger le poids supporté par les combattants – batteries des radios –, ou encore à gagner en discrétion pour alimenter les postes de commandement. »

Enfin, la troisième priorité du CEMAT « touche à la protection du soldat : pièces de protection balistique, casques, lunettes, possibilités d’allégement, etc. ». Un sujet qu’il n’a cependant pas développé devant les députés.

Parallèlement à ces efforts en matière d’innovation, l’armée de Terre va aussi mettre l’accent sur la « transformation numérique », avec la mise en place d’un « pilier dédié à ce sujet ».

« En la matière, l’armée de terre vise des objectifs ambitieux et réalistes, élaborés en tenant compte des expérimentations conduites depuis septembre 2016 », a précisé le général Bosser. Concrètement, un « mili-store » sera créé afin de proposer aux militaires une « série d’applications professionnelles ou personnelles » et « pouvant intégrer des applications développées par le commandement, les services ou les soldats eux-mêmes à partir de leur téléphone portable. »

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