Par manque d’hélicoptères disponibles, l’Aviation légère de l’armée de Terre peine toujours à entraîner ses pilotes

Certes, l’armée de Terre bénéficie d’une hausse importante de ses crédits qui va lui permettre de continuer sa remontée en puissance opérationnelle. Seulement, il faudra encore du temps pour que les améliorations attendues soient au rendez-vous. Notamment pour ce qui concerne le domaine de l’aéromobilité.

« L’Aviation légère de l’armée de terre [ALAT] […], à elle seule, concentre beaucoup des difficultés de l’armée de Terre pour la remontée en puissance de sa préparation opérationnelle », a en effet estimé le député Thomas Gassilloud, rapporteur pour avis des crédits relatifs à la préparation et à l’emploi des forces terrestres, lors de l’examen, en commission, du projet de loi de finances 2019.

L’une des difficulté concerne l’entraînement des équipages de l’ALAT, ces derniers devant effectuer 180 heures de vol par an [norme Otan], voire 200 heures s’ils appartienant aux forces spéciales. Et cela, à cause de la trop faible disponibilité des aéronefs, soit parce qu’ils sont en maintenance, soit parce qu’ils sont engagés en opération.

Ce problème n’est pas nouveau. En 2016, un rapport parlementaire avait même déjà parlé d’une « perte sèche de potentiel opérationnel ». À l’époque, entre 25% et 33% des pilotes d’un des régiments les plus sollicités pour les opérations extérieures n’effectuaient même pas 140 heures de vol en un an, soit le minimum requis avant une « projection ».

Citant le commandant de l’ALAT [COM-ALAT], le général Grintchenko, M. Gassiloud a indiqué qu’environ deux tiers des 300 aéronefs de l’armée de Terre « ne sont pas en état de voler ».

« Le COM-ALAT estime que le nombre maximum d’hélicoptères indisponibles doit être réduit à 120, notamment en réduisant la maintenance industrielle. Compte tenu de la forte indisponibilité des hélicoptères et du niveau d’engagement opérationnel, le nombre d’aéronefs disponibles pour l’entraînement et la formation se trouve considérablement réduit », a ensuite expliqué le député.

Or, la question de la formation et de l’entraînement constitue un enjeu crucial. « Le retour d’expérience du Donbass doit nous alerter : les militaires ukrainiens avaient des hélicoptères mais ils ont tous été détruits au premier engagement, du fait de l’insuffisante formation des pilotes », a en effet souligné M. Gassilloud.

Ce problème de l’ALAT est en outre amplifié par « le fort renouvellement des effectifs de ces dernières années » dans la mesure où il existe désormais une « forte hétérogénéité dans le niveau de formation des pilotes de l’ALAT. » Aussi, a indiqué le député, « seule une minorité de pilotes étant aujourd’hui en mesure de conduire les missions à forte valeur ajoutée. »

Par ailleurs, la disponibilité des appareils peut être affectée par leurs engagements sur des théatres extérieurs. De retour d’une mission au Sahel, le député Philippe Chalumeau a fait part du témoignage d’un pilote d’hélicoptère d’attaque Tigre.

« Au Sahel, un pilote de Tigre nous a montré une boîte de transmission au niveau de l’empennage particulièrement perméable au sable, qui génère beaucoup de pannes », a raconté le parlementaire, qui a voulu « savoir si ces retours d’expérience étaient bien pris en compte par les constructeurs. »

Visiblement, le Tigre n’a pas été le seul hélicoptère à être affecté par ce souci. « En tout état de cause, l’emplacement de la boîte de transmission a été modifié sur le Caïman », a en effet indiqué M. Gassilloud.

Lors d’une récente audition, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], le général Jean-Pierre Bosser, avait sembler regretter que l’ALAT ait un parc d’éhlicoptères « à deux vitsses », avec « d’un côté, des hélicoptères ultra-modernes comme le NH90 ou le Tigre, et, de l’autre côté, la Gazelle et le PUMA. »

« J’avais déjà souligné la difficulté qui est la nôtre de conduire des opérations avec des hélicoptères de deux générations différentes. C’est la raison pour laquelle nous envisagerons de remplacer la Gazelle par un hélicoptère léger de nouvelle génération, changement qui n’a pas été pris en compte dans la LPM », avait expliqué le CEMAT.

« Pour autant, la Gazelle reste l’hélicoptère qui dispose de la meilleure disponibilité technique opérationnelle et qui offre donc le volume d’heure de vol le plus conséquent pour l’entraînement de nos pilotes. Nous cherchons donc à faire de cette contrainte de parc vieillissant une opportunité en cherchant à optimiser l’utilisation de ce parc », avait ensuite expliqué le général Bosser.

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