Pour la première fois depuis 1945, l’infanterie de marine japonaise débarque aux Philippines

Durant la Seconde Guerre Mondiale, les Forces navales spéciales de débarquement [Kaigun Tokubetsu Rikusentai] eurent un rôle important dans l’invasion et l’occupation des Philippines par les forces impériales japonaises. Cet épisode, qui fit au moins 500.000 tués parmi les civils, laissa un fort sentiment anti-nippon chez les Philippins.

Cependant, Manille et Tokyo rétablirent leurs relations diplomatiques en 1956, après avoir convenu d’un accord sur les réparations de guerre. Puis les deux pays signèrent un Traité d’amitié, de commerce et de navigation en 1960 (qui ne sera ratifié qu’en 1975 par Manille), avant d’amorcer un rapprochement dans le domaine militaire.

En 2015, le président philippin, qui était Benigno Aquino à l’époque, avait en effet salué « le rééxamen par le Japon de sa politique de sécurité et de sa législation en vue de lui permettre de jouer un rôle plus actif pour la paix et la sécurité dans notre région. » Et d’ajouter : « Les pays de bonne volonté ne peuvent que tirer bénéfice d’un gouvernement japonais qui serait autorisé à venir en aide à ses amis dans le besoin, en particulier dans le domaine de l’autodéfense collective. » En outre, des discussions visant à autoriser les forces d’autodéfense japonaises à utiliser des bases aux Philippines à des fins logistiques furent ouvertes.

Pour Manille et Tokyo, ce rapprochement devait permettre de faire face aux ambitions territoriales chinoises dans la région. En 2012, Pékin mit en effet le grappin sur le récif de Scarborough qui, situé en mer de Chine méridionale, était jusqu’alors sous souveraineté philippine. Et réaffirma ses prétentions sur l’archipel nippon Senkaku.

Justement, pour défendre ce dernier, Tokyo décida de se doter d’une brigade d’assaut amphibie, dont la mission serait de le reconquérir en cas d’invasion chinoise. C’est ainsi que, en avril dernier, la Brigade de déploiement rapide amphibie a officiellement vu le jour à Sasebo, avec un effectif de 2.100 soldats. Une première depuis la dissolution des Kaigun Tokubetsu Rikusentai.

Et, pour la première fois, là encore, depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l’infanterie de marine japonaise a débarqué aux Philippines, dans le cadre de l’exercice « Kamandag » [coopération entre les guerriers de la mer, ndlr], mené conjointement avec l’US Marine Corps et les forces armées philippines, à environ 250 kilomètres des récifs de Scarborough.

Le rôle des 50 soldats japonais engagés dans cette manoeuvre (avec quatre blindés AAV-P7/A1) s’est limité à l’assistance sanitaire. Ces derniers, ainsi que leurs véhicules, ont été acheminés aux Philippines à bord du navire d’assaut amphibie USS Ashland. Le scénario de la manoeuvre à laquelle ils ont pris part était focalisé sur la reprise d’un territoire à une organisation terroriste.

Cet exercice « n’a rien à voir avec une nation étrangère ou une armée quelconque. Il s’agit exclusivement de contre-terrorisme », a expliqué lieutenant-colonel Zack Doherty, un porte-parole de l’USMC.

« Notre objectif est d’améliorer notre capacité opérationnelle. Et c’est une très bonne opportunité pour nous d’améliorer notre assistance humanitaire et notre formation en secours en cas de catastrophe », a commenté le commandant japonais Koki Inoue. Et « c’est la première fois que des véhicules militaires blindés japonais sont utilisés sur un sol étranger depuis que le pays a adopté une constitution pacifiste après sa défaite en 1945 », a-t-il observé.

Les manoeuvres « Kamandag 2018 » doivent durer 10 jours. Outre cette opération de débarquement, des entraînements de survie dans la jungle et des exercices avec des tirs réels sont au programme.

Photo : U.S. Navy 

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