La France affûte ses arguments pour convaincre la marine indienne d’acquérir 57 Rafale M

Curieusement, les questions posées par Comptroller and Auditor General » [CAG, l’équivalent indien de la Cour des comptes française] au sujet des conditions dans lesquels furent acquis des avions de patrouille maritime P8 Poseidon auprès de Boeing, alors qu’une coalition gouvernementale dont le Parti du Congrès faisait partie était au pouvoir, n’ont pas suscité la même polémique que celle concernant le contrat relatif aux 36 Rafale destinés à l’Indian Air Force.

Depuis plusieurs semaines, l’opposition incarnée par le Parti du Congrès, dirigé par Rahul Gandhi, soupçonne le Premier ministre Narendra Modi d’avoir favorisé l’entreprise Reliance Defence aux dépens du groupe Hindustan Aeronautics Limited [HAL] pour profiter des compensions industrielles prévues par le contrat Rafale (50% du montant). Et entre informations « bidons », approximations et autres manipulations, les coups volent bas.

Pourtant, Reliance Defence n’est pas la seule entreprise indienne choisie par Dassault Aviation (et l’industriel français insiste bien sur le fait qu’il a décidé cette alliance) au titre des compensations industrielles puisque des accords ont également été conclus avec BTSL, DEFSYS, Kinetic, Mahindra, Maini, SAMTEL, etc… et que d’autres sont en cours de négociations. Et l’on passe sur le partenariat entre Safran (le motoriste du Rafale) et HAL…

En attendant, le ministre indien des Finances, Arun Jaitley, a confirmé, le 24 septembre, que cette polémique n’affecterait pas la livraison des 36 Rafale à l’Indian Air Force, qui en a un besoin urgent.

C’est donc dans ce contexte qu’un autre appel d’offres intéressant Dassault Aviation devrait être prochainement lancé dans le cadre du programme « Multi Role Carrier Borne Fighters » [MRCBF], qui vise à doter la marine indienne de 57 avions de combat multirôles embarqués.

L’Inde dispose déjà de deux porte-avions en configuration STOBAR [Short Take-Off But Arrested Recovery], c’est à dire dotés d’un tremplin, depuis lesquels sont mis en oeuvre des MiG-29K, qui n’ont, a priori, pas donné pleinement satisfaction à la marine indienne. Un troisième navire, cette fois en configuration CATOBAR [Catapult Assisted Take-Off Barrier Arrested Recovery], devrait entrer en service en 2025.

Évidemment, les candidats potentiels ne sont pas nombreux. Si le suédois Saab a défendu le projet de développer une version navale de son avion JAS-39 Gripen, cette compétition devrait se résumer en un mano a mano entre Dassault Aviation, avec son Rafale Marine, et Boeing, avec le F/A-18 Super Hornet.

D’après le quotidien indien « The Economic Times« , la controverse relative au contrat des 36 Rafale destinés à l’Indian Air Force ne devrait avoir aucune incidence sur le programme MRCBF. En outre, le journal indique que « plusieurs discussions ont eu lieu entre les industrels et la marine indienne » au sujet de cet appel d’offres à venir.

Responsable des relations extérieures de la Marine nationale, le contre-amiral Gilles Boidevezi a fait valoir, rapporte le quotidien, que le Rafale « s’est parfaitement intégré aux porte-avions américains et a montré sa capacité à travailler avec des plate-formes non françaises ». Ce qu’a démontré récemment la mission Cheseapeake, au cours de laquelle des Rafale M ont été déployés aux États-Unis afin de maintenir les compétences de leurs pilotes.

Reste un point à éclaircir : la capacité du Rafale à être mis en oeuvre depuis un porte-avions doté d’un tremplin à la place de catapultes.

« Des sources ont indiqué que la partie française avait effectué de nombreux tests et analyses informatiques pour montrer que le Rafale pouvait fonctionner avec une charge significative sur des porte-avions à tremplin », indique The Economic Times. « Ces données ont également été partagées avec la marine indienne », ajoute-t-il.

Ce dossier devrait être évoqué à l’occasion d’une visite à Paris de Nirmala Sitharaman, la ministre indienne de la Défense, le 11 octobre prochain. Il sera également d’autres sujets, comme celui des sous-marins Scorpène.

Les modalités de l’appel d’offres que lancera le ministère indien de la Défense restent encore à définir. L’on ignore encore si les avions du programme MRCBF seront assemblés en partie en Inde. A priori, The Economic Times en doute : le nombre « relativement » faible d’appareils commandés rendrait leur production locale trop chère.

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