La disponibilité des hélicoptères militaires français peine à décoller alors que le coût de la maintenance s’envole

La trop faible disponibilité des 467 hélicoptères des forces françaises est devenu un sujet récurrent ces dernières années. Et, après les chiffres dévoilés par le député François Cornut-Gentille, c’est au tour du sénateur Dominique de Legge de sonner le clairon sur cette situation qui a des conséquences non seulement sur l’entraînement des équipages et sur le travail des mécaniciens mais aussi sur la conduite de certaines opérations.

Ainsi, dans le rapport qu’il vient de publier, le sénateur de Legge, rapporteur spécial des crédits de la mission « Défense », rappelle que, en 2017, le taux de disponibilité moyen des hélicoptères mis en oeuvre par le ministère des Armées s’élevait à seulement 36%. Et sur le nombre d’appareils en service, 161 (35%) étaient « immobilisés » chez l’industriel, 135 (39%) l’étaient dans les forces et seulement 171 étaient disponibles, c’est à dire apte à effectuer une mission conforme à leur emploi.

Or, entre 2009 et 2017, souligne le sénateur, le coût du Maintien en condition opérationnelle (MCO) de ces hélicoptères a bondi de 56,4%, passant de 412 à 645 millions d’euros, ce qui fait un taux de croissance annuel moyen de 5,8%.

Aussi, le coût de l’heure de vol explose : celui de l’Alouette III est passé de 5.000 euros en 2010 à 13.000 euros en 2017. En quatre ans, celui du Lynx a augmenté de 8.000 euros (22.000 euros contre 14.000).

Comment en est-on arrivé là? Le rapport donne plusieurs raisons. La première est le fort engagement opérationel des armées (et de l’Aviation légère de l’armée de Terre en particulier). Au Sahel, par exemple, les appareils souffrent, ce qui augmente le niveau « structurel » d’indisponibilité, avec des réparations et des visites périodiques plus fréquentes.

Une deuxième raison saute aux yeux quand on regarde les types d’hélicoptères en service : le parc est hétérogène, avec une douzaine de flotte distinctes et de générations différentes (40 ans séparent l’Alouette III du NH-90). Évidemment, cela complique le soutien…

Ensuite, M. de Legge estime que les performances de la chaîne logistique ne sont pas satisfaisantes et que l’application des règles de navigabilité n’est pas adapté à la défense. Ainsi, explique-t-il, les « défaillances du soutien industriel » ont des « répercussions » au niveau du soutien opérationnel [NSO], assuré au niveau des unités.

Quant au soutien industriel [NSI], le parlementaire pointe une « absence de coordination conduisant à une multiplication des interventions dont la qualité n’est pas toujours jugée satisfaisante », avec des « délais d’immobilisation excédant les prévisions » et une identification des responsabilités complexe du fait de l’éclatement du paysage contractuel. »

Enfin, l’organisation du MCO était jusqu’à présent compliquée, avec la séparation entre le soutien initial, assuré par la Direction générale de l’armement [DGA] et le soutien en service, relevant de la Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense [Simmad].

Sur ce dernier point, des mesures ont été prises, dans le cadre du plan de modernisation du MCO aéronautique, annoncé en décembre 2017 par Florence Parly, la ministre des Armées. En avril, la Direction de la maintenance aéronautique (DMAé) a été officiellement créée et rattachée au chef d’état-major des armées (CEMA), afin de favoriser la cohérence interarmées.

Pour autant, M. de Legge est circonspect face à cette réforme dont « l’utilité reste à prouver » et qui « ne sera pas à elle-seule suffisante. »

« La mise en place de schémas ‘verticalisés’, c’est-à-dire la passation de contrats longs et globaux, confiant la responsabilité de la
quasi-totalité de la maintenance à un maître d’œuvre unique, devrait permettre de clarifier les responsabilités de chaque acteur », admet-il. Mais, estime-t-il, elle ne pourra être un « facteur d’amélioration » qu’à la condition qu’une « vigilance sur les
marges réalisées par les industriels » soit assurée et que le lien entre les industriels et les forces soit maintenu.

Aussi, le sénateur fait plusieurs recommandations, organisées selon trois axes. Le premier vise à améliorer le pilotage financer du MCO aéronautique en mettant en place de nouveaux indicateurs permettant, par exemple, de « mesurer la disponibilité technique (DT) des matériels et non uniquement la disponibilité technique opérationnelle (DTO). » Un autre entend faire évoluer les relations avec les industriels. Enfin, le dernier parle de « renforcer l’efficacité du soutien opérationnel ».

Et parmi les mesures qu’il propose, M. de Legge estime nécessaire d’accélérer les livraisons du programme HIL [hélicoptère interarmées léger] afin de rationnaliser les flottes d’appareils actuellement en service (dont les Gazelle, Fennec, Puma, Alouette III, Dauphin SP et autres Panther).

Photo : armée de Terre

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