Les forces néerlandaises vont se désengager du Mali pour se concentrer sur les missions de l’Otan

Le rapport annuel 2018 du Stockholm International Peace Research Institute (Sipri) souligne qu le nombre de Casques bleus a diminué de 7,6% l’an passé, ce qui risque de rendre illusoire le renforcement de la sécurité des opérations de maintien de la paix conduites par les Nations unies, comme le préconise le rapport du groupe d’experts dirigé par le général brésilien Carlos Alberto dos Santos Cruz et publié en janvier dernier.

« Les coupes budgétaires et la réduction des troupes correspondantes ont obligé l’ONU à repenser sa stratégie dans de nombreuses opérations », explique le Sipri. Dans ces conditions, demande le Dr Jair van der Lijn, le directeur du programme Gestion de conflit et Maintien de la paix de l’institut suédois, « est-il réaliste de s’attendre à ce que les Nations Unies continuent de faire plus avec moins, et cela vaut-il la peine de prendre le risque? »

En tout cas, cela ne s’arrangera pas avec la décision que vient de prendre le gouvernement néerlandais. Le 15 juin, ce dernier a annoncé qu’il mettrait un terme à l’engagement de ses troupes (270 militaires environs) au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali [MINUSMA] à partir du 1er mai 2019.

Au Mali, les militaires néerlandais – issus principalement de la 11e Brigade aéromobile – assurent des missions de reconnaissances et de renseignement au profit de la mission des Nations unies. Par le passé, ils avaient mis en oeuvre des hélicoptères CH-47 Chinook [transport] et AH-64 Apache [attaque], relevés depuis par des appareils allemands et belges.

Pour expliquer cette décision, le gouvernement néerlandais a mis en avant les coupes budgétaires – drastiques – qui ont affecté les forces armées en 2011. Et comme il est plus facile de casser que de construire, ces dernières peinent à s’en remettre.

« Les années d’économies budgétaires, accompagnées d’une tension et de responsabilités internationales croissantes, ont eu des répercussions sur nos forces armées », a-t-il en effet expliqué. Aussi, ajoute-t-il, « il va sans dire que celles-ci doivent être déployées de façon responsable. »

Cette décision a été conformée par un récent rapport de la Cour des comptes du pays sur l’engagement des troupes néerlandaises au Mali, lequel a souligné leur manque d’équipements, d’entraînement et de préparation pour une telle mission. Aussi, cette dernière a des répercussions sur la défense néerlandaise, qui doit faire face à d’autres engagements.

« Malheureusement, nous devons conclure que les années d’austérité n’ont pas été sans impact sur les forces armées. En plus de cela, nous devons faire face à une détérioration de la sécurité en Europe avec la Russie, en Syrie, en Irak et au Sahel », a commenté le gouvernement néerlandais, peu après la publication de ce rapport.

Cette austérité a eu des conséquences dramatiques. Ainsi, le Bureau d’enquête pour la sécurité (OVV) a conclu que la mort, en 2016, au Mali, de deux soldats néerlandais avait été causée par l’utilisation de « vieux obus » achetés en 2006, dans « l’urgence » et avec « l’aide du département américain de la défense ». Or, ces munitions présentaient des « zones fragiles dans leur conception, l’humidité pouvant ainsi y pénétrer ». Et, combinée à la chaleur, cette dernière a rendu ces « substances explosives très instables et sensibles aux chocs. » Cette affaire motivé la démission de la ministre de la Défense, Jeanine Hennis-Plasschaert, et celle du chef d’état-major, le général Tom Middendorp.

Cela étant, La Haye explique donc le retrait de ses troupes du Mali par la nécessité de les « déployer de façon responsable », d’autant plus que la sécurité internationale « s’est dégradée ». « L’intervention continuelle et préoccupante de la Russie en Crimée et en Ukraine orientale, la capacité d’action et l’influence des groupes djihadistes dans le pourtour européen – et le spectre terroriste qui en découle – ainsi que les migrations irrégulières vers l’Europe sont autant de
menaces concrètes », fait valoir le gouvernement néerlandais.

Pour autant, ce désengagement du Mali permettra aux Pays-Bas de se concentrer davantage sur les missions de l’Otan, à commencer par celle actuellement en cours en Afghanistan, où 100 militaires néerlandais sont déployés pour accompagner une unité des forces spéciales afghanes basée à Mazar-e-Sharif.

Ainsi, il est question d’y envoyer 60 militaires de plus jusqu’en 2021. « Les Pays-Bas contribueront ainsi au renforcement de l’appareil de sécurité afghan. Ils continueront à œuvrer en faveur d’une solution politique, indispensable à une stabilité durable », fait valoir La Haye.

En outre, poursuit le gouvernement néerlandais, « les Pays-Bas annonceront lors du prochain sommet de l’OTAN, les 11 et 12 juillet, la prolongation jusqu’en 2020 de leur participation à la présence avancée renforcée de l’Otan en Lituanie ». Le choix d’une « contribution pluriannuelle » vise à « optimiser l’effet de l’engagement et faciliter la planification militaire. »

Toutefois, les Pays-Bas ne vont pas se désintéresser totalement de la Bande sahélo-saharienne. « Pour faire front contre des menaces telles que le terrorisme et les migrations irrégulières », ils y « resteront activement impliqués de diverses manières », a indiqué le gouvernement néerlandais, sans donner plus de précisions.

Pour rappel, les forces néerlandaises sont également engagées dans l’opération Inherent Resolve (avec des F-16 en Joradanie et des instructeurs affectés auprès des troupes irakiennes) et participent (d’une manière relativement limitée) à plusieurs opérations des Nations unies (UNMISS au Soudan, FNUOD sur le plateau du Golan, etc).

Photo : Koninklijke Landmacht

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