Le Maroc rompt ses relations diplomatiques avec l’Iran, qu’il accuse d’avoir livré des armes au Front Polisario

Ancienne colonie espagnole, et depuis la « Marche verte » du roi Hassan II, le Sahara occidental est revendiqué par le Maroc, ce que contestent les indépendantistes sahraouis du Front Polisario, qui, soutenus par Alger, y ont proclamé la « République arabe sahraouie démocratique » (RASD) au lendemain du départ des derniers soldats espagnols, en février 1976.

En 1991, grâce à une médiation de l’ONU, un cessez-le-feu et une zone tampon furent établis, avec la promesse d’organiser un référendum sur le statut de ce territoire, contrôlé à 80% par le Maroc. À cette fin, la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) fut déployée. Et elle l’est encore, son mandat ayant été encore une fois prolongée de 6 mois de plus, le 27 avril.

En effet, à Rabat, il n’est pas question d’un quelconque référendum d’autodétermination (contrairement à ce que veut le Front Polisario) mais d’accorder un statut d’autonomie de ce territoire disputé depuis maintenant plus de 40 ans. Et comme les deux parties campent sur leurs positions, tout compromis est pour le moment hors d’atteinte.

Aussi, en prologeant le mandant de la MINURSO pour seulement 6 mois (au lieu d’un an), le Conseil de sécurité de l’ONU entend mettre la pression pour forcer les deux protagonistes à revenir à la table des négociations.

Quelques jours plus tôt, le roi Mohammed VI avait accusé le Front Polisario de se développer au Sahara occidental et demandé aux Nations unies et à l’Algérie de « prendre leurs responsabilités ». Faute de quoi, le Maroc « prendrait les siennes ». Selon Rabat, des combattants indépendantistes auraient en effet multiplié les incursions dans les environs de la ville de Mahbes, dans le nord-est du territoire disputé, en violation d’un accord militaire sur la zone tampon.

C’est donc dans ce contexte que le Maroc a annoncé, le 1er mai, la rupture de ses relations diplomatiques avec l’Iran, qu’il a accuse d’avoir facilité la livraison d’armes au Front Polisario, via un intermédiaire, à savoir le Hezbollah libanais.

Ce n’est pas la première fois qu’un telle rupture survient. En 2009, Rabat en avait déjà fait de même pour protester contre « l’activisme » religieux chiite dans le royaume. Il aura fallu attendre 5 ans pour que les liens diplomatiques soient rétablis.

Selon le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, une « première livraison d’armes a récemment été fournie au Polisario » via un « élément » à l’ambassade iranienne à Alger. « Le Maroc dispose de preuves irréfutables, de noms identifiés et de faits précis qui corroborent cette connivence entre le Polisario et le Hezbollah contre les intérêts suprêmes du royaume », a-t-il avancé.

Aussi, l’ambassadeur du Maroc à Téhéran a été rappelé à Rabat et « je vais demander au chargé d’affaires de l’ambassade d’Iran de quitter le royaume sans délai », a ajouté M. Bourita, qui revenait d’un déplacement à Téhéran où il venait d’informer son homologue iranien, Mohammad Javad Zarif, de la décision des autorités marocaines.

Au Liban, le Hezbollah a rejeté les accusations marocaines et affirmé que ces dernières étaient dues à des « pressions américaines, israéliennes et saoudiennes. » De son côté, le Frot Polisario, via l’un de ses responsables, Mhamed Khaddad, a parlé « d’accusations infondées » auxquelles le Maroc « n’a apporté aucune preuve. »

« Le Polisario n’a jamais eu de relations militaires avec le Hezbollah et l’Iran. C’est un mensonge grotesque pour impliquer le Maghreb dans la crise du Moyen-Orient », a affirmé M. Khaddad depuis Alger, où il a été sollicité par l’AFP. « Ce que cherche le Maroc, c’est à se dérober au processus de négociations auquel vient d’appeler le Conseil de sécurité de l’ONU », a-t-il fait valoir.

Dans ce nouveau bras de fer avec l’Iran, le Maroc peut évidemment compter sur le soutien de l’Arabie Saoudite, dont il est un proche allié, et donc sur celui des Émirats arabes unis et de Bahreïn.

« Le gouvernement saoudien condamne fermement l’ingérence iranienne dans les affaires intérieures du Maroc via son instrument, la milice terroriste du Hezbollah, qui entraîne les éléments du soi-disant groupe ‘Polisario’ en vue de déstabiliser la sécurité et la stabilité » du Maroc, a fait savoir le ministère saoudien de l’Information.

L’Arabie Saoudite se « se tient aux côtés du royaume frère du Maroc pour tout ce qui garantit sa sécurité et sa stabilité, y compris sa décision de rompre ses relations avec l’Iran », a ajouté la même source.

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