Les frappes contre le programme chimique syrien auraient eu quelques « couacs »

Dans la nuit du 13 au 14 avril, les forces françaises, américaines et britanniques ont frappé des sites du programme chimique syrien près de Damas et dans la province de Homs. Les résultats de ce raid, en dépit des affirmations russes sur l’efficacité de la défense aérienne syrienne, sont sans appel, les images prises par satellite des infrastructures visées ne laissant guère de place au doute.

Cependant, si elle a été très bien exécutée alors qu’elle exigeait une étroite coordination entre les forces impliquées (il s’agissait de faire arriver en même temps l’ensemble des missiles de croisière tirés par avion et navire), l’opération Hamilton a connu quelques couacs, rapportés par plusieurs médias (qui ne donnent pas toujours la même version des faits).

Ce 20 avril, la ministre des Armées, Florence Parly, n’a pas souhaité les commenter. « Vous comprendrez que ces informations, qu’elles soient vraies ou fausses, sont tout à fait classifiées et donc je ne les commenterai pas », a-t-elle dit, ce 20 avril, sur les ondes de France Bleu Provence. « Nous avons tiré le nombre de missiles qui étaient nécessaires pour atteindre et pour détruire les cibles que nous nous étions fixées […] Nos objectifs ont été atteints et nous n’avons rien à ajouter », a-t-elle ajouté.

Au total, les forces françaises ont lancé 12 missiles de croisière, dont 9 par 5 Rafale et 3 par une frégate multimissions (en l’occurence, la FREMM Languedoc, si l’on en croit les affirmations du Pentagone).

Un Rafale B peut emporter deux missiles SCALP. Comme cinq appareils ont été sollicités pour l’opération Hamilton, l’on peut se demander pourquoi 9 munitions de ce type ont été tirées et non pas 10. Était-ce prévu lors de la planification de l’opération Hamilton ou bien y a-t-il eu un raté? D’après Le Point, qui a contacté l’armée de l’Air, il y a bien eu incident de tir. Et « des analyses techniques sont en cours pour en déterminer l’origine », a-t-elle précisé.

Le plus délicat est ce qu’il s’est passé avec les FREMM, dont trois ont été engagées dans l’opération (Aquitaine, Languedoc, Auvergne). A priori, l’un d’entre elles avait été placée en réserve, en cas d’impondérable. Donc deux de ces navires auraient dû tirer chacun une salve de trois missiles de croisière navals (MdCN), dont c’était le baptême du feu. Finalement, une seule l’a été.

Que s’est-il passé exactement? Là, les versions qui circulent sont contradictoires. Selon RTL, la première FREMM n’a pas été en mesure de lancer ses 3 MdCN en raison d’un problème technique (informatique apparemment, ce qui aurait nécessité de réinitialiser le système. Bug? Ou autre chose de plus sérieux?). Même chose pour la seconde. Et ce serait donc la troisième, celle en réserve, qui aurait tiré les siens.

Pour d’autres sources, la seconde FREMM aurait bien lancé ses 3 MdCN mais, la fenêtre de tir s’étant refermée, la troisième n’aurait pas eu le temps d’entrer en action.

Cela étant, selon l’État-major des armées (EMA), « l’effet militaire a été atteint » et comme pour Mme Parly, il n’est pas question de commenter « les détails de la planification opérationnelle. »

Reste que le tir de missiles de croisière depuis une frégate aura été une première pour la Marine nationale, ce qui l’a fait entrer dans le club très fermé des forces navales disposant d’une telle capacité.

« Pour la première fois, sans moyens amphibies, sans forces spéciales, sans porte-avions, avec les frégates notre pays dispose d’un missile qui peut toucher des installations en profondeur sur les territoires adverses », a fait valoir, auprès de l’AFP, l’amiral Christophe Prazuck, le chef d’état-major de la Marine nationale (CEMM). « À l’intérieur de l’Union européenne, la France est la seule à disposer de cette capacité », a-t-il insisté.

« Les objectifs ont été touchés. C’est une première démonstration opérationnelle de l’efficacité du système. Néanmoins on a toujours une expérience à retirer de l’ensemble du processus, c’est ce qu’on va faire dans les semaines qui viennent », a ajouté le CEMM, sans livrer plus de détails.

Pour le moment, il sera compliqué d’avoir le fin mot de l’histoire étant donné que le ministère des Armées ne souhaite pas faire de commentaire. Au moins, en matière de communication, cela évite de s’emmêler les pinceaux, comme l’a fait le Pentagone…

Ainsi, il fut avancé que les B-1 Lancer sollicités pour le raid contre le site de Barzeh avait utilisé 19 missiles AGM-158 JASSM-ER. Un fait confirmé par le général Kenneth McKenzie, un haut responsable du Pentagone. Finalement, le porte-parole de l’AFCENT [la composante « air » de l’US CENTCOM], le capitaine Mark Graff, a affirmé que les bombardiers ont tiré une version plus ancienne de ce missile, à savoir le JASSM-A.

Enfin, l’AFCENT avait affirmé, peu après l’opération Hamilton, qu’aucun F-22 Raptor n’était dans les airs au moment où elle fut conduite. Ce qui pouvait, là-aussi, être bizarre étant donné que l’on pouvait s’attendre à l’implication de ces appareils de 5e génération. Puis, le 19 avril, la même AFCENT a changé de version.

« Grâce à ses capacités uniques, le F-22 était le seul appareil capable d’évoluer face aux systèmes de défense aérienne intégrés syriens, offrant ainsi l’option de neutraliser les menaces [des défenses syriennes, ndlr] et de fournir une protection aérienne aux forces américaines ainsi qu’à celles de la coalition et de celles de leurs partenaires sur le terrain, en Syrie », a en effet déclaré le capitaine Graff, qui n’a cependant pas précisé le nombre de Raptor engagés.

Photos : Sites de Him Shinshar et de Barzé, avant et après les frappes (via DigitalGlobe)

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