Les armées allemandes et néerlandaises sont passées de « la collaboration à l’intégration »

En matière de coopération dans le domaine de la défense, la France ne cesse de faire des appels du pied à l’Allemagne… Et l’Allemagne regarde du côte des Pays-Bas. Depuis maintenant plusieurs années, et au-delà des coopérations industrielles (comme au sein du consortium ARTEC, qui produit le blindé Boxer), ces deux pays n’ont cessé d’intensifier leurs relations militaires, en cherchant une intégration toujours plus accrue de leurs forces armées.

Ainsi, la 11e Brigade aéromobile (Luchtmobiele Brigade) et la 43e Brigade mécanisée néerlandaises ont respectivement été placées sous le commandement de la Division Schnelle Kräfte (DSK) et de la 1ère Panzerdivision allemandes.

Les Pays-Bas ayant sacrifié leur arme blindée cavalerie (ABC) sur l’autel de la rigueur budgétaire, le Panzerbataillon 414 de la Deutsches Heer, comptant un escadron néerlandais de 16 chars Leopard 2A6 parmi ses unités, a été intégré à la 43e Brigade mécanisée néerlandaise.

Pour ce qui concerne les capacités maritimes, les Pays-Bas ont consenti à partager avec l’Allemagne l’utilisation du navire logistique Zr. Ms. Karel Doorman. En échange, le Seebataillon de la Deutsche Marine a été placé sous commandement néerlandais.

Ce mouvement, d’abord motivé par les restrictions budgétaires, ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Ainsi, depuis le 4 avril, une unité anti-aérienne de la Luftwaffe, le Flugabwehrraketengruppe 61, dépend officiellement du Defensie Grondgebonden Luchtverdedigingscommando (DGLC), c’est à dire le commandement néerlandais assurant la défense aérienne.

« Ce qui a commencé en 1995 avec la formation d’un corps d’armée germano-hollandais est devenu une coopération de défense inégalée. Nous sommes passés de la collaboration à l’intégration », s’est félicité Ursula von der Leyen, la ministre allemande de la Défense, lors de la cérémonie marquant ce transfert.

Il s’agit de la dernière étape d’un processus entamé il y a plusieurs mois, avec le rapprochement dans le secteur de la défense antimissile, les états-majors allemand et néerlandais ayant déclaré une capacité opérationnelle commune dans ce domaine, en 2016. Le fait que les deux pays mettent en oeuvre le même système de défense aérienne, à savoir le Patriot PAC-2 américain, a évidemment grandement contribué à ce rapprochement.

Mais il est question d’aller plus loin. Puisque leurs forces respectives coopérent (voire sont « intégrées ») en matière de défense aérienne, l’Allemagne et les Pays-Bas envisageraient de renouveler conjointement leurs systèmes Patriot. En tout cas, c’est ce qu’a récemment suggéré le général Michael Gschossmann, qui commande les unités de défense aérienne de la Luftwaffe, dans un entretien donné à l’agence Reuters.

Une porte-parole du ministère néerlandais de la Défense a confirmé que les deux pays « envisageaient d’éventuels programmes d’achats conjoints », tout en prenant soin de préciser qu’aucune décision n’avait été encore prise.

En outre, cette relation particulière entre l’Allemagne et les Pays-Bas pourrait aussi concerner le domaine des sous-marins (ainsi que celui des frégates MKS-180, pour lequel le néerlandais Damen serait bien placé).

D’après DefenseNews, la Norvège, qui compte acquérir 4 submersibles U-212 NG auprès de l’allemand ThyssenKrupp Marine Systems (pour 4,3 milliards d’euros), ne s’opposerait pas à l’arrivée des Pays-Bas dans ce programme, ce qui permettrait d’en réduire le prix d’achat en misant sur l’effet d’échelle ainsi que les coûts d’exploitation. Pour rappel, 6 sous-marins sont prévus au total, la Deutsche Marine devant en recevoir 2 exemplaires.

« La Norvège et l’Allemagne souhaiteraient voir d’autres partenaires se joindre à ce programme, et ce serait très bien si les Pays-Bas décidaient d’y adhérer », a ainsi affirmé Ann Kristin Salbuvik, la porte-parole du ministère norvégien de la Défense.

Sauf que le gouvernement néerlandais doit vite se décider s’il veut profiter de ce programme pour remplacer les sous-marins Walrus de ses forces navales, comme le prévoit le « Defensienota » (ou mémorandum sur la défense) publié fin mars. « La conception des sous-marins germano-norvégiens sera bientôt gelée afin que TKMS, puisse fournir une offre ferme en juillet 2018 », a expliqué Mme Salbuvik.

Par ailleurs, après avoir réduit drastiquement le format de leurs forces armées afin de réduire leurs dépenses publiques (ce qui n’a pas eu forcément l’impact escompté), les Pays-Bas prévoit d’augmenter leurs dépenses militaires de 910 millions d’euros de plus que prévu en 2018. Puis la hausse sera de 1,2 milliard en 2019, 1,4 milliard en 2020 et 1,5 milliard en 2021. Cela devrait leur permettr pas de porter leur effort de défense à 1,3% du PIB, bien loin de la norme des 2% du PIB que les dirigeants bataves ont pourtant acceptée lors du sommet de Newport, en 2014.

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