Centrafrique : Le Haut-Commissariat aux réfugiés dénonce la dérive sectaire d’un groupe armé musulman

Le Mouvement patriotique pour la Centrafrique (MPC), dirigé par Mahamat al-Khatim, est un groupe armé qui fit partie de l’ex-coalition rebelle de la Séléka, avant de rejoindre le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC) du chef de guerre Noureddine Adam, qu’il a récemment quitté.

Composé essentiellement de combattants musulmans, le MPC affronte régulièrement les milices dites anti-balaka. Son projet politique évoque la création d’une « république de Logone », sur les contours géographiques du sultanat de Dar al-Kuti (1830-1912), dans le nord-est de la Centrafrique.

Un récent rapport relatif à la situation en Centrafrique et remis au Conseil de sécurité des Nations unies note que ce groupe armé a « continué de saboter le redéploiement des autorités de l’État dans les préfectures de la Bamingui-Bangoran, de la Vakaga et de la Nana Grébizi » et que ses partisans, avec ceux du FPRC, « ont mis le feu à des bâtiments administratifs lors de violentes émeutes contre la nomination » d’un préfet.

Cependant, le même rapport a constaté un « recul des violences intercommunautaires et une une intensification des affrontements entre les groupes armés et les milices d’autodéfense, en particulier dans les zones touchées par les migrations saisonnières. » Et d’ajouter que « la concurrence pour le contrôle du territoire et l’accès aux ressources naturelles demeure le principal moteur de la violence des groupes armés. »

En clair, les violences intercommunautaires constatées jusqu’alors étaient probablement un prétexte pour gagner du terrain et faire main basse sur les ressources minières du pays. Mais, et c’est un fait nouveau, le MPC a fait parler de lui pour avoir instauré une justice parallèle dans la région de Kaga Bandoro (nord).

« La Minusca [la mission des Nations unies en République centrafricaine, ndlr] a un dispositif contre les abus sexuels. Nous avons également mis en place notre dispositif. Dans le Coran, le concubinage est considéré comme un adultère. On demande aux couples de respecter ces conditions », a ainsi expliqué Amadama Chaïbou, le numéro deux du MPC, à l’AFP.

« Ce dispositif, mis en place mi-février, implique que les couples mixtes musulmans-chrétiens devront officialiser leur union devant un imam, après la conversion de la personne chrétienne », a précisé Amadama Chaïbou.

D’après RFI, des parents se plaindraient que leurs filles aient été sexuellement abusées par des combattants du MPC… D’où ce système destiné, a expliqué le lieutenant de Mahamat al-Khatim, à « empêcher le vagabondage sexuel ». En clair, il est exigée des jeunes femmes violées qu’elles se convertissent à l’islam avant d’épouser leur agresseur. En cas de refus, elles sont « dépouillées de leurs biens et parfois battues ». Un point que le groupe armé réfute.

Toujours est-il que le Haut-Commissariat des Nations unies aux réfugiés (UNHCR) a vivement condamné ces pratiques, qu’il a qualifiées de « sectaires » et visant à « imposer certains préceptes librement inspirés de la charia [loi islamique, ndlr] ».

En outre, l’UNHCR a dit avoir « constaté « des violations graves des droits humains et des mouvements de populations en direction des principaux sites de déplacés. »

La mission des Nations unies a elle aussi réagi. « Quant à la tentative du MPC de mettre en place un système de justice parallèle à Kaga Bandoro, la MINUSCA juge cette initiative inacceptable et contraire à la Constitution du pays qui fait de la République centrafricaine un Etat laïc », a affirmé son porte-parole, Vladimir Monteiro, le 7 mars.

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